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[19/05/2014 19:10:37] Washington (AFP) La justice américaine a inculpé lundi cinq officiers de l’armée chinoise pour “piratage informatique” et “espionnage économique”, une première reflétant l’inquiétude de Washington sur l’ampleur du pillage informatique téléguidé par Pékin.
Pékin a immédiatement réagi, dénonçant des accusations “absurdes”, s’appuyant sur des “faits fabriqués” et qui mettent “en danger la coopération et la confiance mutuelle entre la Chine et les Etats-Unis”.
Un grand jury de Pennsylvanie, dans l’est du pays, a inculpé cinq officiers chinois, “membres de l’Unité 61398 du Troisième département de l’Armée de libération du peuple”, le nom officiel de l’armée chinoise, a annoncé le ministre américain de la justice, Eric Holder.
“Cette affaire d’espionnage économique présumé perpétré par des membres de l’armée chinoise représente les premières poursuites jamais engagées à l’encontre d’un acteur étatique pour ce type de piratage”, s’est-il félicité lors d’une conférence de presse.
Les officiers poursuivis –Wang Dong, Sun Kailiang, Wen Xinyu, Huang Zhenyu et Gu Chunhui– sont accusés d’avoir, entre 2006 et 2014, volé des secrets commerciaux d’entreprises américaines spécialisées dans l’énergie nucléaire ou solaire ou encore dans la métallurgie.
Parmi ces entreprises figurent Westinghouse, US Steel, Allegheny Technologies, Alcoa, ainsi que des filiales de la société SolarWorld.
En 2010 par exemple, “pendant que Westinghouse négociait avec une entreprise publique chinoise la construction de réacteurs nucléaires, les pirates volaient les plans de composants de ces réacteurs”, a détaillé le ministre.
Les documents judiciaires citent également, parmi d’autres, le cas d’Alcoa qui discutait d’un partenariat avec une entreprise publique chinoise en février 2008 et qui a été victime à la même époque d’une attaque informatique au cours de laquelle ont été volés des milliers de courriels internes, dont certains évoquant ces discussions.
– “Les claviers de Shanghaï” –
“L’éventail des secrets commerciaux et autres informations sensibles volées dans cette affaire est important et exige une réponse agressive”, a affirmé Eric Holder, selon qui le gouvernement américain “ne tolérera pas les actions d’aucun Etat qui cherche à saboter illégalement des sociétés américaines”.
L’existence de l’Unité 61398 avait été révélée en février 2013 par la société américaine de sécurité sur internet Mandiant, conseil du gouvernement américain, dans un rapport consacré à l’ampleur de l’espionnage informatique chinois, qui coûterait, selon le Washington Post, entre 24 milliards et 120 milliards de dollars par an à l’économie américaine.
Mandiant avait pu suivre la trace de ces cyberattaques jusqu’à un immeuble de 12 étages dans les faubourgs de Shanghaï, qui abrite “des centaines, voire des milliers d’employés” travaillant pour cette unité de l’armée chinoise. Avec les inculpations révélées lundi, la justice américaine met “des visages et des noms derrière les claviers de Shanghaï”, a lancé Eric Holder.
Le directeur du FBI James Comey, cité dans un communiqué, a de son côté estimé que “pendant trop longtemps, le gouvernement chinois a utilisé le cyber-espionnage de façon éhontée pour obtenir des avantages économiques pour ses industries d’Etat”.
La virulence des propos des responsables américains dans cette affaire reflète le niveau d’inquiétude atteint aux Etats-Unis face à l’ampleur de l’espionnage informatique chinois, source de tensions entre les deux pays ces derniers mois.
“Nous avons soulevé ce problème avec le gouvernement chinois régulièrement et de façon franche. Les annonces d’aujourd’hui reflètent notre inquiétude croissante face à un comportement qui continue”, a expliqué le porte-parole de la Maison Blanche Jay Carney. Il a toutefois rappelé le souhait de Washington de “développer une relation constructive et productive” avec Pékin.
Pékin de son côté se plaint également d’attaques informatiques perpétrées à son encontre par les Etats-Unis, notamment à la suite des révélations d’Edward Snowden sur l’ampleur de la collecte de renseignement sur internet par la NSA, l’agence de renseignement américaine chargée des interceptions de communications.
S’appuyant sur des documents fournis par l’ancien consultant de la NSA, la presse américaine a révélé au début de l’année que la NSA avait pendant des années accédé aux archives des courriels du géant chinois des télécoms et d’internet Huawei, à des documents internes de communication entre des dirigeants de la société, ainsi qu’aux codes secrets de produits de l’entreprise.
Réagissant aux inculpations, le ministère chinois des Affaires étrangères n’a pas manqué de rappeler que Pékin était victime de “vols informatiques graves de la part des Etats-Unis” et suspendu les activités d’un groupe de travail bilatéral sur la sécurité informatique, une décision que “regrette” le département d’Etat.