BNP Paribas et Credit Suisse jouent gros aux Etats-Unis

459bc29bd0145398572d57db41cbd925b364446d.jpg
une agence de la BNP Paribas (Photo : Loic Venance)

[14/05/2014 17:10:45] New York (AFP) BNP Paribas et Credit Suisse, deux fleurons de l’industrie bancaire européenne, risquent gros aux Etats-Unis où ils sont menacés de poursuites pénales et pourraient se voir infliger des amendes record, respectivement pour blanchiment et évasion fiscale.

Au moins 2 milliards de dollars pour Credit Suisse, plus de 3,5 milliards pour BNP Paribas, tels étaient les derniers pronostics mercredi sur les amendes qui pourraient être imposées aux deux institutions.

Une chose est certaine, les amendes dans les deux cas seront lourdes, selon une source proche du dossier, qui souligne que des discussions actives se poursuivent avec les deux banques.

Le directeur général de BNP Paribas Jean-Laurent Bonnafé, venu plaider lui-même la cause de sa banque la semaine dernière aux Etats-Unis, s’est dit mercredi “très confiant” lors de l’assemblée générale du groupe.

Les autorités américaines accusent BNP Paribas d’avoir contourné entre 2002 et 2009 des sanctions américaines contre l’Iran, le Soudan et Cuba.

A Credit Suisse, elles reprochent d’avoir aidé des riches américains à dissimuler des avoirs au fisc de leur pays.

Ces griefs valent aux deux établissements de faire l’objet d’enquêtes au niveau fédéral -le département de la Justice (DoJ) – et au niveau fédéré – les services du régulateur bancaire de New York Benjamin Lawsky notamment.

Les deux banques ont fait savoir qu’elles coopéraient avec les autorités américaines.

– Trop gros pour la prison ?

7c9aa538531c2cc4157a3556fbcfc69aa1d2cbd3.jpg
à Berne (Photo : Fabrice Coffrini)

Alors qu’ils n’avaient pas franchi le pas avec leurs banques nationales comme JPMorgan Chase sur le dossier des prêts immobiliers à risque à l’origine de la crise financière, les Etats-Unis veulent obtenir de BNP Paribas et de Credit Suisse qu’elles plaident coupables.

Ils menacent aussi de les poursuivre au pénal, ce qui pourrait entraîner une révocation de leur licence.

“Une poursuite criminelle peut fermer une banque”, dit à l’AFP Jacob Frenkel, avocat spécialisé dans les affaires financières. Il explique que tout dépendra de savoir si la faute est rejetée sur les filiales américaines.

“Généralement lors des accords ,les accusations sont dirigées contre la filiale de sorte de permettre à la maison mère de continuer à opérer normalement”, ajoute-t-il.

“Les autorités veulent répondre aux craintes (publiques) sur le +trop gros pour aller en prison+”, renchérit Brandon Garrett, professeur de droit à l’Université de Virginie (nord-est).

En l’espèce, BNP Paribas voudrait faire porter le chapeau à sa filiale BNP Paribas USA mais sa proposition n’a guère ébranlé les procureurs américains, selon une source.

Credit Suisse envisagerait de plaider coupable, selon la presse américaine.

Accepter de plaider coupable –ce qu’aucune banque n’a accepté de faire aux Etats-Unis depuis deux décennies– pourrait avoir des conséquences graves pour la marche des deux banques, qui s’exposeraient à des demandes de dédommagement.

Pour éviter des conséquences aussi dramatiques, les autorités françaises et suisses s’activent en coulisse.

Le ministre français des Finances Michel Sapin se serait entretenu avec M. Lawsky et aurait plaidé la clémence vis-à-vis de BNP Paribas.

Idem en Suisse: la ministre des Finances Eveline Widmer-Schlumpf a effectué un voyage aux Etats-Unis début mai pour s’entretenir avec M. Holder.

– Accords en cours –

Des accords seraient en cours dans les deux dossiers.

BNP Paribas a déjà prévenu que les sanctions qu’elle encourait pourraient largement excéder la provision de 798 millions d’euros inscrite pour se couvrir.

Les transactions incriminées ont été effectuées depuis l’Iran, Cuba et le Soudan, pays où elles étaient légales, selon une source. Seul hic, elles l’ont été en dollars, autrement dit compensées à un moment donné sur le territoire américain, ce qui les rend délictueuses, les Etats-Unis imposant des sanctions à ces trois Etats.

Une enquête interne de la banque a recensé un “volume significatif d’opérations qui pourraient être considérées comme non autorisées au regard des lois et des règles des Etats-Unis”.

Credit Suisse a pour sa part mis de côté 720 millions de francs suisses (810 millions de dollars), soit plus que ce qu’avait payé en 2009 sa concurrente UBS (780 millions de dollars) pour des faits similaires.

Selon un rapport du Sénat américain, Credit Suisse avait abrité, en 2006, les comptes de plus de 22.000 clients américains, d’un montant total de 10 à 12 milliards de dollars, en grande partie non déclarés.