GRAFF Diamonds le 31 janvier 2014 (Photo : Noam Galai) |
[09/05/2014 18:03:34] New York (AFP) Tentative de repositionnement dans la musique et l’électronique prêt-à-porter, ou geste désespéré d’un groupe désormais incapable d’innover? Les analystes sont divisés sur l’achat potentiel par Apple du fabricant californien des écouteurs stéréo du rappeur Dr Dre, Beats Electronics.
L’acquisition, chiffrée par les médias à 3,2 milliards de dollars, serait la plus grosse de l’histoire d’Apple, dont les achats jusqu’ici ne dépassaient pas quelques centaines de millions de dollars.
“J’espère que c’est une pure rumeur, parce que c’est la pire acquisition que puisse faire Apple” et “de la folie totale”, estime auprès de l’AFP Trip Chowdhry, analyste chez Global Equities Research. “Ca n’a pas de sens stratégique, ça n’a pas de sens sur le plan technologique, ça n’a pas de sens en termes d’innovation”.
D’autres géants de la Silicon Valley font pourtant eux aussi des emplettes surprenantes: Facebook vient de dépenser 2 milliards de dollars pour le casque de réalité virtuelle Oculus et Google investit dans les drones solaires, les robots ou les thermostats intelligents. Mais historiquement, Apple ne rachète pas de produits, il crée les siens en interne.
L’ennui, c’est que sept ans après le premier iPhone et quatre ans après l’iPad, le prochain produit révolutionnaire du groupe à la pomme se fait toujours attendre.
“Tim Cook élude le fait qu’Apple a un niveau d’innovation zéro”, déplore Trip Chowdhry. “Je veux mon iWatch maintenant”, dit l’analyste, en référence à la montre interactive espérée depuis plus d’un an et qui marquerait enfin l’entrée d’Apple sur le marché des accessoires électroniques prêt-à-porter, considéré comme le prochain chantier d’avenir après les smartphones et les tablettes mais où on voit davantage jusqu’ici les lunettes Google Glass.
Vu la centaine de milliards de dollars de liquidités d’Apple et son “besoin de flux de revenus réguliers plus solides” face aux ventes d’appareils qui dépendent des sorties de nouveaux produits, les analystes de RBC Capital Markets envisagent dans une note “plus de logique dans l’opération qu’il n’y paraît à première vue”.
Au-delà des écouteurs de Dr Dre, Apple vise surtout selon eux le service de musique en ligne par abonnement “Beats Music” lancé en janvier aux Etats-Unis.
– Relancer l’innovation –
Apple est avec sa boutique en ligne iTunes une référence pour les téléchargements payants de musique. Mais le marché de la musique numérique se déplace vers un autre mode de consommation: au lieu de payer pour télécharger plusieurs albums par mois, on s’abonne à un service d’écoute de musique en ligne, explique Mark Mulligan, un spécialiste du secteur de la musique, sur son blog “Music Industry”.
“Avec le déclin des ventes en téléchargement et la montée en puissance des abonnements, Apple (…) cherche ce qu’il peut faire pour rester pertinent dans le secteur de la musique numérique”, estime l’analyste. “Beats est une solution du type: si vous ne pouvez pas faire mieux, achetez-les.”
Un logo de Apple (Photo : Joel Saget) |
Mark Mulligan voit une opportunité d’offres combinées avec l’iPhone qui aideraient les consommateurs à passer le pas de l’abonnement mensuel.
La banque Jefferies estime aussi que “Beats Music” compte environ 500.000 abonnés seulement, mais que le pré-charger sur l’iPhone (encore écoulé à près de 44 millions d’exemplaires dans le monde au premier trimestre) accélèrerait son adoption.
Certains analystes se demandent toutefois si le numéro un mondial de la musique en ligne Spotify n’aurait pas fait un meilleur candidat. Jefferies voit toutefois plutôt dans le groupe suédois “un bon complément aux actuelles offres numériques d’Amazon”.
Certains experts voient aussi dans l’acquisition une manière de relancer les capacités d’innovation d’Apple.
Elle lui donnerait en effet accès à des designers et des ingénieurs susceptibles de l’aider à concevoir de nouveaux produits, notamment dans le domaine de l’électronique prêt-à-porter.
RBC rappelle en particulier que le fondateur de Beats, Jimmy Iovine, “était l’un des premiers responsables du secteur à anticiper le déclin des téléchargements et à dire que les services de streaming par abonnement étaient l’avenir de la musique”. Il “pourrait aider à gérer la stratégie d’iTunes et dans la musique”, estime la banque.