éo à Tokyo avec un stand Nintendo le 17 avril 2014 (Photo : Yoshikazu Tsuno) |
[20/04/2014 06:30:54] Tokyo (AFP) Il y a 25 ans, le 21 avril 1989, sortait dans le commerce la première console de jeu vidéo de poche à cartouche interchangeable, la Game Boy du japonais Nintendo, une merveille pour les gamins qui ne connaissaient pas encore le smartphone.
Lorsqu’en ce printemps 1989, en pleine période délirante de bulle financière et immobilière, la Game Boy fut lancée au Japon, les jeunes Nippons étaient déjà des férus de jeux sur TV grâce à Nintendo et à sa console de salon “Famicom” arrivée dans les foyers en 1983.
A Tiananmen, les étudiants protestaient, à Berlin le mur tombait, à Tokyo on s’amusait.
Pouvoir trimbaler leur nouvel amusement high-tech favori était le rêve des mômes d’alors. La firme de Kyoto fut la première à le réaliser, tout comme Sony fut le premier à mettre un lecteur de musique dans la poche des adultes dix ans auparavant.
éant de Super Mario dans une boutique de jeux vidéos à Tokyo le 17 avril 2014 (Photo : Yoshikazu Tsuno) |
La Game Boy, vendue 8.000 yens à l’époque (56 euros actuels), c’est “35 heures de jeu dans la poche avec quatre piles bâtons”, clamait la publicité.
“Les enfants étaient tellement contents de pouvoir jouer dans le train entre la sortie de l’école et les obligatoires cours privés du soir”, se souviennent des parents, du moins ceux qui étaient d’accord.
“Moi, je n’y ai pas eu droit, mon père ne voulait pas. A la place il m’offrait des mangas et je l’en remercie presque”, sourit Taku Nishimura, aujourd’hui dessinateur de… mangas.
Il avait quand même pu toucher aux petits jeux électroniques très simples, appelés Game & Watch, que proposait auparavant Nintendo. Mais il était impossible d’en changer le contenu.
La Game Boy changeait tout: “c’était révolutionnaire: on pouvait jouer partout, un vrai bonheur quand on voyageait avec les parents”, se souvient Jesus Mera, un Espagnol de passage dans une boutiques de jeux de Tokyo.
“Si Nintendo a devancé les autres sur ce terrain, c’est que la firme appartenait, et depuis des décennies, à l’univers du jeu de société. Elle connaissait le jeune public, ce qui n’était par exemple pas le cas des groupes d’électronique comme Sony qui, eux, avaient l’habitude de s’adresser aux adultes. Sony avait pensé à la musique en balade, mais pas au jeu nomade”, rappelle le patron de la société Enterbrain, Hirokazu Hamamura.
Avec la Game Boy, dont le nom est à jamais associé au jeu Tetris (puzzle casse-tête indémodable) ou aux aventures interminables de Pikachu et de sa clique de Pocket Monsters, sont nés et ont prospéré les studios de développement.
“A l’origine, les jeux vidéo sur TV étaient essentiellement des formes de combat ou de match entre deux joueurs ou contre la machine, mais avec la Game Boy et Tetris, le type de mission a commencé à évoluer”, et plus encore ensuite avec les aventures de personnages comme la saga des Pokemon, détaille M. Hamamura.
éo à Tokyo le 17 avril 2014 (Photo : Yoshikazu Tsuno) |
La famille de consoles Game Boy (qui comprend aussi les versions “pocket”, “lite” et “color”) s’est écoulée à quelque 118 millions d’unités. A ce record s’ajoutent quelque 82 millions exemplaires de la génération suivante, la série “Game Boy Advance”.
Quant au nombre de cartouches vendues, il se chiffre en milliards.
“La Game Boy a posé les fondements de ce qu?est le jeu portable aujourd?hui, que ça soit sur consoles ou sur smartphones parce que le concept est le même”, résume Serkan Toto, consultant dans l?industrie du jeu vidéo.
– Les temps changent –
Célèbre également pour avoir créé la figure indéboulonnable du plombier Mario, Nintendo a de nouveau métamorphosé le monde du jeu en 2004 avec la DS, modèle inaugural d’une série de consoles portables à deux écrans (dont un tactile) qui se sont arrachées à plus de 150 millions d’unités dans le monde.
Puis vint la famille 3DS, avec toujours deux écrans dont un tactile et l’autre capable d’afficher des images tridimensionnelles, sans lunettes spéciales.
Nintendo a toujours gardé la même philosophie: divertir la famille. En 20 ans, la firme a élargi à la fois l’offre de jeux avec des titres ludo-éducatifs, et le public, en convertissant même les adultes, grâce notamment à la console de salon Wii.
Si Nintendo se veut fidèle à ses valeurs, alentour, les temps changent. Entre 1989 et 2014, la bulle a éclaté, la crise a frappé à plusieurs reprises. La firme, qui s’est jouée de la mauvaise conjoncture économique pendant des années, comme si de rien n’était, est aujourd’hui rattrapée par une autre menace: le progrès technique fulgurant.
Un nouveau rival a eu raison d’un pan de sa popularité: le smartphone.
Ses consoles ne trouvent plus autant preneurs et Nintendo est de nouveau au pied du mur. Les dirigeants le savent, il va falloir proposer un produit qui ait la force révolutionnaire de la Game Boy en son temps.
Mais pas n’importe quel produit car “les consoles et les jeux sont le coeur de métier de Nintendo et cela ne changera pas”, a réaffirmé en janvier le PDG de Nintendo, Satoru Iwata.