Commerce et Ukraine au menu de la 1ère visite de Xi Jinping en Allemagne

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à Berlin le 27 mars 2014 (Photo : Johannes Eisele)

[28/03/2014 09:06:21] Berlin (AFP) Le président chinois Xi Jinping entame vendredi sa première visite en Allemagne pour soigner la relation commerciale privilégiée entre les deux pays lors d’une étape de sa tournée européenne qui devrait être dominée par la crise ukrainienne.

La question des droits de l’Homme devrait être abordée seulement à la marge, alors que doit s’ouvrir une semaine plus tard à Berlin la plus grande exposition jamais consacrée à l’artiste et dissident chinois Ai Weiwei.

Car, dans les relations de ces deux champions mondiaux de l’exportation, “c’est l’économie qui joue le rôle central”, constate Eberhard Sandschneider, expert de l’institut allemand de politique étrangère, DGAP.

Les échanges commerciaux entre le pays le plus peuplé du monde et la première économie européenne ont atteint l’an passé 161,5 milliards de dollars. La Chine est le premier partenaire commercial de l’Allemagne en Asie, et l’Allemagne le premier de la Chine en Europe.

Cependant, après la pluie de contrats annoncée cette semaine en France, pour 18 milliards d’euros, lors d’une fastueuse visite d’Etat, l’étape allemande s’annonce plus modeste.

Pour l’instant, rien n’a filtré sur d’éventuelles annonces commerciales. “Concrètement, je n’attends pas grand chose”, assure Gudrun Wacker, spécialiste de la Chine pour l’institut allemand SWP.

Une plate-forme d’échanges pour la devise chinoise (le yuan) pourrait être créée à Francfort, ce qui serait une première en zone euro, affirmait jeudi l’édition en ligne du quotidien allemand Handelsblatt. Selon le journal, un accord préliminaire entre les banques centrales allemande et chinoise, pourrait être signé vendredi.

La chancelière allemande Angela Merkel devrait par ailleurs s’entretenir avec le président chinois de la crise ukrainienne, un dossier sur lequel elle est en pointe, pour le “pousser à inciter la Russie à adopter une position plus modérée”, estime Sebastian Heilmann, directeur de l’institut MERICS et spécialiste de la Chine.

Pékin, qui affiche une indulgente neutralité à l’égard de Moscou sur ce dossier, s’est abstenu samedi dernier lors du vote au Conseil de sécurité de l’ONU condamnant le référendum en Crimée, approuvé par tous les autres membres mais bloqué par un véto russe.

En rattachant la Crimée à la Russie, Moscou “a fait un pas qui ne peut pas plaire à Pékin”, estime M. Heilmann. “Comment réagirait la Chine si le Tibet ou le Xinjiang, région musulmane du nord-ouest rétive à la tutelle de Pékin, organisaient un référendum appelant à l’indépendance”, interroge-t-il.

Selon lui, la Chine est sous pression pour manifester une position plus ferme à l’égard de Moscou sur l’Ukraine, un pays où elle possède des intérêts économiques de longue date, comme des investissements dans l’agriculture. “Pour la Chine, l’Ukraine devait servir de porte vers l’Europe de l’est”, explique M. Heilmann.

D’après Gudrun Wacker, de l’institut SWP, Mme Merkel, tout comme le président allemand Joachim Gauck devraient évoquer la question des droits de l’Homme, lors de leurs entretiens avec Xi Jinping, à une semaine de l’ouverture à Berlin de la plus grande exposition jamais consacrée à l’artiste et dissident Ai Weiwei.

Dans un entretien récent à un journal allemand, ce dernier, détenu pendant presque trois mois par les autorités chinoises en 2011 et dont le passeport a été confisqué depuis pour l’empêcher de quitter le pays, avait expliqué qu’il aimerait rencontrer le président chinois.

Des personnalités du monde de l’art en Allemagne ont d’ores et déjà appelé Pékin à le laisser venir pour l’ouverture de son exposition à Berlin, le 3 avril, trois ans jour pour jour après sa spectaculaire arrestation.

En amont de la visite de Xi Jinping en Allemagne, avait été évoquée une éventuelle visite au Mémorial de l’Holocauste à Berlin. “L’affaire est enterrée”, a estimé M. Sandschneider. Pékin, qui appelle régulièrement le Japon à faire acte de contrition pour les atrocités commises lors de son invasion pendant la Second Guerre mondiale, voulait par ce geste embarrasser Tokyo, selon différents médias. Une situation que voulait éviter Berlin.

Après l’Allemagne, Xi Jinping visitera les institutions européennes de Bruxelles, c?ur de l’Union européenne, une première pour un président chinois.