éen flottant devant le Parlement de Strasbourg (Photo : Georges Gobet) |
[20/06/2014 14:28:15] Luxembourg (AFP) A peine évoquée, l’idée a été rejetée par Berlin. Pourtant, la pression monte pour faire évoluer le carcan budgétaire européen et l’adapter à la réalité d’une économie en panne.
Lundi, à la surprise générale, le ministre de l’Economie et vice-chancelier allemand, Sigmar Gabriel, propose lors d’une visite en France d’exclure du calcul du déficit le coût des réformes, pour “donner plus de temps” aux pays avec des déficits excessifs.
“Ces quelques déclarations du vice-chancelier Gabriel constituent plus qu’une tempête dans un verre d’eau”, estime Carsten Brzeski, économiste de la banque ING. “Elles pourraient lancer un nouveau débat sur la croissance contre l’austérité”.
De fait, elles sont pain béni pour la France, qui se débat pour ramener son déficit sous 3%, ou pour l’Italie de Matteo Renzi, qui veut réformer sans sacrifier l’emploi et la croissance.
– “Interpréter le pacte” –
Mercredi, la chancelière Angela Merkel recadre son ministre. Il n’y a pas de nécessité de modifier le pacte de stabilité européen, qui offre déjà “suffisamment de flexibilité”, assure-t-elle.
Le lendemain, Paris et Rome se défendent de vouloir toucher au pacte de stabilité qui fixe une limite de 3% du PIB pour le déficit public des Etats membres et de 60% pour la dette publique. “Les règles sont les règles”, insiste le ministre français Michel Sapin.
Mais le Fonds monétaire international (FMI), qui fait partie de la troïka des créanciers des pays européens sous assistance financière, entre dans la danse en suggérant de simplifier le cadre budgétaire, devenu selon lui trop complexe depuis son renforcement à la faveur de la crise.
“On constate que par l’addition de différents niveaux concernant le pacte de stabilité (…) il y a une certaine complexité d’une part et des divergences d’interprétation d’autre part”, commente jeudi la patronne du FMI, Christine Lagarde, devant plusieurs responsables de la zone euro.
Qui plus est, les seuils du pacte de stabilité ont été “définis dans des période de croissance qui n’avaient rien à voir” avec la situation actuelle, souligne l’institution de Washington, inquiète que le pacte de stabilité finisse par “décourager l’investissement public”.
– Austérité ou croissance –
Pour le FMI, le désendettement des Etats est bien la priorité, mais se concentrer uniquement sur la réduction des déficits est une gageure. Il faut dans le même temps des mesures pour la croissance ainsi qu’une politique monétaire accommodante.
Ces sujets ne sont “certainement pas pour demain matin”, il s’agit de “réfléchir à une évolution ultérieure”, souligne-t-elle, consciente de la sensibilité du sujet en Europe.
La position de Mme Lagarde est assez éloignée de celle défendue par la Commission européenne et les principaux responsables de la zone euro depuis le début de la crise. Un exécutif européen qui a même été accusé d’avoir accentué l’austérité et favorisé la très faible inflation dans laquelle est plongée la zone euro.
“Il n’y a pas d’autre solution que le désendettement”, a assuré le commissaire européen Olli Rehn (Affaires économiques), devenu pour beaucoup une incarnation de l’austérité, et qui s’apprête à quitter ses fonctions après son élection au Parlement européen.
Refusant de remettre en cause les règles, il a cependant ouvert la voie à une certaine “flexibilité”. L’ensemble des règles budgétaires européennes doivent être passées en revue en fin d’année, et c’est dans ce cadre qu’une discussion devrait s’engager.
“La question n’est pas de revenir sur le pacte budgétaire, c’est de l’interpréter”, estime un observateur européen. Plusieurs idées sont sur la table depuis des mois pour trouver un nouvel équilibre entre austérité et croissance, comme les contrats où, en échange de réformes, les Etats pourraient bénéficier de mécanismes de solidarité.
Ce débat intervient au moment où l’Europe cherche à répondre à la poussée europhobe aux européennes, en trouvant des moyens concrets pour faire de la croissance une priorité pour la prochaine Commission européenne. “Nous ne pouvons pas nous permettre le luxe d’avoir d’autres années de croissance molle”, résume un diplomate à Bruxelles.