à New York, le 19 mai 2014 (Photo : Andrew Burton) |
[20/05/2014 05:12:51] Washington (AFP) La banque Credit Suisse a plaidé coupable lundi d’aide à l’évasion fiscale de riches clients américains et accepté de payer une amende sans précédent de 2,6 milliards de dollars aux autorités américaines.
Il s’agit de la première institution financière à reconnaître ainsi sa culpabilité en deux décennies devant la justice américaine, s’est félicité le ministre Eric Holder, lors d’une conférence de presse.
C’est aussi l’amende la plus sévère jamais infligée à une banque dans une affaire fiscale. Sa compatriote UBS avait accepté de verser 780 millions de dollars pour des faits similaires en 2009, sans toutefois plaider coupable.
Credit Suisse a “activement aidé ses clients à mentir aux services fiscaux américains en cachant des avoirs et des revenus dans des comptes en banques illégaux et non déclarés”, a déclaré Eric Holder.
Credit Suisse pourra toutefois maintenir ses activités aux Etats-Unis. Elle a changé son fonctionnement pour empêcher désormais aux riches Américains de dissimuler leurs avoirs, mais elle n’a pour l’instant livré aucun nom de client aux autorités américaines.
“Nous regrettons profondément les manquements dans le cadre des anciennes affaires transfrontières américaines, qui ont conduit au présent règlement”, a déclaré Brady Dougan, le patron de Credit Suisse.
“La résolution complète de cette affaire est une avancée essentielle pour nous”, a-t-il dit dans un communiqué, ajoutant que la banque n’avait constaté “aucun impact important” sur ses activités.
Depuis Berne, le Conseil fédéral suisse (gouvernement) a dit sa “satisfaction” quant à l’issue de cette affaire.
L’administration Obama obtient ainsi auprès d’une banque étrangère la reconnaissance de culpabilité qu’elle n’avait pas réussi à décrocher pour ses banques nationales, comme JPMorgan Chase sur le dossier des prêts immobiliers à risque.
“Aucune institution financière n’est au-dessus des lois, quelle que soit sa taille”, a réaffirmé le ministre américain de la Justice, deux semaines après s’être dit “déterminé” à voir aboutir les enquêtes en cours contre les banques.
Credit Suisse faisait partie de 14 banques basées en Suisse poursuivies pour évasion fiscale.
– Un plaider coupable “historique” –
La banque française BNP Paribas devrait aussi plaider coupable, d’ici une semaine ou deux, pour blanchiment d’argent et violations de sanctions américaines contre certains pays comme Cuba, l’Iran ou le Soudan. L’amende pourrait dépasser les 3,5 milliards de dollars, selon la presse américaine.
érence de presse, le 19 mai 2014 à Washington (Photo : Alex Wong) |
Interrogé sur la différence de traitement entre banques étrangères et américaines, M. Holder a promis que “les institutions financières ne seraient pas traitées différemment en raison de leur nationalité”.
“Le plaider coupable de Credit Suisse constitue le dernier effort en date du ministère pour mettre un terme aux comptes en banque non déclarés (…) et autres manoeuvres étrangères utilisées par les contribuables américains pour échapper au fisc”, a déclaré le ministre adjoint de la Justice James Cole, en saluant “un “plaider coupable historique”.
La banque helvétique a plaidé coupable lundi devant un tribunal de Virginie d’avoir “volontairement” conseillé et aidé des clients américains à préparer des “déclarations fiscales tronquées” et échapper aux impôts aux Etats-Unis, selon des documents judiciaires.
Selon un rapport du Sénat américain, Credit Suisse avait abrité, en 2006, les comptes de plus de 22.000 clients américains, d’un montant total de 10 à 12 milliards de dollars, en grande partie non déclarés.
M. Holder a expliqué que Credit Suisse paierait 1,8 milliard de dollars d’amende au ministère de la Justice, dont 670 millions iront à l’IRS, les services fiscaux américains.
Cent millions de dollars iront à la Réserve fédérale américaine et 715 millions aux services financiers de New York. La banque a déjà versé 196 millions au gendarme de la Bourse (SEC) en février dernier.
Huit anciens ou actuels employés de Credit Suisse, dont des responsables, ont été inculpés depuis 2011 dans le cadre de cette enquête. Deux d’entre eux ont plaidé coupable en mars et avril dernier, et doivent connaître leur peine en août. Celle-ci ne devrait pas dépasser les cinq ans de prison.