étrolier de Tawke, à 400 km au nord de Bagdad, en 2009 (Photo : Safin Hamed) |
[28/04/2014 12:27:50] Bagdad (AFP) Malgré ses immenses réserves pétrolières et gazières, l’économie irakienne, minée par la corruption et des infrastructures hors d’âge, est en panne et sa diversification est un des défis que devra relever le futur gouvernement.
Des élections législatives se tiennent mercredi dans un climat de violences croissantes, peu favorable aux affaires.
L’Irak a des réserves prouvées de 143,1 milliards de barils de pétrole et de 3.200 milliards de mètres cubes de gaz naturel, parmi les plus importantes au monde.
Selon les dernières estimations du Fonds monétaire international (FMI), la production pétrolière représente plus de 90% des exportations irakiennes et des revenus de l’Etat, et plus 70% du PIB.
L’Irak n’a pas su “attirer d’investisseurs étrangers, n’a pas construit de secteur industriel, et il n’existe pas de véritable secteur agricole”, souligne Issam el-Faili, professeur de Sciences politiques à l?université Mustansiriyah de Bagdad.
En outre, l’économie pâtit d’une sous-qualification de la main-d’oeuvre, d’un climat des affaires délétère, d’un système judiciaire inefficace et d’une règlementation kafkaïenne, faisant de l’Irak l’un des pires endroits au monde pour les affaires, selon la Banque mondiale.
Les entreprises se plaignent régulièrement des violences quotidiennes, de la corruption rampante et du système bancaire d’un autre âge.
En l’absence d’investissements privés, le secteur pétrolier est l’unique moteur de l’économie et a permis une croissance de 4,2% en 2013 selon le Fonds monétaire international (FMI).
Il génère 1% des emplois directs et des centaines de milliers d’emplois indirects et alimente notamment les caisses du gigantesque secteur public mais n’est pas une locomotive pour le reste de l’économie.
“L’économie irakienne souffre d’une faiblesse structurelle” et elle n’est pas suffisamment diversifiée pour permettre des “progrès notables en terme de lutte contre la pauvreté et l’exclusion”, estime ainsi la Banque mondiale.
Alors que le pays a encore augmenté sa production pétrolière en février, avec plus de 3,5 millions de barils par jour, les Irakiens déplorent qu’il n’y ait aucun effet sur l’emploi. En 2012, le taux de chômage dépassait les 16%, selon la CIA.
– Diversifier –
“L’Irak doit se concentrer sur le développement d’une économie moins dépendante de la production de pétrole”, plaide Ayham Kamel, directeur pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord de l’Eurasia Group consultancy, tout en reconnaissant que la situation sécuritaire du pays rend extrêmement difficile toute forme de diversification.
Les violences se sont en effet multipliées ces derniers mois, faisant près de 3.000 morts depuis début 2014.
Rouba Houssari, rédactrice en chef du site internet www.iraqoilforum.com, juge de son côté que “la priorité du futur gouvernement sera de résoudre les problèmes qui empêchent le secteur pétrolier de prospérer”.
Car si les réserves sont importantes, le reste de la chaîne de production est loin d’être à la hauteur: l’Irak n’a par exemple pas de lieu de stockage suffisamment important pour les cargaisons des pétroliers en cas d’immobilisation dans les ports par gros vent.
Ce manque d’infrastructures et la bureaucratie sont des problèmes majeurs, souligne Mme Houssari.
S’y ajoute la querelle qui oppose Bagdad à la région autonome du Kurdistan irakien, où se trouvent de nombreux champs de pétrole.
Les autorités kurdes et le gouvernement irakien se livrent depuis plusieurs mois une bataille sur le contrôle des exportations de brut: Bagdad estime que le pétrole appartient au pays tout entier tandis qu’Erbil veut traiter directement avec des compagnies pétrolières.
Outre le différend sur le pétrole, un conflit territorial oppose le gouvernement central au Kurdistan irakien, des tensions qui représentent à long terme la menace la plus importante pour la stabilité de l’Irak, selon des diplomates et des responsables.