Retour en grâce pour la titrisation, pointée du doigt pendant la crise

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écrans, à Paris (Photo : Eric Piermont)

[28/03/2014 13:22:57] Paris (AFP) Vilipendée au moment de la crise, la titrisation commence à opérer un retour en grâce, ses partisans y voyant un outil idéal pour favoriser le financement de l’économie réelle à condition de mieux l’encadrer.

“Que cette idée surgisse aujourd’hui n’est pas une surprise. Elle découle du constat qu’il devient de plus en plus difficile pour les banques d’octroyer des financements, en raison des contraintes auxquelles elles sont désormais soumises”, explique à l’AFP Jérôme Legras, directeur de la recherche chez Axiom AI, société de gestion indépendante.

Technique financière complexe, la titrisation consiste à transformer des créances –des prêts immobiliers par exemple– en titres vendus à des investisseurs sur les marchés, les fonds récupérés peuvent être de nouveau injectés dans le circuit financier pour alimenter la croissance économique.

Elle est accusée d’avoir été au coeur de la crise des crédits immobiliers à risque, dits “subprime”, à partir de l’été 2007, avec la mise sur le marché de créances douteuses.

En retrait depuis plusieurs années, les opérations de titrisation voient néanmoins leur blason être redoré, plusieurs figures du monde économique, mais aussi de la sphère politique, plaidant pour leur retour.

Jeudi, le commissaire européen aux Services financiers Michel Barnier, qui s’est fait le chantre d’une régulation plus sévère à Bruxelles, a ainsi expliqué qu’il fallait “raviv(er) les marchés de la titrisation” afin de faciliter le financement des petites et moyennes entreprises.

Dans l’air du temps, cette proposition fait suite à d’autres interventions en faveur de cette technique.

Début mars, le président de la Banque centrale européenne (BCE) Mario Draghi y voyait lui aussi un moyen de relancer le crédit en zone euro et soulignait que son institution travaillait sur ce sujet.

En France, Bpifrance a par exemple déjà annoncé plancher sur un fonds commun de titrisation à destination des PME. Dans ce cadre, les prêts consentis par la banque publique d’investissement à ces entreprise seraient logés dans ce fonds avant d’être cédés sous forme de titres aux assureurs, qui se voient offrir des rendements intéressants.

Mais la question du retour de la titrisation ne se cantonne pas aux entreprises et le segment des crédits immobiliers pourrait lui aussi en profiter prochainement.

– Responsabiliser –

Un tel projet, que le gouverneur de la Banque de France, Christian Noyer, avait ainsi appelé de ses voeux en janvier, a été confirmé lundi par la directrice générale de la Fédération bancaire française, Marie-Anne Barbat-Layani, lors d’un entretien au quotidien Les Echos.

En la matière, une telle avancée profiterait pleinement aux banques puisque ces opérations leur donneraient la possibilité d’alléger leur bilan de financements très longs, comme les dernières normes réglementaires les y incitent.

Pas question cependant de revenir à la titrisation d’avant-crise, promettent ses promoteurs, qui assurent que cette fois-ci des garde-fous seront dressés pour éviter de nouveaux excès.

“Dès que l’on tire les leçons, qu’on a les bons outils, je pense qu’on peut encourager de manière encadrée cette titrisation”, a préconisé Michel Barnier, estimant qu'”une bonne titrisation sur des produits standardisés (…) peut être utile pour les PME”.

Parmi les pistes évoquées par Christian Noyer figure la titrisation déconsolidante pour les prêts immobiliers. Derrière ce terme se cache l’obligation pour les banques de garder une partie du risque lié à la créance qu’elles mettent sur le marché. Une manière de les responsabiliser et d’éviter la résurgence des erreurs du passé.

Reste, pour les acheteurs d’un bien immobilier, le risque de voir remonter les taux d’intérêt. Une crainte mise en avant par des courtiers, qui estiment qu’une telle hausse est inéluctable afin de rendre de tels titres attractifs aux yeux des investisseurs.