Le FMI inquiet du poids des géants bancaires en Europe

a74a0cb009f68ac8477fe609dfe82e0408cd9f9e.jpg
à Paris le 19 mars 2014 (Photo : Kenzo Tribouillard)

[31/03/2014 17:26:38] Washington (AFP) Le problème des banques “trop grandes pour faire faillite” est loin d’être résolu, spécialement en Europe où l’aide implicite reçue par les géants du secteur se chiffrerait à 300 milliards de dollars, a averti lundi le FMI.

Ces établissements “too big to fail” continuent de bénéficier de la protection implicite des pouvoirs publics qui ne peuvent se permettre de les voir faire faillite, au risque de “menacer la stabilité de l’ensemble du système financier”, explique le Fonds monétaire international dans un rapport.

Au plus fort de la crise financière de 2008-2009, les Etats-Unis avaient ainsi massivement renfloué plusieurs géants bancaires au bord de la banqueroute (Bank Of America, Citigroup…) afin d’éviter une implosion du système.

De l’autre côté de l’Atlantique, la suisse UBS avait été recapitalisée par l’Etat tandis que le Royaume-uni nationalisait partiellement plusieurs géants du secteur dont Barclays ou Royal Bank of Scotland.

8f3698799bfdff8c5b8cc10c24d97f76e8326943.jpg
à San Francisco (Photo : Justin Sullivan)

“Depuis la crise financière mondiale, des réformes ont réduit –mais pas éliminé– les garanties implicites des gouvernements dont bénéficient les banques +too big to fail+”, écrit le FMI dans les chapitres analytiques de son rapport de stabilité financière, publiés en prélude à son assemblée de printemps.

La banque centrale américaine (Fed), tout comme le Conseil de stabilité financière, ont récemment relayé la même inquiétude.

– Progrès insuffisants –

“Des progrès sont en cours mais nos estimations des subventions semblent indiquer que le problème des +too big to fail+ est encore bien réel”, souligne Gaston Gelos, un des auteurs du rapport du Fonds.

Grâce à ce statut, ces mastodontes continuent à attirer plus facilement les investisseurs que des petits établissements et peuvent ainsi emprunter “à moindre coût” et moins rémunérer leurs déposants, énumère le Fonds, qui pointe des risques pour la stabilité financière.

ab8d74d0df5f5b8ef74a3deb93e392618ae508ea.jpg
à Londres (Photo : Carl Court)

“Les attentes d’un soutien des autorités réduisent la propension des créanciers à surveiller le comportement des grandes banques, encourageant du coup des prises de risques et de l’endettement excessif”, affirme également le rapport.

Cumulées, ces aides implicites atteignaient près de 600 milliards de dollars en 2012 à travers le globe, selon la fourchette haute des estimations du Fonds, qui relève de fortes divergences selon les régions.

“Une fois achevée la crise financière mondiale, les subventions ont décliné au Japon et aux Etats-Unis mais ont augmenté en Europe”, indique le rapport.

Elles s’échelonnent ainsi entre 90 et 300 milliards de dollars pour la seule zone euro contre 15 à 70 milliards aux Etats-Unis, pourtant épicentre de la crise financière de 2008.

Hors union monétaire, deux autres pays européens font également pâle figure, le Royaume-uni (entre 20 et 110 milliards de dollars) et la Suisse (entre 5 et 20 milliards).

Selon le FMI, ces divergences de part et d’autre de l’Atlantique pourraient s’expliquer en partie par le rythme plus rapide de l’assainissement des bilans bancaires aux Etats-Unis et par la “perception” que les autorités américaines se sont davantage attaquées à ce problème.

Depuis la crise, la banque centrale américaine mène ainsi des tests de résistance annuels sur les géants du secteur afin d’évaluer leur solidité en cas de nouveau choc financier.

De son côté, l’UE vient tout juste de boucler son union bancaire et mène actuellement sa première revue d’actifs sur 130 établissements financiers, qui doit s’achever à l’automne.

Le mécanisme de résolution unique européen, visant à accompagner une faillite bancaire en évitant l’utilisation de fonds publics, ne sera, lui, opérationnel qu’en 2016.

Selon le FMI, le poids croissant des “too big to fail” en Europe pourrait également tenir aux “turbulences” sur la dette publique en 2010-2011, qui ont conduit à des plans de recapitalisation bancaire (Irlande, Espagne, Chypre), confortant l’idée d’un soutien implicite des pouvoirs publics.