Zalando dans la tempête après un reportage dénonçant ses pratiques sociales

592dd07fc71548f99107d413ddc5f2fb98b5f01a.jpg
un de ses centres de logistique (Photo : Lionel Bonaventure)

[18/04/2014 07:14:04] Francfort (AFP) Zalando, étoile montante de la vente en ligne en Europe, traverse une tempête en Allemagne après la diffusion lundi soir d’un reportage télévisé dénonçant les conditions de travail dans l’un de ses centres de logistique.

Ce documentaire d’une vingtaine de minutes, retransmis par la chaîne RTL, relate l’infiltration incognito d’une journaliste au sein du principal site de traitement logistique de la société allemande, à Erfurt (centre), où 2.000 salariés empaquettent et envoient quotidiennement les milliers de produits commandés d’un clic par les amateurs du shopping sur internet.

Employée trois mois durant comme magasinière, celle-ci y décrit des journées harassantes, durant lesquelles elle parcourt jusqu’à 27 kilomètres à pied en huit heures pour récupérer un à un les articles dans les immenses étalages du site, les temps de repos réduits au minimum, les fouilles du personnel en fin du service ou encore l’intervention quasi-quotidienne d’ambulances pour des salariés au bout du rouleau.

“Nous sommes perpétuellement soumis à des contrôles et à une énorme pression de rendement”, affirme la journaliste, qui dénonce des atteintes au droit du travail, ajoutant que le fait même de s’assoir est “mal vu” par les chefs d’équipes.

Zalando, jeune pousse fondée en 2008 qui a crû à toute vitesse ces dernières années, vend chaussures, vêtements et meubles par endroits dans presque toute l’Europe de l’Ouest, les pays scandinaves et s’est lancée à la conquête de l’Est avec son nouveau site polonais.

Misant sur une communication offensive autour de la cliente qui hurle de bonheur en recevant son colis, l’entreprise, qui étudie une introduction en bourse, a vu son chiffre d’affaires progresser de 50% à 1,8 milliard d’euros l’an passé, sans toutefois parvenir à dégager de bénéfice pour le moment.

Si les griefs formulés contre ses méthodes ne sont pas nouveaux, ils jettent une nouvelle fois l?opprobre sur un secteur d’activité régulièrement accusé, en Allemagne comme ailleurs, de faire peu de cas de ses salariés et de tenter d’écraser la concurrence par tous les moyens.

L’an dernier, le géant américain de la vente en ligne Amazon s’était retrouvé au coeur d’un scandale après un reportage de la chaîne allemande ARD, qui lui reprochait de recourir à une agence de sécurité employant des néonazis pour surveiller certains de ses salariés en Allemagne. Ces derniers, pour la plupart étrangers, touchaient en outre des salaires inférieurs à ceux qui leur avaient été promis.

– “Sklavando” –

Avec ces nouvelles révélations, le débat est reparti de plus belle dans le pays sur les conditions de travail au sein de Zalando, dont le nom a été détourné en “Sklavando” par ses détracteurs sur internet.

Adepte d’une communication directe avec ses clients sur les réseaux sociaux, la société est montée au créneau dès la diffusion du reportage pour contester ces accusations: “Et ben, il y a beaucoup d’émotion, mais il faut aller au-delà”, a-t-elle réagi sur sa page Facebook.

“De notre point de vue, la présentation des faits ne correspond pas du tout à la culture au sein de l’entreprise et à l’état d’esprit des salariés”, a-t-elle encore affirmé sur son site internet le lendemain, promettant toutefois d’étudier “les points sur lesquels ces critiques sont justifiées et s’il s’agit d’erreurs systématiques ou d’erreurs individuelles”.

Zalando, qui a entamé une procédure en justice contre la journaliste pour rupture du secret professionnel, affirme aussi que dans une enquête interne, réalisée en partenariat avec un institut de sondages indépendant, 88% de ses salariés disent leur plaisir à travailler.

Mais pour Stefan Najda, porte-parole du syndicat Verdi interrogé par l’AFP, “les salariés ont peur, ils sont souvent employés en contrat à durée déterminée, il n’y a aucun comité d’entreprise et ceux qui en parlent sont licenciés”.

“Nous n’appelons pas du tout au boycott (…) mais je conseille aux clients de ne pas avoir toujours pour seul critère le prix”, ajoute-t-il.