Des craintes se font jour sur les chances de la Tunisie de garder la Direction générale de l’ASBU. L’épisode de l’ALECSO est encore présent à l’esprit de beaucoup.
La question commence à préoccuper le PMT (paysage Médiatique Tunisien) et bien au-delà. En effet, beaucoup commencent à s’interroger sur les chances d’un Tunisien d’occuper, en cette fin d’année, et à l’occasion de la tenue de l’Assemblée générale de l’ASBU (Union des radiodiffuseurs d’Etat arabes), à Koweït, le poste de Directeur général de cette institution panarabe, dont le siège officiel est à Tunis. Et dont la direction est assurée, à la faveur d’un accord –jusque-là tacite- entre les pays membres de cette organisation de la Ligue des Etats arabes, depuis plusieurs décennies, par un Tunisien.
Pour l’heure, et malgré les bruits qui se font ici et là, la Tunisie n’a pas officiellement présenté de candidats. Alors que d’autres pays l’ont fait. On parle du Soudan, de la Jordanie et du Koweït, qui, faut-il le rappeler, va accueillir l’Assemblée générale de l’Union. Il est à faire observer, à ce niveau, que seuls les radiodiffuseurs membres peuvent présenter des candidats et qu’aucune candidature individuelle ne peut être prise en compte.
Douze pays arabes ont préféré pour le Koweïtien Abdullah Muhareb
Cette absence de candidature tunisienne inquiète certains qui assurent que les pays arabes ayant présenté des candidats ont déjà entamé un travail de lobbying qui pourrait encore une fois ravir le poste de Directeur général de l’ASBU à la Tunisie. Comme cela a été le cas, en décembre 2012, pour l’ALECSO (Organisation arabe pour l’éducation, la culture et les sciences), ou en décembre 2013, lorsque la Tunisie n’a pas réussi à être élue au poste de secrétaire général adjoint aux affaires culturelles de l’OIC (Organisation de la Conférence Islamique).
De ces deux derniers épisodes, celui de l’ALECSO est sans doute le plus symptomatique d’un certain «discrédit» tunisien sur la scène arabe. En effet, cette autre organisation panarabe, dont le siège est également à Tunis, a semblé jusqu’à décembre 2012, bénéficier du même accord concernant sa Direction générale. Douze pays arabes sur les vingt-un présents au vote ont effet préféré au candidat tunisien, l’ancien ministre de l’Education de la Troïka, Abdellatif Abid, le candidat koweïtien Abdullah Muhareb.
L’image de la diplomatie tunisienne avait alors, comme pour l’épisode de l’OCI, pris un sacré coup. Certains ont fait savoir, à l’occasion, que le staff du ministre des Affaires étrangères d’alors, le nahdaoui Rafik Abdesslam, n’avait pas réussi à mener convenablement son travail de lobbying. Ils ont mis cet échec sur un manque d’expérience en la matière et un manque tout aussi évident de savoir-faire pour mobiliser notamment des réseaux bien utiles à toute opération de ce genre.
Sacrifiés sur l’autel de la nécessité de donner du sang nouveau à l’appareil de l’Etat
D’autant plus que ces mêmes sources affirment que la diplomatie tunisienne a beaucoup perdu de ces cadres compétents avec l’avènement de la révolution du 14 janvier 2011. Ecartés pour une raison ou une autre, des diplomates compétents, souvent possédant leurs entrées dans les arcanes du monde de la diplomatie, se sont retrouvés hors circuit sacrifiés sur l’autel de la nécessité de donner du sang nouveau à l’appareil de l’Etat.
Mais, il n’y a pas que ça. Des voix jurent que, contrairement à ce qui est souvent colporté au sujet de l’image de notre pays, premier pays du printemps arabe, la Tunisie n’a pas toujours bonne presse parmi certains dirigeants arabes, notamment dans la région du Golfe. Et le succès d’Ennahdha, aux élections d’octobre 2011, n’a fait que compliquer la situation.
Beaucoup craignent, peut-être, de se frotter durablement avec un pays dont les responsables ont des revendications quasiment révolutionnaires souhaitant en finir avec un certain ordre établi.
L’accueil réservé par certaines monarchies du Golfe au retour de l’armée aux affaires en Egypte et la destitution du Frère musulman, Mohamed Morsi, en dit long sur cette propension à en découdre avec cet ordre nouveau synonyme d’instabilité dans la région MENA (Moyen-Orient et Maghreb).
Une réalité qui prend une dimension particulière depuis que les choses semblent bien changer dans le monde arabe, caractérisées par les évolutions en Egypte et en Syrie, où le Printemps arabe est contrarié par une volonté manifeste de siffler la fin d’une récréation arabe qui n’a que trop duré.
Evidement, la candidature tunisienne ne pourrait qu’être facilitée si notre pays réussissait à présenter à la prochaine Assemblée générale de l’ASBU, en décembre 2014, à Koweït-City, un candidat d’un certain gabarit. Un personnage connu et disposant d’une carrière professionnelle qui fasse référence. Un personnage reconnu aussi par ses pairs pour son professionnalisme et qui a un certain charisme. A commencer dans son pays.
Evidement, la candidature tunisienne ne pourrait, par ailleurs, qu’être facilitée si les dirigeants du pays entretenaient de bons rapports avec tous les pays votants. Or, de ce côté des choses, cela n’a pas toujours été –force est de le constater- le cas. En témoignent certaines déclarations jugées indélicates. Et qui ont amené, entre autres, deux pays arabes à rappeler leur ambassadeur dans notre pays!