Tunisie – Finance : Le projet de la réforme bancaire, les attentes

wmc-bank-services.jpgIl s’agit de l’un des chantiers dont les dimensions sont multiples: elles touchent la contribution dans la croissance économique, la compétitivité, les exigences de respecter les normes prudentielles et de conformité, mais surtout d’instaurer les principes de la bonne gouvernance.

Dans cette optique de réforme, les acteurs économiques et les experts s’attendent à ce que la nouvelle loi soit neutre, encourageant la liberté d’entreprendre et permettant de se prémunir contre les risques divers, tels que dérapages inflationnistes, le risque de liquidité, le risque d’insolvabilité et le risque systémique.

Certes, le cadre légal fera l’objet d’une révision profonde afin de remédier à une situation d’un secteur qualifié d’émietté, concentré et lent, et ce par, pratiquement, plusieurs banquiers, et éminents experts. Les épineuses questions de l’agrément initial et de l’agrément en cours d’exercice doivent attirer une attention particulière des décideurs.

D’autres questions sont soulevées et concernent des points cruciaux pour ce qui est de la Direction, il s’agit en effet de la nécessité du remplacement de l’autorisation par l’information à l’occasion des nouvelles nominations qui sont conditionnées par la disponibilité dans le sens de la limitation d’interdiction du cumul aux fonctions de direction, des incertitudes quant aux conflits d’intérêt, mais il est également des limites des capitaux dont la révision paraît évidente.

Pour ce qui est des principes du Bureau des Règlements Internationaux (BRI), il est fortement attendu que la nouvelle loi de réforme bancaire consacre les fondements relatifs à la répartition des compétences et la diffusion de la culture du contrôle et le renforcement des activités, à ce niveau, l’évaluation des risques et le développement des systèmes du contrôle interne et du reporting.

Constats et synthèse de la situation

Les gains de la modernisation du secteur bancaire et de sa restructuration ne sont plus à démontrer. De sa réforme dépend le redémarrage de l’économie nationale. Le système bancaire tunisien occupe une place non négligeable dans l’économie du pays. Les services financiers contribuent à environ 2% au Produit Intérieur Brut (PIB) aux prix courants à fin
décembre 2013. La masse salariale distribuée dans le secteur s’élève à plus de 840 millions de dinars, soit 6,2% de la masse salariale totale. On recense 19.000 emplois directs, et le réseau de guichets a plus que doublé en quinze ans, s’élevant de 627 en 1999 à 1.449 en 2012.

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Après près de vingt années de sous-activité du moins par rapport à la Zone MENA (Middle East and North Africa), le système bancaire tunisien doit sortir de sa torpeur, et ce pour éviter un désastre d’une faillite insupportable par la sphère économique dans son ensemble.

Néanmoins, on endure, en réalité, un contexte pesant et de multiples opportunités ratées depuis des années. Le dispositif est fortement atomisé et pourrait être considéré comme mené par quatre grandes banques, faisant pratiquement le marché, en gérant 57% des actifs du secteur et détenant chacune une part d’actifs dépassant les 14%.

Les banques tunisiennes n’ont, dans l’état actuel des choses, sauf réforme accélérée, aucune chance d’être compétitives à l’échelle tant nationale qu’internationale.

Les remèdes

Le premier volet qui pourrait être considéré comme axe fondamental de la réforme est de remédier à la question des tailles petites et à la compétitivité des banques.

Les banques jouent un rôle essentiel dans le financement de l’économie tunisienne. En effet, plus de 90% des concours à l’économie transitent par ces institutions financières. Le financement concerne aussi bien le développement que le cycle d’exploitation. Les changements politiques et sociaux que la Tunisie est en train de vivre appellent une transformation substantielle dans les fondements même du métier de la banque.

Les banques sont ainsi appelées à revoir le partage de la valeur créée. Du point de vue des entreprises, et en considérant les résultats de plusieurs enquêtes menées, les marges réalisées par les établissements financiers sont très élevées et dénotent d’une relation de type oligopolistique.

En outre, le système bancaire tunisien, composé d’une trentaine de banques, semble surbancarisé, et ne permet pas, par conséquent, un financement efficient de l’économie. En effet, un tel nombre de banques laisse supposer que celles-ci ne bénéficient pas de rendements d’échelle et les prive de gammes indispensables à l’amélioration de leur compétitivité.

Un deuxième constat s’impose. Les banques tunisiennes apparaissent ainsi comme étant très conservatrices dans ce domaine. Les documents produits s’intéressent davantage aux informations patrimoniales, à la solidité des garanties réelles ou personnelles produites, qu’aux capacités de remboursement et à la situation financière future des entreprises financées.

Autre constat, les modalités d’organisation et de fonctionnement du Conseil d’administration, ainsi que ses caractéristiques, sont susceptibles d’affecter la qualité du contrôle et l’efficacité de la gestion. La place qui devrait être dévouée au Conseil d’administration conditionnerait, dans une large mesure, son rôle dans l’édification d’un système de gouvernance bancaire créateur de valeurs et rigoureux.

Malgré les efforts déployés, il reste beaucoup à faire sur le chemin d’une gouvernance au diapason des normes internationales et qui répond aux exigences des changements sociopolitiques que connaît le pays.