ées à chameau, le 22 février 2014 (Photo : Ivan Lieman) |
[25/03/2014 08:52:41] Mombasa (Kenya) (AFP) “Les affaires vont mal”. Sur une plage de Mombasa, comme dans le reste du Kenya, les acteurs du tourisme kényan, du “beach boy” les au voyagiste international, se plaignent d’un secteur touristique en berne dans un pays réputé pour ses safaris et son sable fin.
Les violences post-électorales meurtrières de fin 2007-début 2008 avaient fait fuir les touristes, leur nombre chutant de 30% en 2008 sur un an et il avait fallu trois ans au Kenya pour retrouver le nombre de touristes de 2007. Mais en 2012, leur nombre a à nouveau baissé de plus de 6% sur un an.
Les chiffres officiels ne sont pas encore disponibles, mais 2013 semble avoir été très mauvaise: les craintes d’un renouvellement des violences lors du scrutin de mars 2013 ont pesé sur les six premiers mois, avant que l’attaque islamiste du Westgate à Nairobi en septembre ne ruine définitivement le reste de l’année.
“Il n’y a pas beaucoup de touristes (…) Je n’ai rien gagné depuis deux semaines”, se lamente Kazungu, 27 ans, “beach boy” qui, sur la plage de Nyali près de Mombasa, la principale ville de la côte kényane, racole les touristes pour leur vendre excursion en bateau ou bibelots.
La plage est pleine de Kényans mais on y croise très peu de touristes occidentaux. Au Nyali International Beach Hotel, établissement luxueux en bord de mer d’environ 170 chambres, quelques clients sont accoudés au bar, un couple bronze au bord de la piscine et moins d’une demi-douzaine d’autres paressent dans le jardin. Les gérants de l’hôtel refusent néanmoins de donner des chiffres.
à Mombasa, au Kenya, le 22 février 2014 (Photo : Ivan Lieman) |
“Ca fait trois ans que l’activité est très basse”, explique non loin Tsuma Ndune, 38 ans, instructeur de kite-surf devant le petit club qu’il a ouvert sur la plage en 2008. Il estime son activité actuelle à 30% à peine de celle de ses meilleurs jours et compte désormais sur les touristes kényans pour faire tourner sa boutique.
A Mombasa, la coopérative artisanale Akamba a vu son chiffre d’affaires divisé par deux depuis 2007, selon son directeur, Jackson Mwaniki: “depuis 2007 et les violences post-électorales qui ont fait fuir la plupart des touristes, l’activité n’a plus été la même”.
Car ces violences ont coïncidé avec l’éclatement de la crise économique mondiale. Et si les touristes sont progressivement revenus, ils ne dépensent plus comme avant. “La plupart des touristes (…) disent qu’ils sont touchés par la crise économique mondiale, que l’économie va mal et que leur pouvoir d’achat a baissé”, poursuit M. Mwaniki.
– Concurrence régionale –
Selon Tomas Garcia Hertz, directeur général de la destination Kenya chez Vintage Africa, important voyagiste, “il est évident que la situation économique en général chez nos clients étrangers n’est pas au mieux (…) beaucoup de gens sont inquiets pour leur emploi” et n’ont donc pas “l’esprit à dépenser beaucoup pour des vacances”.
La côte kényane, qui offre essentiellement des séjours en hôtels-clubs en bord de mer, subit de plein fouet la concurrence des destinations asiatiques et caribéennes, bien meilleur marché.
“Il reste un marché pour les clients qui recherchent à la fois la faune sauvage et la plage”, explique Tomas Garcia Hertz, malheureusement le Kenya souffre de coûts élevés, de réglementations inadaptées qui nuisent à l’activité, parallèlement à un manque d’encadrement et de professionnalisation du secteur.
Longtemps, le Kenya, en avance sur ses voisins, a été la destination des amoureux de nature sauvage et des plages en Afrique de l’Est. Mais la Tanzanie offre des prestations similaires – avec le célèbre parc du Serengeti et les plages paradisiaques de Zanzibar – pour des prix largement inférieurs, soulignent les opérateurs touristiques.
Le droit d’entrée dans le Serengeti est de 60$ par jour et par personne et de 80$ dans son jumeau kényan du Masaï Mara, juste de l’autre côté de la frontière, voire de 90$ dans d’autres parcs kényans. “Pour une famille de quatre personnes voulant séjourner 4-5 jours dans le parc, c’est une différence de prix énorme”, souligne M. Hertz.
Dans le contexte économique actuel, “le prix devient un critère majeur”, poursuit-il, expliquant que de récente hausses de taxes, dont la TVA, au Kenya n’ont rien arrangé.
Il critique l’apparent désintérêt du gouvernement kényan pour les difficultés du secteur touristique, face à la concurrence des pays voisins, alors que l’Ouganda et l’Ethiopie s’invitent désormais aussi de façon dynamique sur le marché touristique.
En 2011 pourtant (derniers chiffres officiels disponibles), le tourisme contribuait de manière directe ou indirecte à près de 14% du PIB kényan et fournissait plus de 700.000 emplois directs ou indirects, soit 12% des emplois du pays.
Les autorités kényanes “ne nous aident pas et au contraire rendent les choses plus difficiles”, souligne Tomas Garcia Hertz. “C’est le Kenya qui rend la tâche de vendre le Kenya difficile” aux voyagistes.