Repères :
– Déficit financier qui pourrait dépasser 100 MDT par an si aucune action n’est entreprise.
– Nécessité de compression des coûts de 15% sur trois ans.
– Depuis la révolution, les charges augmentent beaucoup plus que les recettes.
– Carburant, taxes aéroportuaires et masse salariale représentent 70% des charges.
– Depuis mars 2012, l’entreprise a cessé tout recrutement.
Origines du problème : la situation financière à laquelle est arrivée Tunisair s’explique par des phénomènes exogènes qui sont extérieurs à l’entreprise et par des problèmes endogènes qui ont connu une aggravation après la révolution.
Avant 2011 :
L’acquisition de biens non productifs a été le point de départ de la crise financière de la compagnie avec la commande, en 2009, d’un appareil de type Airbus A.340 pour le compte de la présidence qui a été aménagé en avion VIP pour un coût de 185 millions de dollars financés à 100% par Tunisair à travers 7 crédits bancaires contractés auprès de banques tunisiennes.
Cet investissement démesuré a engendré également un autre problème pour la compagnie dans la mesure où il a provoqué le retard du plan de flotte initial lequel avait été signé en 2008 avec livraison des avions long-courriers à partir de 2012; ces livraisons ont été reportées à 2015. Ceci a obligé Tunisair à utiliser des avions âgés nécessitant des frais d’entretien importants, causant des retards dans l’exploitation et entraînant une dégradation dans la qualité de ses services.
Par ailleurs, actuellement, l’A340 se trouve à Bordeaux en France car en Tunisie, Tunisair n’a pas la possibilité de le garder étant donné que ce type d’appareil ne peut y être entretenu. De plus, la compagnie ne compte pas dans ses rangs des équipages qualifiés pour le piloter. Toutefois et dans l’attente d’un repreneur, l’avion doit bénéficier de maintenance continue, outre la nécessité de lui faire subir un vol d’essai tous les 3 mois. Et même si l’avion ne vole pas, il doit faire l’objet d’entretien calendaire obligatoire. Tout ceci engendre des coûts supplémentaires qui pèsent lourd dans les comptes de la compagnie.
Malheureusement, jusqu’à présent, il n’a pas été possible de trouver un acheteur. Depuis une année, 3 opportunités sérieuses se sont présentées et ont été matérialisées par des lettres d’intention de commande qui ont été signées mais aucune d’elle n’a abouti. Le problème réside dans le fait qu’il s’agit d’un avion qui coûte cher et qui a été aménagé selon les goûts de certaines personnes, ce qui réduit les chances de trouver des acheteurs au prix réel de l’appareil.
Après 2011 :
Le 2e problème qui a mis Tunisair en difficultés, ce sont les accords sociaux qui ont été engagés après la révolution. Rappelons qu’en février 2011, un accord a été signé portant sur l’intégration des filiales avec alignement des salaires de tout le personnel sur celui de Tunisair, ce qui a entraîné 30% d’augmentation de la masse salariale de ses filiales, outre l’intégration et la titularisation de tous les contractuels. En tout, cette année là, la compagnie a connu presque 1000 intégrations entre réintégrations des expulsés, recrutements nouveaux et titularisation des contractuels, en plus des promotions internes et des régularisations de situation enclenchée depuis cette date et qui continuent jusqu’à présent.
Eléments de conjoncture :
La conjoncture qui a prévalu après la révolution a provoqué pour la Tunisie une réduction de 1 million de touristes. Tunisair assurait 40% des voyages de et vers la Tunisie dont 80% d’origine européenne.
Dans ce contexte morose, une autorisation a été donnée à une compagnie privée qui n’est pas venue pour desservir des lignes complémentaires à Tunisair mais qui n’a fait que travailler sur son propre réseau, ce qui équivaut à une concurrence non appropriée qui a fait baisser sa recette moyenne. Tunisair tient à rappeler sa mission de compagnie publique dont le rôle social est très important vu que c’est l’un des principaux employeurs du pays et ce en plus de son impact sur son développement économique. A ce titre, Tunisair estime qu’il est de son droit de défendre l’octroi de certains privilèges au vu des services rendus aux pays.
La situation s’est encore aggravée en 2013 à cause du glissement important du dinar (par rapport au dollar américain et à l’euro) et de l’instabilité politique qui a fait régresser l’activité.
En 2012, Tunisair a été l’une des rares entreprises publiques dont l’activité a dépassé celle de 2010. Cette année-là, la compagnie a réalisé un nombre de passagers supérieur à celui de 2010 de 3,3%. En 2014, et jusqu’au 20 mars, la compagnie a enregistré une reprise d’activité en évolution de 12,3% par rapport à la même période de 2013.
Le poids des charges: En disséquant les composantes de charges de Tunisair, la plus importante n’est plus celle du carburant mais ce sont désormais les taxes aéroportuaires qui représentent 30% de ces charges, celles-ci ayant augmenté entre 2009 et 2013 de 35%. Ceci est dû au fait que ces taxes sont indexées à l’euro, y compris celles payables en Tunisie, ce qui constitue une aberration.
Tunisair est par ailleurs pénalisée doublement par l’augmentation du prix du baril de pétrole et par la dévaluation du dinar. Si le baril augmente de 1 dollar, il entraîne une augmentation de charges de 3,5 MDT par an pour la compagnie. Et si le dinar se déprécie de 10% par rapport au dollar, Tunisair perd environ 20 MDT par an..