Intelligence économique : les PME cherchent à combler leur retard

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ordinateur (Photo : Joel Saget)

[23/05/2014 10:25:46] Paris (AFP) Que faire face aux risques de pillage industriel? Si les grandes entreprises ont massivement investi dans la sûreté économique, les PME françaises restent en retard dans ce domaine même si elles cherchent de plus en plus à protéger leurs innovations.

“La sûreté économique est aussi un problème local. Les PME sont toutes concernées”, a déclaré Sophie Larivet, chercheur en sciences de gestion, lors d’un colloque organisé cette semaine à l’Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice (INHESJ).

Dans un contexte de compétition acharnée entre les acteurs, où l’information peut être une arme décisive, les PME prennent conscience, à l’image des poids lourds du CAC 40, de la nécessité de protéger leur savoir-faire pour se prémunir contre des “actions malveillantes”.

“Il y a environ 15 à 20% des PME qui pratiquent l’intelligence économique. 40% d’entre elles font de la veille mais ne vont pas plus loin”, a indiqué à l’AFP Sophie Larivet, auteure d’une enquête sur les pratiques des PME en la matière.

Facteur de développement et de performance, la sûreté économique permet de garder un “avantage compétitif” selon les experts en préservant les innovations des PME par rapport à leurs concurrentes.

Par la veille d’information, la mise en place de mesures de protection ou encore un travail d’influence, l’intelligence économique donne des outils aux entreprises pour leur permettre de prendre les meilleures décisions et augmenter ou préserver leurs profits.

“La sûreté? C’est un centre de coût évité”, a souligné Stéphane Volant, secrétaire général de la SNCF lors de cette conférence.

– Problème ‘culturel’ –

Si la prise de conscience est récente chez les PME françaises, la pratique n’est pas encore assez répandue notamment en raison d’un problème “culturel” face aux questions d’intelligence économique, contrairement aux pays anglo-saxons à la pointe dans ce domaine.

“Il y a malheureusement dans notre pays une faiblesse dramatique de la pensée stratégique notamment dans le domaine de l’information”, a regretté Rémy Pautrat, préfet de région honoraire et précurseur de cet enjeu en France, qui propose un “pacte de responsabilité” en matière d’intelligence économique pour répondre aux défis de ce que certains observateurs nomment la “guerre économique”.

“On note un manque de familiarité culturelle à ces questions. C’est encore un peu jeune dans notre pays même si on est moins en retard qu’il y a 15 ou 20 ans”, a déclaré à l’AFP Éric Delbecque, chef du département Sécurité économique à l’INHESJ.

Conscient du changement de nature de la compétition économique qui ne cesse de se complexifier, le gouvernement a réformé son dispositif dans ce domaine en mettant en place il y a tout juste un an une délégation interministérielle à l’intelligence économique censée “sensibiliser” les acteurs à cette nécessité.

Alors que les besoins ne cessent de se faire sentir, la formation de cadres à ces questions reste insuffisante malgré une “amélioration” de l’offre ces dernières années selon les experts.

“Il faudrait que l’ensemble des entreprises concernées – grandes entreprises ou PME – aient au moins une personne en charge de ces questions”, insiste Éric Delbecque.

L’ampleur des coûts qu’implique la mise en place d’une sûreté efficace explique aussi le manque d’entrain de certaines PME à se doter d’un tel instrument.

“Une PME qui veut faire de la veille ne peut pas s’abonner à toutes les revues professionnelles et des bases de données qui coûtent 10.000 euros”, a estimé Sophie Larivet qui conseille cependant aux PME de “mutualiser” leurs investissements dans ce domaine.

“Si elle ne prend pas de telles mesures, cela va lui coûter cher plus tard et peut même risquer de disparaître”, a averti Éric Delbecque, également président d’honneur de l’association des conférenciers en sécurité économique.