à Paris le 5 juin 2014 (Photo : Christophe Karaba) |
[05/06/2014 20:16:55] Caen (AFP) Europe et Etats-Unis doivent s’unir au sein d’un accord de libre échange pour retrouver la croissance et préserver leur influence face à la montée des pays émergents, ont plaidé jeudi entrepreneurs et politiques à la veille des célébrations du 70e anniversaire du Débarquement.
Partant de l’idée que le transatlantisme a pris son essor le jour du Débarquement et s’est concrétisé trois ans plus tard avec le Plan Marshall, la Chambre de commerce américaine en France et le Mémorial de Caen ont réuni dans cette ville jeunes et politiques, universitaires et dirigeants d’entreprises.
“A la place où je suis je mesure à quel point, quelles que soient les différences, nous avons besoin d’être ensemble des deux côtés de l’Atlantique dans les crises immédiates”, a déclaré dans un message vidéo, le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius, rappelant qu’Europe et Etats-Unis représentaient près de la moitié de la production mondiale et le tiers des échanges internationaux.
“Nous avons besoin d’une alliance transatlantique forte, nous ne pouvons nous résoudre à végéter avec une croissance zéro ou de 1% à 2%”, a lancé le président de la Chambre de commerce américaine de Washington, Thomas Donahue, pour qui le meilleur moyen d’y parvenir est l’accord de libre échange actuellement négocié, et qui suscite des inquiétudes et résistances en Europe.
Les discussions sur un accord ambitionnant d’établir la plus vaste zone de libre-échange au monde, le traité dit TTIP, n’en sont qu’à leurs débuts avec un cinquième cycle de négociations organisé du 19 au 23 mai derniers aux Etats-Unis. Membres de la société civile et certains politiques européens ont déploré un manque de transparence et d’information qui exacerbe les craintes de non respect des normes alimentaires et environnementales européennes ou d’hégémonie américaine dans certains secteurs.
Mais pour Jean Charest, ancien Premier ministre du Québec, familier des négociations internationales, l’enjeu va bien au-delà. “Dans le contexte des économies qui émergent dans le monde où nous vivons, je pense que ce qui est vraiment en jeu est de savoir qui définira les règles du commerce international”, a-t-il déclaré au cours d’un panel intitulé “réinventer l’alliance transatlantique”. Pour parler clairement: “le seul sujet c’est la Chine, les économies émergentes et c’est pour cette raison politique que cet accord doit voir le jour”, a-t-il lancé.
“J’ai soutenu l’engagement du TTIP pour cette raison aussi”, a déclaré à l’AFP Michel Barnier, commissaire européen au marché intérieur et aux services. Mais à condition de “respecter les modèles. Je n’accepterai pas un tel accord au bout de la route si on devait remettre en cause ce à quoi nous tenons nous Européens en termes de modèle environnemental ou alimentaire par exemple”, a-t-il ajouté.
Pour Alexis Jamet, jeune entrepreneur dans l’informatique, déjà présent dans 160 pays et qui ambitionne avec sa société Bunkr de concurrencer les plus grands du secteur “l’entrepreneuriat sera le nouveau Plan Marshall car il incarne la liberté et l’innovation”. “Nous Européens, avons besoin d’apprendre ce qu’est réellement l’entrepreneuriat et ne devrions pas avoir peur de prendre la Silicon Valley comme exemple”, a-t-il ajouté.
Un accord transatlantique faciliterait la reconnaissance de ses produits sur le marché américain, souligne pour sa part un autre créateur de start-up Grégory Jean, dont la société Aykow se spécialise notamment dans la détection du gaz radioactif radon présent dans le sous sol de nombreuses habitations.
L’entrepreneuriat peut être dans un contexte de “chômage élevé, notamment parmi les jeunes” le nouvel “ascenseur social” et “jouer un rôle important dans la dynamique du partenariat transatlantique”, a déclaré la secrétaire d’Etat française au Commerce extérieur Fleur Pellerin.
“Au delà des biens et services, il faut inclure la mobilité du travail”, a estimé M. Charest. “Les pays qui réussiront avec une population vieillissante sont ceux qui sauront attirer les talents”, a-t-il ajouté.
Très applaudi par les lycéens venus de nombreux pays présents au forum, un haut dirigeant de BNP Paribas, Alain Papiasse, a appelé à une première mesure concrète, la simplification des visas pour les jeunes.