L’exil de dirigeants du CAC 40 alimente le débat sur l’attractivité de la France

cee055710f54d86b58786a0853584acac9949cda.jpg
évrier 2014 (Photo : Eric Piermont)

[03/06/2014 18:46:22] Paris (AFP) L’installation aux Etats-Unis du patron de Sanofi, venant juste après l’annonce du déménagement pour Londres de son homologue de Kering, relance le débat sur l’attractivité de la France à un moment où le pays doute de son modèle face à la compétition internationale.

En dix jours, deux dirigeants d’entreprises du CAC 40, le gratin de l’économie française, auront annoncé qu’ils quittaient le pays. Comme d’autres avant eux, ils assurent ne pas être motivés par des considérations fiscales.

Le groupe pharmaceutique Sanofi, deuxième capitalisation de la Bourse de Paris après Total, a confirmé mardi le départ pour les Etats-Unis de son directeur général, Chris Viehbacher, officiellement pour des raisons personnelles.

“Cette décision est avant tout familiale et personnelle et Chris Viehbacher s’est engagé à ce qu’elle n’ait aucune conséquence sur le fonctionnement de l’entreprise”, a déclaré le groupe, confirmant une information du Monde.

Selon le quotidien, le Germano-Canadien, arrivé à la tête du groupe à la fin 2008, “a déménagé près de Boston, aux Etats-Unis”, après avoir passé cinq ans en France.

Il y a une semaine, c’est François-Henri Pinault, PDG du groupe de luxe Kering, qui admettait être intéressé par la vie londonienne, tout en assurant qu’il “entend(ait) rester résident fiscal français”.

“François-Henri Pinault partage son temps entre plusieurs quartiers généraux du groupe, Paris, Londres, New York, Hong Kong… Mais il entend rester résident fiscal français”, a déclaré un porte-parole du groupe.

L’objectif de ce déménagement serait de favoriser la carrière d’actrice de Salma Hayek, avec laquelle M. Pinault est marié depuis 2009.

Outre Sanofi et Kering, d’autres grands groupes du CAC ont délocalisé ces dernières années leurs dirigeants ou une partie de leurs hauts cadres de direction.

– Un phénomène en expansion –

C’est le fabricant de matériel électrique Schneider Electric qui avait ouvert le bal, en annonçant en 2011 que trois de ses directeurs généraux étaient désormais installés à Hong Kong et que le président de son directoire, Jean-Pascal Tricoire, y passerait davantage de temps.

cc344902a79840f7d9cf65bfc6223c328a518b02.jpg
çois-Henri Pinault, PDG du groupe de luxe Kering, à Paris le 21 février 2014 (Photo : Eric Piermont)

Selon le groupe, il s’agissait d’accélérer son développement en Asie, où il réalise déjà le quart de son activité.

L’an dernier, Total avait annoncé le transfert à Londres de la gestion de sa trésorerie et d’une partie de sa communication financière, soit 70 personnes au total, afin d’être “en contact direct” avec la capitale financière et pétrolière européenne.

Total avait démenti que cette décision soit liée au niveau d’imposition en France, en soulignant que “le +Comex+ (le comité exécutif, composé du PDG, Christophe de Margerie, et de ses cinq principaux lieutenants) ne bougeait pas”.

Le directeur financier, Patrick de la Chevardière, avait assuré que cette décision ne constituait “pas un désaveu de la place de Paris”, en dépit des inquiétudes manifestées par l’association Paris Europlace, qui défend les intérêts de la place parisienne.

“Dans un monde de plus en plus ouvert et concurrentiel, c’est une décision qui pose une fois de plus la question de la compétitivité de la place financière de Paris”, avait mis en garde Arnaud de Bresson, délégué général de cette association, après la décision de Total.

“La compétitivité de notre industrie financière est une condition du financement des entreprises et de la reprise de la croissance, comme du maintien du contrôle de nos centres de décision, et donc de l’emploi”, avait-il plaidé.

Plus récemment, le cimentier Lafarge, autre poids lourd de la cote parisienne, a décidé d’implanter en Suisse le siège de la société née de sa fusion avec le suisse Holcim. Publicis, également au CAC 40, avait prévu d’installer à Amsterdam son siège social après sa fusion avec l’américain Omnicom, mais y a renoncé après l’échec de l’opération.

Ces décisions sont bien souvent le signe de l’internationalisation accrue des groupes français et de la compétition que se livrent les grandes entreprises au plan mondial. Mais elles alimentent également un peu plus les suspicions sur la capacité de la France à attirer les capitaux internationaux, voire simplement à conserver ses champions sur son territoire national.

Des difficultés illustrées par le cas Alstom, qui montre un champion français trébucher au point d’avoir besoin de s’adosser à un groupe étranger, en l?occurrence l’américain General Electric ou l’allemand Siemens, pour survivre.