Dans une interview accordée à l’agence TAP, Jacob Kolster, directeur régional de la Banque africaine du développement (BAD), chargé de la région Afrique du Nord, estime qu’il “est temps de libéraliser l’économie tunisienne, de commencer à réviser les règles de jeu, en promulguant le code de l’investissement, adopter la loi sur le partenariat public-privé et assurer la concrétisation du développement régional”.
M. Kolster affirme que plusieurs chantiers doivent être lancés, le plus tôt possible en Tunisie, en vue d’assurer une véritable relance économique.
Il est également revenu sur les principales réformes qui doivent être mises en place en Tunisie, les difficultés qu’a eues à affronter la BAD dans le pays et les grandes lignes de sa stratégie intérimaire pour la période 2014-2015.
Au rang de ces réformes, M. Kolster a souligné que “la Tunisie a bien démarré cette année avec l’adoption de la nouvelle Constitution et le rétablissement de la situation sécuritaire”, mais ajoute que désormais, il est indispensable de “focaliser plus que jamais sur l’aspect économique”, et ce même si “… le gouvernement de transition a pour l’objectif de mener le pays aux élections, avant la fin de l’année, mais il est, aussi, invité à s’intéresser au changement de la politique économique, afin que celle-ci soit alignée aux objectifs de la révolution”.
Ensuite, Il est, ainsi, indispensable de mettre en place des mesures adéquates, en matière de finance publique ,afin que le budget de l’Etat puisse évoluer, dans les 2 ou 3 ans à venir, d’une manière soutenable et plus équilibrée.
En outre, Jacob Kolster pense qu’il faut “réfléchir aux moyens de mettre la Tunisie sur la voie d’une nouvelle transformation économique qui assure une optimisation opportune des atouts du pays, telles que les ressources naturelles, son positionnement géographique présentant l’avantage de la proximité du marché international et la présence d’une main d’œuvre bien éduquée. Nous avons, cependant, besoin d’améliorer fortement le niveau d’exécution surtout de nos dons. Nous avons plus que 25 dons en place actuellement, mais la moitié ne s’exécute pas du tout. Il faut passer à une revue très claire des projets”.
A la question “quelles sont les difficultés affrontées par la BAD en Tunisie?”, avant d’y répondre, Jacob Kolster a rappelé que “la BAD a commencé à travailler en Tunisie depuis 1968. Elle lui a accordé pendant cette période 130 prêts d’une valeur globale de 15 milliards de dollars. Le portefeuille actif de la Banque en Tunisie, s’élève à 2,1 milliards de dollars”.
Selon lui, “le principal problème affronté en Tunisie se présente surtout au niveau de l’administration qui fonctionne moins bien, qu’auparavant. Avant la révolution l’administration fonctionnait bien, grâce à des directives très claires venues d’en haut”. Et de préciser: “ce que nous constatons, aujourd’hui, c’est qu’il y a une certaine lenteur qui s’est installée, à cause d’un système en place déjà assez lourd, d’un manque de prise de décisions au niveau de l’administration et d’une attitude d’appréhension vis- à-vis de la prise de décision chez un nombre de responsables”.
De ce fait, “cette lenteur a engendré un blocage au niveau de l’exécution de la moitié des dons actifs de la BAD en Tunisie, dont le nombre s’élève à 25. D’où la tendance vers le report et la suspension de certains projets, et ce, en coordination avec les autorités tunisiennes.
Concernant la stratégie de la BAD pour la Tunisie pour les années 2014 et 2015, il a répondu que le Conseil d’administration du Groupe de la BAD a approuvé, en mars dernier, le Document de stratégie pays intérimaire de la Tunisie, pour la période 2014-2015, qui présente le plan d’activités stratégiques de la Banque dans notre pays, pour les deux années à venir. Il misera sur deux axes, à savoir la gouvernance et l’infrastructure, deux domaines indispensables pour garantir le développement continu du pays.
Quant à la gouvernance, “elle concerne la transparence et la diffusion des informations sur le budget et les politiques publiques, ainsi que sur les mécanismes mobilisés pour développer le secteur privé productif et non productif (la société civile)”.
L’institution africaine interviendra également dans les domaines de l’infrastructure agricole, des transports (ports, routes…), mais aussi dans un développement inclusif garantissant une meilleure intégration des régions défavorisées.
In fine, selon Jacob Kolster, “la BAD considère que la Tunisie représente le changement politique le plus réussi de la région. Maintenant, il faut consolider cette transition politique, à travers une impulsion de l’activité économique.