«L’UTICA, porte-parole du secteur privé tunisien, a apporté, à côté d’autres composantes de la société civile, une contribution primordiale au succès de ce Dialogue qui a bénéficié du soutien de tous les pays amis dont particulièrement la France et des institutions financières internationales. Ce résultat exceptionnel a permis de donner une vision plus claire au processus en cours et à redonner confiance à nos partenaires. A présent, notre priorité est la mobilisation de toutes les énergies en vue de relancer l’économie après trois années de conjoncture difficile, et ce à travers la redynamisation de l’investissement national et étranger propre à créer plus de croissance et d’emploi».
C’est ainsi que s’est exprimée Wided Bouchamaoui, présidente de la centrale patronale, lors de la réunion du conseil de chefs d’entreprise France-Tunisie mardi 29 avril 2014 tenue au siège du MEDEF International devant nombre de chefs d’entreprise français et tunisiens, et rehaussé par la présence de Mehdi Jomaâ, ainsi que des membres du gouvernement tunisien.
D’après un communiqué de l’UTICA, le chef du gouvernement a mis l’accent sur la situation politique, économique et sociale de la Tunisie ainsi que sur les défis auxquels fait face le pays dans cette dernière étape de transition. Il a ajouté que la Tunisie, qui a su avancer dans son processus politique par la voie du dialogue, saura surmonter ses difficultés économiques par cette même voie. Le chef du gouvernement a indiqué que la relance de la dynamique entrepreneuriale sera l’une des priorités de l’Etat et que le gouvernement prendra les mesures qui s’imposent pour inciter les jeunes à innover et à créer, notant que la Tunisie est un réservoir de compétences qui peut être très profitable pour les entreprises locales et étrangères.
Pas de retour de l’investissement avec un gouvernement de juges…
Sauf qu’à ce jour, le chef du gouvernement tunisien n’a pas annoncé des mesures révolutionnaires, audacieuses et hardies pour redonner confiance à la communauté d’affaires ainsi qu’aux jeunes qui veulent travailler ou investir. La campagne de chasse aux sorcières a été prise sur décision politique et a entraîné le pays non pas dans une dynamique de lutte contre la corruption, établissant des bonnes pratiques et une meilleure gouvernance mais dans la déstructuration du tissu économique. Conséquence: perte de confiance des investisseurs dans la justice, car nombre de corrompus et magouilleurs notoires sont blanchis et d’autres y compris les hauts commis de l’Etat restent sous le couperet des juges d’instruction et des chambres d’accusation.
Aucune décision politique n’a été prise 4 ans après le 14 janvier pour mettre fin à ces injustices commises au vu et au su des partis politiques, des composantes de la société civile et des médias. Même les déclarations intempestives de Wided Bouchamaoui n’ont pas eu d’impact réel, car les interdits de voyages le sont toujours et les procès des hommes d’affaires ainsi que des anciennes compétences traînent toujours en longueur…
Et on parle d’une start-up democratie! Comment pareille idée peut effleurer nos décideurs publics s’ils n’osent même pas appliquer la loi et établir l’Etat de droit? «Al Adlou Assassou Al Imrane» (la justice est le fondement de la civilisation) semble être le dernier souci des uns et des autres. Sauf que les muets d’aujourd’hui risquent d’être eux-mêmes confrontés aux abus des politiques, des juges et des combinards de la société civile. Eh oui la roue du destin tourne à l’improviste et les bourreaux d’aujourd’hui peuvent devenir les victimes de demain… A méditer pour certains obtus, envieux et obsédés par la vengeance…
Et pour que les chefs d’entreprise français viennent «massivement investir en Tunisie et y croire, pour que la Tunisie puisse devenir le hub régional de l’informatique prochainement et un site attractif pour les investisseurs internationaux, il faut que le gouvernement Jomaa ose prendre les décisions qui s’imposent. Et ce en matière d’assouplissement des procédures et des règlementations, d’assainissement des services douaniers et administratifs, de libéralisation rationnelle de certains secteurs et surtout veiller à ce que la Tunisie ne devienne pas, comme l’a été l’Italie avec les conséquences que nous voyons aujourd’hui, l’otage des juges…
Pierre Ghattaz, président du MEDEF, fin diplomate, a pour sa part «renouvelé la volonté des entreprises françaises à soutenir la Tunisie». Il a rappelé que «celles-ci ne l’ont jamais quitté et qu’avec cette transition qui revalorise l’image d’un pays sur le chemin de la démocratie, les entreprises françaises sont plus que jamais déterminées à soutenir notre pays».
Mais le passage le plus intéressant dans le discours de Gattaz est celui touchant à la nécessité pour les entreprises tunisiennes et françaises de conquérir ensemble les marchés de l’Afrique subsaharienne et du Moyen-Orient, ajoutant que «le Medef partage pour cela la vision de l’UTICA qui a souscrit l’année 2014 comme celle de l’Afrique».
Wided Bouchamaoui, présidente de l’UTICA, est revenue sur cette thématique dans son discours, appelant à ne plus parler «de la compétitivité de l’économie, ni celle de l’entreprise, mais de la compétitivité des alliances, qui permet une meilleure intégration sur le marché international, ceci d’autant plus que les entreprises aussi bien tunisiennes que françaises sont confrontées aux même défis et contraintes liés à la mondialisation».
Elle a appelé les partenaires français à rompre avec cette image de pays à main-d’œuvre bon marché, mais plutôt à aborder la Tunisie comme un partenaire potentiel pour conquérir ensemble de nouveaux marchés au Moyen-Orient, en Afrique et même en Europe. «Nos entreprises gagneraient à développer une approche de partenariat gagnant-gagnant basée sur la co-localisation et permettant de développer de nouvelles synergies».
Mais tous ces beaux discours nous rappellent la chanson de la regrettée Dalida «Paroles, Paroles», soit un assemblage savant de consonnes et de voyelles et qui le resteront s’ils ne sont pas suivis immédiatement du concret aussi bien à l’échelle de la Tunisie qu’à celle du partenariat avec la France!