Alstom : réunion à haut niveau de l’Etat dimanche avec General Electric

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à Belfort le 22 mars 2013 (Photo : Sebastien Bozon)

[26/04/2014 12:33:38] Paris (AFP) Une rencontre entre Manuel Valls, Arnaud Montebourg et le patron du géant américain est attendue dimanche, alors que le gouvernement s’est invité dans le dossier d’une possible reprise d’une grande partie du fleuron industriel français Alstom par le géant américain General Electric, affichant sa “vigilance patriotique”.

La réunion entre le Premier ministre, son ministre de l’Economie et Jeffrey Immelt, le patron de GE doit se tenir en fin de journée dimanche à Paris, ont indiqué à l’AFP deux sources proches du dossier vendredi soir.

Une clarification était aussi attendue du côté d’Alstom. Son cours de Bourse a été suspendu toute la séance vendredi, à la demande de l’Autorité des marchés financiers (AMF), dans l’attente de la publication d’un communiqué par le groupe dirigé par Patrick Kron.

Celui-ci a simplement confirmé aux organisations syndicales que le groupe était “en discussion pour une opération industrielle”, mais a démenti avoir reçu une offre de rachat de GE. Un conseil d’administration était prévu ce vendredi, mais n’est “pas propre à ce sujet”, selon les propos rapportés du PDG français aux syndicalistes.

Selon plusieurs sources proches du dossier, les “discussions” portent sur le rachat par General Electric des activités liées à l’énergie d’Alstom (équipements pour centrales thermiques, lignes à haute tension, énergies renouvelables, soit les divisions “Power” et “Grid”). Soit plus de 70% des activités et un chiffre d’affaires de 14 milliards d’euros, mais pas la division ferroviaire avec ses métros et ses trains, dont l’emblématique TGV.

Dès les premières révélations par l’agence de presse Bloomberg mercredi soir concernant un projet de reprise, les analystes avaient souligné le caractère politiquement sensible du dossier: qu’allait dire Paris du possible passage sous pavillon américain d’un géant industriel français, présent dans des secteurs stratégiques ?

La réponse est finalement venue vendredi du ministre de l’Economie et du Redressement productif, Arnaud Montebourg . “Le gouvernement travaille à d’autres solutions et éventualités que celles imaginées seules et sans que le gouvernement n’en ait été informé par Alstom”, a tancé le ministre chargé de l’industrie dans une déclaration au Monde.

“Alstom est le symbole de notre puissance industrielle et de l’ingéniosité française”, a fait valoir M. Montebourg, dans Le Monde. Dans ce dossier, le gouvernement exprime “une préoccupation et une vigilance patriotiques”.

– “patriotisme économique” –

Il s’est notamment inquiété du “risque sérieux de perte d’un centre de décision” et du “nombre d’emplois perdus ou créés dans de telles opérations” alors que son action vise à renforcer les industries présentes sur le territoire français.

“La France a toujours (…) construit ses outils industriels, les a défendus, les a d’ailleurs parfois engagés dans des alliances très constructives avec des partenaires qui ne sont pas européens. Donc c’est le rôle d’un Etat et l’Etat jouera son rôle”, a indiqué le ministre lors d’un déplacement à Bordeaux.

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est de la France (Photo : Sebastien Bozon)

Sollicité par l’AFP, l’entourage du ministre n’a pas souhaité faire de commentaire sur les spéculations autour de scénarios alternatifs, comme des rapprochements avec d’autres groupes français (Areva, Safran…) voire l’allemand Siemens.

Selon son entourage, M. Montebourg avait déjà eu une discussion “franche” jeudi soir avec M. Kron. Ce dernier avait ensuite été convoqué à l’Elysée où il avait été reçu par le conseiller de François Hollande, Emmanuel Macron.

Pour l’Etat, Alstom est un sujet d’importance: s’il n’est plus actionnaire depuis 2006, il a été l’artisan de son sauvetage et de sa survie en 2003-2004, alors qu’Alstom était au bord de la faillite. Déjà à l’époque, Paris avait bataillé, avec Bruxelles principalement, pour éviter un dépeçage.

L’opération suivrait aussi le mariage récent avec des groupes étrangers d’autres fleurons français, comme Publicis/Omnicom dans la publicité et Lafarge/Holcim dans le ciment.

De son côté, le sénateur MRC du Territoire-de Belfort — où une usine Alstom est un maillon fort de l’économie locale–, Jean-Pierre Chevènement a demandé au Premier ministre de “faire valoir aux actionnaires et aux dirigeants des groupes concernés” qu’un “transfert de propriété est hors de question” entre Alstom et General Electric.

Environ la moitié des 18.000 employés d’Alstom en France travaillent pour les divisions liées à l’énergie. Dans le monde, plus des deux tiers des effectifs totaux d’Alstom (environ 93.000 personnes) sont concernés par ces activités.

Si la carte du “patriotisme économique” s’avérait décisive, General Electric peut se targuer de sa forte implantation en France, avec 11.000 employés et un siège régional à Belfort, après le rachat en 1999 d’activités à… Alstom.

L’assise industrielle et financière du géant américain permettrait également de régler les problèmes de “taille critique” insuffisante d’Alstom, alors que le groupe français connaît de nouveau d’importantes difficultés.

Son activité énergie est notamment pénalisée par le manque d’investissements dans les infrastructures électriques en Europe. Ainsi que par les flux de trésorerie négatifs d’Alstom, ses “cash flow”, qui inquiètent les marchés.

Quant à GE, qui se détourne de sa branche financière GE Capital, il accentuerait son virage stratégique vers l’industrie. D’autant que le groupe a un trésor de guerre colossal, notamment situé dans ses filiales hors des Etats-Unis.

“C’est un projet industriel qui peut avoir du sens”, a commenté vendredi le commissaire européen aux Marchés intérieurs et aux Services, Michel Barnier.