Société Générale : Kerviel fixé sur son sort judiciaire, depuis l’Italie

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érôme Kerviel à son arrivée à Modeme le 18 mars 2014 (Photo : Gabriel Bouys)

[19/03/2014 05:26:13] Paris (AFP) Jérôme Kerviel saura mercredi si sa condamnation devient définitive, ce qui entraînerait son incarcération à brève échéance, ou s’il peut poursuivre son parcours judiciaire, à l’image de la marche qu’il a entreprise il y a trois semaines entre Rome et Paris.

Plus de six ans après les faits, Jérôme Kerviel continue à clamer son innocence et à accuser son ancien employeur d’avoir menti sur ses propres responsabilités dans l’affaire.

Mais en cas de rejet de son pourvoi par la Cour de cassation, il aura épuisé les voies de recours et sa condamnation à trois ans de prison ferme et 4,91 milliards d’euros de dommages et intérêts (le montant des pertes revendiquées par Société Générale), deviendra exécutoire.

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érôme Kerviel à son arrivée le 27 juin 2012 au palais de justice à Paris (Photo : Bertrand Guay)

Il ne pourra pas bénéficier d’un aménagement de peine avant incarcération, qui n’est ouvert qu’aux personnes condamnées à moins de deux ans d’emprisonnement.

En 2008, il avait passé 41 jours en détention provisoire, ce qui porterait le solde de sa peine, en cas de rejet du pourvoi, à un peu plus de 2 ans et 10 mois.

Mais l’ancien opérateur de marché, symbole de la dérive des marchés financiers, se dit serein. “Je n’y pense pas, sauf quand des journalistes me posent la question. Je pense à ma mère, à mon frère, qui m’accompagnent depuis six ans”, a-t-il dit mardi à l’AFP.

Comme prévu, il ne sera d’ailleurs pas présent lors de la lecture de la décision, attendue à 14H00. Plus “probablement entre Modène et Parme”, au nord de l’Italie. Voilà quasiment quatre semaines que Jérôme Kerviel a entamé une marche entre Rome et Paris, quelques jours après une rencontre au Vatican avec le pape François.

Avec cette marche il retrouve “la liberté et la fraternité. Quant à l’égalité, elle n’existe pas quand on se retrouve face à une banque”, explique l’homme au pull rouge (son unique tenue depuis son départ de Rome), qui affirme qu’il ne s’exprimera pas mercredi après la décision.

– “Un combat qui peut durer des années” –

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érôme Kerviel à son arrivée à Modeme le 18 mars 2014 (Photo : Gabriel Bouys)

Ainsi, cette marche ne sert pas seulement à lui laver la tête, comme l’a dit son avocat David Koubbi, évoquant un “justiciable (qui) en est rendu à rentrer à Paris à pied sur deux mois, ou sur trois mois de trajet pour alerter sur une anomalie qui est majeure”.

L’anomalie, c’est ce “dysfonctionement judiciaire (…) majeur, puisqu’il n’y a pas d’expertise” indépendante des pertes subies par la banque, que le conseil accuse même d’avoir “disposé de complicités au sein de différents gouvernements, au sein de l’appareil judiciaire français”.

Une thèse soutenue par l’ex magistrate Eva Joly, aujourd’hui député européen EELV, celle de la culpabilité de la banque qui aurait, selon la défense de Kerviel, commis une “faute volontaire” en ne tenant pas compte des alertes relatives aux écarts de son salarié.

Devant la Cour de cassation, le conseil de l’ancien trader, Me Patrice Spinosi, avait avancé que, connaissant tout ou partie de ses agissements, la Société Générale ne pouvait avoir été victime d’abus de confiance, principal chef d’accusation retenu. “Une victime négligente n’est pas pour autant une victime consentante”, lui avait répondu l’avocat général, Yves Le Baut.

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érôme Kerviel et son avocat David Koubbi à leur arrivée le 24 octobre 2012 au palais de justice de Paris (Photo : Mehdi Fedouach)

Outre l’abus de confiance, la cour d’appel de Paris a condamné Kerviel pour introduction frauduleuse de données, sur la base des centaines d’opérations fictives passées, ainsi que pour faux et usage de faux, en lien avec plusieurs courriers électroniques falsifiés.

“J’ai appris que le procureur avait décidé de demander mon incarcération immédiate si le procès n’était pas cassé. J’ai l’impression que je suis Guy Georges”, a-t-il déclaré sur Canal+, en référence au tueur en série condamné en 2001.

En cas de rejet du pourvoi, son incarcération ne sera, en réalité, pas immédiate mais devrait intervenir dans les prochains mois. “Quoi qu’il arrive, ce n’est pas une fin”, assure-t-il. “Je suis en train de me regénérer pour un combat qui peut durer des années”.