érence de presse à Krynica le 10 septembre 2010 (Photo : Bartek Wrzesniowski) |
[16/06/2014 14:59:20] Varsovie (AFP) Le gouvernement polonais était sous pression lundi après des révélations dans la presse d’une affaire de trafic d’influence présumé, impliquant le ministre de l’Intérieur et le gouverneur de la banque centrale, l’opposition demandant la démission du cabinet de centre droit de Donald Tusk.
Dans une conversation enregistrée l’an dernier à leur insu et publiée dimanche par l’hebdomadaire Wprost, le gouverneur Marek Belka proposait au ministre Bartlomiej Sienkiewicz de soutenir, en cas de crise, la politique budgétaire du gouvernement, en demandant en retour la démission du ministre des Finances de l’époque, Jacek Rostowski, qui a depuis quitté son poste.
Le chef du principal parti d’opposition (PiS, conservateur) Jaroslaw Kaczynski a demandé lundi que M. Tusk présente “la démission du gouvernement”. “S’il ne le fait pas, nous déposerons une motion de censure”, a-t-il averti.
Le PiS a également adressé au Parlement une demande formelle de vote de défiance à l’égard de M. Sienkiewicz.
Gazeta Wyborcza, le plus grand quotidien polonais, a suggéré lundi à mots voilés que l’enregistrement secret pourrait être l’oeuvre des services spéciaux russes, afin de déstabiliser la Pologne sur fond de crise russo-ukrainienne.
Parlant devant la presse lundi après-midi, Donald Tusk a exclu la démission de son cabinet, tout comme celle de son ministre de l’Intérieur.
“Je n’y vois rien qui m’oblige à prendre des décisions telles que la démission (…) Je ne prendrai aucune décision politique”, a-t-il assuré.
Il a dit partager l’avis du procureur général Andrzej Seremet, selon qui aucun des deux interlocuteurs n’avait violé la loi.
– ‘Tentative de coup d’Etat’ –
En revanche, le parquet ouvrira une enquête pour essayer d’identifier les auteurs des enregistrements illégaux, un délit en Pologne, a déclaré M. Tusk.
“Pour la première fois depuis la chute du communisme en 1989, nous avons affaire à une tentative de coup d’Etat, une tentative de renverser le gouvernement avec des méthodes illégales”, a-t-il insisté.
Selon Gazeta Wyborcza, “si c’est l’oeuvre d’un service de renseignements étranger, le problème se pose du fonctionnement du contre-espionnage polonais”, au moment où “notre sécurité et notre stabilité prennent une importance fondamentale face à une guerre régulière en Ukraine et à l’expansion politique de Poutine, en pleine négociation sur le gaz et les efforts de Tusk pour trouver une réponse au diktat de Moscou sous forme d’une union énergétique” européenne.
Selon “un ministre important” polonais cité par le journal sous couvert d’anonymat, “la version la plus probable c’est que les services spéciaux russes soient derrière cette provocation” destinée à faire en sorte que les Polonais cessent de s’occuper de l’Ukraine et d’une union énergétique européenne.
Le Premier ministre polonais a lancé début avril une offensive diplomatique en faveur d’une union européenne de l’énergie pour réduire la dépendance du continent vis-à-vis de la Russie.
La Pologne, qui couvre les deux tiers de sa consommation de gaz avec des importations, principalement de Russie, entend proposer notamment à ses partenaires de l’UE des achats communs d’hydrocarbures. Dix pays de l’UE sont fortement dépendants du gaz russe, dont certains à 100%.
La Russie a coupé lundi le gaz à l’Ukraine après l’échec de leurs négociations, risquant d’affecter l’Europe et d’aggraver le pire conflit sur le continent depuis la fin de la Guerre froide.
Jacek Rostowski, alors ministre des Finances, avait été congédié le 20 novembre dernier par le chef du gouvernement dans le cadre d’un vaste remaniement ministériel. A sa place, un jeune économiste de la banque néerlandaise ING, Mateusz Szczurek, 38 ans, a été nommé.
Marek Belka a confirmé lundi aux médias la tenue de sa conversation avec le ministre de l’Intérieur, en précisant qu’elle avait eu lieu “à l’initiative” de la banque centrale. Il a assuré qu’il ne s’agissait pas d’un “deal” entre la banque centrale et le gouvernement, mais d’un échange de vues fait “par souci pour l’Etat”.