Laurent Fabius met la main sur le commerce extérieur

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écembre 2013 à Paris (Photo : Thomas Samson)

[02/04/2014 12:58:37] Paris (AFP) Le chef de la diplomatie, Laurent Fabius, 67 ans, reconduit dans ses fonctions dans le gouvernement Valls, voit élargir son portefeuille au Commerce extérieur, une première en France dans un contexte de crise économique toujours très vif.

“Le Commerce extérieur est dans le champ des attributions de Laurent Fabius”, a déclaré à l’AFP un responsable du Quai d’Orsay sous couvert d’anonymat. Peu avant, l’entourage d’Arnaud Montebourg avait assuré que ce domaine relèverait du portefeuille du nouveau ministre de l’Economie.

L’ajout du Commerce extérieur au ministère des Affaires étrangères récompense “la diplomatie économique” chère à M. Fabius, présentée dès son arrivée au Quai d’Orsay en 2012 comme un des piliers de sa stratégie, et qu’il n’a eu de cesse de vanter au cours des deux années écoulées, notamment en Asie et en Amérique latine.

Ses actions pour promouvoir les entreprises françaises à l’étranger, chercher des marchés empiétaient de facto sur les platebandes du ministère de l’Economie, même si l’ancienne ministre déléguée au Commerce extérieur Nicole Bricq a toujours vanté la complémentarité entre les deux administrations.

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à Berlin avec son homologue allemand Frank-Walter Steinmeier (g), le 31 mars 2014 (Photo : John MacDougall)

Certains ont critiqué cette priorité donnée à la “diplomatie économique”. Dans une tribune publiée récemment dans Libération, les Arvernes, un groupe de hauts fonctionnaires, économistes et chercheurs anonymes, déplorait cette volonté d’être “présent sur tous les sujets”.

“Si promouvoir une diplomatie économique constitue en soi un objectif louable, ne correspond-il pas plutôt au rôle du ministère de l?Economie et des Finances?” s’interrogeait cette tribune, estimant que l'”éparpillement” rendait la voix de la France “inaudible” sur les grands sujets.

– Vétéran de la politique –

M. Fabius, dont même ses détracteurs reconnaissent son implication et son côté bourreau de travail, n’a pourtant pas délaissé son domaine traditionnel depuis deux ans, avec des résultats variables.

La France s’est voulue en pointe sur les grandes crises internationales telles la Syrie ou le nucléaire iranien. Mais si Paris a pu imposer sa voix dans les négociations avec l’Iran, la spectaculaire reculade américaine sur des frappes sur le régime de Damas a douché les ardeurs françaises.

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à Paris, le 31 mars 2014 (Photo : Fred Dufour)

En Afrique, le “succès” de l’opération au Mali a davantage été imputé au ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian, et M. Fabius a eu toutes les peines du monde à mobiliser ses pairs européens pour s’engager en Centrafrique.

Homme élégant, austère et maître dans l’art des perfidies ciselées, M. Fabius a cependant lissé son discours depuis sa nomination au Quai d’Orsay par François Hollande, son meilleur ennemi. Si les deux hommes se sont ouvertement détesté pendant des années, ils travaillent en bonne entente et sont sur la même longueur d’ondes, assure-t-on au Quai comme à l’Elysée.

Ancien “plus jeune Premier ministre de la France” (de 1984 à 1986) du président socialiste François Mitterrand, M. Fabius, vétéran de la politique française, a été ministre du Budget en 1981, de l’Industrie et de la Recherche en 1983, de l’Economie et des Finances en 2000…

Cette longévité et ses deux années passées à la tête de la diplomatie française, moins exposé au mécontentement des Français, lui ont permis de se façonner une image de professionnel aguerri au sein de l’ancien gouvernement Ayrault, marqué par les couacs de “jeunes” ministres inexpérimentés.

Résultat: il est actuellement le ministre le plus populaire parmi les Français.

Né le 20 août 1946 à Paris, M. Fabius est normalien, agrégé de lettres et énarque. Issu d’une famille d’antiquaires, amateur d’art, il est l’auteur en 2011 d’un ouvrage “Le Cabinet des douze”, dans lequel il commente des “tableaux qui contribuent, à ses yeux, à “faire la France” (Renoir et les scènes de loisirs, Picasso et la guerre…)”.