L’économie syrienne transformée par la guerre, soutenue par les alliés

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étrole à Derik, le 25 novembre 2013 (Photo : Achilleas Zavallis)

[12/03/2014 09:30:33] Beyrouth (AFP) La Syrie s’est installée dans une économie de guerre, où la priorité est d’assurer le pain et la nourriture, mais malgré les sanctions et les destructions, l’économie ne s’est pas effondrée et la monnaie, bien qu’affaiblie, n’a pas rendu l’âme.

Le PIB a été presque divisé par deux depuis 2010, la dernière année avant le conflit, et le régime a été touché par des sanctions internationales et la perte de champs pétroliers pris par les rebelles.

Mais l’économie a jusqu’à présent évité l’effondrement complet, grâce à un soutien financier crucial des principaux alliés de Damas, la Russie et l’Iran.

“L’économie syrienne s’est radicalement transformée (…). L’économie que nous connaissions a été en grande partie détruite”, explique l’économiste Jihad Yazigi, auteur du site d’information économique The Syria Report.

“De vastes segments de l’économie syrienne ont cessé de produire et de nombreux acteurs économiques ont quitté le pays”, ajoute-t-il.

Parallèlement, “les vols, les enlèvements, les barrages sur les routes et contrôle des champs pétroliers (…) sont devenus sources de revenus”, explique-t-il.

“L’économie informelle comme l’économie de guerre se développent. Certains hommes d’affaires ont bénéficié de la guerre, de nouvelles institutions et de nouveaux réseaux se sont développés avec elle”, insiste-t-il.

La révolte, au départ pacifique, a débuté en mars 2011, avant de se militariser face à une répression brutale, plongeant la Syrie dans un conflit complexe qui a fait, selon une ONG, plus de 140.000 morts et poussé près de la moitié des habitants hors de leur foyer, voire hors du pays.

– “Pauvreté extrême” –

“La Syrie est un champ de bataille avec des fronts multiples et complexes”, estime Mazen Irsheid, de la Jordan’s United Financial Investment Company.

Selon l’Economist Intelligence Unit, le PIB syrien atteindra 34 milliards de dollars en 2014, bien loin des 60 milliards enregistrés en 2010.

En octobre, l’ONU a estimé que l’économie syrienne avait perdu 103 milliards de dollars entre le début du conflit et la mi-2013, dont 49 milliards pour la seule année 2012.

Le taux de chômage approche les 50% et la moitié des 23 millions de Syriens vivent à présent sous le seuil de pauvreté, dont 4,4 millions survivent dans une “pauvreté extrême”, selon l’ONU.

Dans ces conditions, les Syriens cherchent avant tout à assurer leurs besoins les plus essentiels: pain, thé, sucre, carburant.

Or, la production pétrolière s’est effondrée, passant de 385.000 barils par jour à 14.000. Pour faire face à sa consommation domestique estimée à 150.000 barils par jour, la Syrie doit désormais importer du pétrole iranien, pour une valeur de 400 millions de dollars par mois.

– Aides russe et iranienne –

L’Iran apparaît désormais comme une vraie planche de salut pour l’économie et le régime syrien, auquel il a ouvert en juillet 2013 une ligne de crédit de 3,6 milliards de dollars.

Et la Russie, l’autre allié du régime, a joué un rôle de soutien essentiel pour l’économie du pays. En décembre, Damas a signé un accord autorisant une compagnie russe à rechercher des hydrocarbures dans ses fonds sous-marins.

“La Syrie tient encore debout sur le plan économique grâce au soutien de ses alliés”, assure M. Irsheid. “Par conséquent, on ne peut pas s’attendre à un effondrement pour le moment”.

D’autres facteurs ont permis à la Syrie de ne pas sombrer, en particulier l’exode de quelque 2,5 millions d’habitants réfugiés dans les pays limitrophes, la baisse des dépenses publiques et l’aide internationale, selon les experts.

Pour M. Irsheid, les avancées de l’armée sur le terrain, avec le soutien du Hezbollah libanais, ont aussi aidé à stabiliser certains indicateurs économiques: “Ces derniers mois, le statut de la livre syrienne s’est amélioré, même au marché noir, grâce à ces avancées”.

Selon les prévisions 2014-2018 de The Economist, l’économie de la Syrie devrait “toucher le fond” cette année, et les perspectives à long terme restent sombres.

“En fait, cela pourrait être pire qu’à présent. La Syrie est entrée dans un long tunnel et n’en sortira pas à la fin de la crise”, estime M. Irsheid.