La réglementation des marchés publics est très ancienne puisqu’elle a été promulguée, pour la premier fois en Tunisie, le 14 mai 1975 par la Loi N°73-33; puis elle a été amendée ou complétée plusieurs fois (loi N°75-35 du 14 mai 1975, loi organique N°89-11 du 14 février 1989, décret N°99-825 du 12 avril 1999, décret N°2002-3158 du 17 décembre 2002); plus récemment par le décret N°2008-2471 du 5 juillet 2008 modifiant et complétant le décret N°2002-3158, et enfin la réglementation de mars 2014.
Ceci pour la forme. Mais dans l’analyse des faits, rien n’a changé, car cette réglementation reste dominée par la médiocrité, et ce d’autant plus qu’elle respecte 3 dogmes. Premièrement, celui de “l’offre la moins-disante“, donc le moins cher et le moins performant, entendre par-là le médiocre.
Ce constat est surtout valable pour les prestations intellectuelles, comme les études, l’ingeneering, les logiciels et le secteur des TIC, où le livrable ne peut jamais être quantifié au moment de la remise d’une offre, contrairement à un bien d’équipement (voiture, bâtiment…) où le rendu existe et peut être quantifié de manière simple en surface ou en m3.
Le deuxième dogme a trait à l’absence de pilotage, puisqu’il place l’Administration ou l’acheteur public comme juge et partie, car c’est lui qui exprime les besoins, c’est lui qui détermine la conformité, c’est lui qui valide la réception, in fine, c’est encore lui qui s’érige comme juge pour réceptionner ou non, ou pour émettre des services.
Le fournisseur privé est de ce fait à la merci du bon vouloir de l’acheteur public, de son degré d’acceptation de la prestation ou du travail délivré et de la détermination de sa conformité par rapport aux cahiers des charges.
Ce qui devient une source de conflits et de la raison du plus fort, bien que le recours soit possible auprès du président du Comité de suivi et d’enquête des marchés publics au Premier ministère, qui se range assez souvent du côté de l’acheteur public, surtout en matière de pénalités de retard ou des problèmes de payements.
Quant au troisième dogme, il concerne l’absence de transparence: aucun outil informatique ou journal public des marchés publics n’existe en Tunisie. On continue à entretenir le secret sur les marchés attribués, les montants, les titulaires, le nombre des soumissionnaires, les motifs de rejet et les offres financières présentées. Seule l’Administration dispose, en interne, de ces informations alors que dans d’autres pays elles sont publiées pour apporter plus de transparence.
Le moins-disant, la lenteur des procédures, leur complexité et l’absence de suivi pour non-exécution ou le retard… continuent de plomber la procédure des marchés publics en Tunisie.
Ce qui nous fait dire que, révolution ou pas, la médiocrité semble avoir la peau dure en Tunisie…
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