à New York, le 19 mai 2014 (Photo : Andrew Burton) |
[20/05/2014 16:16:53] Zurich (AFP) La banque Credit Suisse est finalement parvenue à un accord sur le litige fiscal aux États-Unis moyennant une lourde amende, réglant ainsi un des dossiers de taille alors que d’autres banques helvétiques sont sous le coup d’enquêtes outre-Atlantique.
Lundi soir, le numéro deux de l’industrie bancaire helvétique s’est reconnu coupable d’avoir aidé de riches clients américains à échapper à l’impôt, s’engageant à payer 2,6 milliards de dollars aux autorités américaines.
Cette amende – la plus lourde jamais infligée dans un litige fiscal aux États-Unis – correspond à plus du triple de ce qu’avait déboursé sa rivale Suisse UBS en 2009, qui n’avait, dans son cas, pas plaidé coupable.
Credit Suisse va cependant conserver sa licence bancaire aux Etats-Unis, ce que les investisseurs ont accueilli comme un soulagement.
“Nous restons convaincus que cela passera rapidement dans la mesure où de grosses amendes similaires ont déjà été imposées à d’autres banques (y compris à UBS)”, a commenté Tim Dawson, analyste chez Helvea, dans une note.
Compte tenu des provisions déjà constituées, la banque s’attend à ce que l’impact de cette amende, qui sera inscrite dans ses comptes du deuxième trimestre, se chiffre à 1,59 milliard de francs suisses après impôts.
Lors d’une conférence de presse, la ministre des finances Eveline Widmer-Schlumpf s’est dit “très contente” qu’une solution ait été trouvée, espérant ainsi “avoir de l’air” pour régler le cas des autres banques incriminées.
Credit Suisse faisait partie de la liste des quatorze établissements basés en Suisse sous le coup d’une enquête américaine, parmi lesquels figurent notamment l’établissement de gestion de fortune Julius Baer, mais aussi de la Banque cantonale de Zurich ou de la Banque cantonale de Bâle.
Chaque établissement fera l’objet d’une négociation individuelle, a précisé la ministre des finances qui a souligné que le montant de l’amende infligée à Credit Suisse ne constitue pas un étalon de mesure pour déterminer l’ampleur des pénalités que subiront les autres banques.
Pour sa part, l?association suisse des banquiers (ASB) “espère à présent que les autres banques suisses sous le coup d’investigations du Département de la Justice américain parviendront également à trouver rapidement un accord basé sur la proportionnalité et le principe d?équité”.
Contacté par l’AFP, le porte-parole de Julius Baer n’a pas souhaité faire de commentaire.
La Banque Cantonale de Zurich a quant à elle souligné que le règlement de Credit Suisse ne permettait pas de tirer de conclusions pour les autres banques suisses visées par la justice américaine.
– Chaque cas est différent –
“Chaque cas est différent et sera étudié individuellement”, a indiqué par courriel une porte-parole. La banque n’a pas souhaité faire de commentaire sur les procédures en cours, rappelant qu’elle coopérait avec les autorités compétentes.
Douglas Hornung, un avocat genevois spécialisé dans les affaires fiscales et bancaires avec les États-Unis, estime en revanche que le montant de l’amende infligée à Credit Suisse devrait cependant établir un précédent.
âtiment du Crédit Suisse à Bâle, le 11 juin 2013 (Photo : Fabrice Coffrini) |
“Les américains sont assez logiques. Je ne peux pas imaginer que pour les autres banques toujours dans la catégorie 1, le traitement serait différent”, a-t-il expliqué à l’AFP.
L’an passé, Washington et Berne avait conclu un accord afin de régler la question des actifs cachés dans les coffres des banques suisses, répartissant les banques en quatre catégories.
Rangées dans la catégorie 1, les banques visées par la justice américaine était cependant exclues du programme de régularisation proposé aux autres établissements.
Selon Douglas Hornung, il faut s’attendre à des amendes de l’ordre de 20 à 30% du montant des actifs dissimulés.
La question de l’aide à l’évasion fiscale a empoisonné les relations entre Washington et Berne depuis de nombreuses années.
Le conflit a notamment été marqué par la fermeture de la banque Wegelin, le plus vieil établissement de gestion de fortune en Suisse, qui s’était sabordé avant de refermer définitivement ses portes en mars 2013 après avoir plaidé coupable devant un tribunal américain.
Le cas de Credit Suisse était cependant complexe à régler compte tenu de la taille de l’établissement et de son poids sur les marchés financiers.
“Les régulateurs sont probablement contents d’eux mêmes après cette grande victoire contre le crime en col blanc mais en réalité le fait que la banque ait conservé sa licence bancaire montre à quel point les mains des régulateurs sont liées contre cette industrie trop grosse pour faire faillite”, a commenté Jasper Lawler, analyste chez CMC Markets, dans une note.