Le maroquinier Serge Amoruso dans son atelier parisien, le 19 mars 2014 (Photo : Miguel Medina) |
[01/04/2014 09:52:49] Paris (AFP) Avoir un sac à gros logo? C’est tellement années 2000. Aujourd’hui, le luxe se veut plus exclusif, à l’image des créations du maroquinier parisien Serge Amoruso, qui ne réalise que des pièces uniques et sur mesure, pour des clients fortunés, européens, japonais ou chinois.
Dans son atelier-boutique de l’est parisien, qui sera ouvert au public pour les Journées des métiers d’art, de vendredi à dimanche, Serge Amoruso parle de sa “chance inouïe”. Le maroquinier rencontre chaque client avant de réaliser le sac, le portefeuille ou la boîte à bijoux de ses rêves. Ensemble, ils décident de la forme, de la matière, du fil, de la couleur…
Il se rend au moins deux fois par an au Japon, où il vend la moitié de sa production. En décembre, il était à Pékin.
Avec ses deux apprenties, deux jeunes femmes de 22 et 31 ans, Serge Amoruso fabrique une centaine de sacs par an. Le prix? 2.500 euros en moyenne. Mais ce n’est pas la préoccupation de ses clients, en quête surtout de rareté.
“Chaque pièce est une histoire et mes clients recherchent cela”, explique-t-il, avant de raconter quelques rencontres.
“Un client japonais était venu pour me commander un étui pour sa tablette. Finalement, il m’a demandé une valise à roulettes”, relate Serge Amoruso. Il lui a fallu huit mois de développement pour ce trolley, en cuir de buffle, carbone et titane. “Le client a payé très cher, mais il savait que j’allais dépasser ses espérances”.
à Paris le 19 mars 2014 (Photo : Miguel Medina) |
Des clients chinois lui demandent souvent de graver une phrase ou leur chiffre fétiche dans le sac.
Le goût de Serge Amoruso pour le cuir remonte à son enfance. Il se souvient d’avoir, à 12 ans, taillé un parachute dans une jupe en cuir de sa mère. Deux ans plus tard, alors qu’à l’école, il était “ailleurs, pas dans le coup”, il a intégré une formation spécialisée. C’est là qu’il a compris qu’avec le cuir, “cette matière sans limite au toucher extra”, “on peut tout faire”.
A 18 ans, il va directement chez “les meilleurs”, chez Hermès, où il travaille dans l’atelier malle. “J’y ai passé sept ans. J’ai eu accès à des matières fabuleuses. J’ai découvert un univers, un goût, une élégance”.
– Un fermoir en météorite –
Il est parti pour enseigner son savoir et enfin, a ouvert sa boutique “avec trois francs six sous”. Son travail tape dans l’oeil de Japonais. C’est le début du succès.
Dans son atelier, pas de machine. Tout est fait main, dans la précision et dans les plus belles matières. Il montre fièrement un morceau de météorite sur le fermoir d’un sac. Il s’est positionné sur la pièce unique, “une spécialité qui a disparu”. “Même chez Hermès, au bout du deuxième sac Kelly, j’étais fatigué”, raconte-t-il, en allusion au célèbre sac qui s’achète sur liste d’attente.
à Paris, le 19 mars 2014 (Photo : Miguel Medina) |
Serge Amoruso s’est fait connaître par sa maîtrise du galuchat. “On m’avait toujours dit qu’on ne pouvait pas faire tout un sac en galuchat (cuir réalisé à partir de peau de squale ou de raie, ndlr), alors j’ai travaillé pour y arriver et j’ai réussi”.
Mais la technique doit être au service de la beauté. “A la fin, on ne doit plus sentir le geste, mais juste l’émotion qui se dégage de l’objet”.
“Presque toutes les maisons de luxe” lui ont demandé des pièces spéciales. Mais lui tient à avoir sa signature dans chaque sac et il a refusé: “Je ne suis pas un sous-traitant”, lâche-t-il.
Alors que leur croissance s?essouffle, de grandes marques essaient de se positionner sur des produits plus exclusifs et encore plus chers.
“On a fait croire que le luxe, c’était d’avoir un sac à logo. Mais c’était uniquement du marketing, pas de la qualité”, tranche le maroquinier, dont les affaires, confie-t-il en souriant, marchent “de mieux en mieux”.