Le sort de BNP Paribas aux Etats-Unis scellé lundi soir

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à Paris (Photo : Loic Venance)

[27/06/2014 13:59:03] Paris (AFP) Après des mois d’âpres négociations, les autorités américaines annonceront lundi soir les termes de l’accord qui permettra à BNP Paribas d’échapper à des poursuites judiciaires pour avoir aidé certains pays à contourner un embargo américain.

La première banque française par la capitalisation devra s’acquitter d’une amende avoisinant 9 milliards de dollars et reconnaître sa culpabilité, geste exceptionnel de la part d’un établissement financier, a indiqué vendredi à l’AFP une source proche du dossier, confirmant des informations du New York Times.

Le groupe se verra en outre imposer une suspension partielle de ses opérations de compensation en dollars, qui pourrait aller jusqu’à 12 mois, a précisé la source, mais ne concernerait que les activités liées au négoce international de pétrole et de gaz.

Des bureaux situés à Paris, Genève et Singapour seraient interdits de toute transaction en dollars pendant cette période, précise la source. L’interdiction ne sera toutefois pas appliquée immédiatement, les autorités américaines ayant accepter de laisser un délai à BNP Paribas pour qu’elle trouve une solution de remplacement, à savoir une banque qui accepte de compenser les paiements en dollars à sa place.

A la demande des autorités américaines, BNP Paribas a dû rompre ses liens avec une douzaine d’employés, dont deux responsables de haut rang, mais aucun de ses salariés n’a été à ce jour inculpé. Il ne devrait pas y avoir d’autres départs de salariés en lien avec cette affaire, croit savoir la source.

Les sanctions seront détaillées par les autorités américaines lors d’une conférence de presse lundi après la clôture de la Bourse à New-York, soit après 22H00 heure de Paris.

BNP Paribas n’a pas souhaité commenter ces informations.

En France, ce dossier est surveillé au sommet de l’Etat où on réclame des sanctions “équitables”, quitte à mettre dans la balance les négociations commerciales transatlantiques.

La banque, qui a déjà constitué une provision de 1,1 milliard de dollars, est capable d’absorber le montant de cette amende mais les conséquences d’une reconnaissance de culpabilité et de la suspension de certaines activités de compensation sont plus incertaines, estiment les analystes.

BNP pourrait en outre émettre plusieurs milliards d’euros d’obligations et réduire le dividende versé aux actionnaires, selon le Wall Street Journal.

– Mises en garde dès 2006 –

La banque s’est retrouvée dans le collimateur de la justice américaine pour avoir autorisé des paiements en dollars vers des pays soumis à des sanctions économiques américaines, notamment le Soudan et l’Iran, entre 2002 et 2009.

Ces transactions étaient légales au regard du droit international mais étant libellées en dollars, elles ont dû transiter par une chambre de compensation située aux Etats-Unis, ce qui les a placées sous le coup du droit américain.

Cette subtilité juridique a échappé dans un premier temps aux banques européennes, qui ont poursuivi leurs transactions en dollars avec des pays frappés par un embargo américain.

C’est à partir de 2006 que la donne change: à la toute fin de 2005, la banque néerlandaise ABN-Amro est condamnée à payer 80 millions de dollars d’amende pour violation des lois américaines concernant des opérations financières avec la Libye et l’Iran.

Les dirigeants de BNP Paribas commandent alors des expertises auprès de trois cabinets d’avocats américains pour évaluer les risques qu’elle encourt et sont mis en garde dès 2006 sur l’illégalité de ces opérations, a révélé le Monde.

La même année, un dirigeant du Trésor américain se rend au siège de BNP Paribas pour l’avertir du risque juridique lié à ces transactions, et un rapport interne que s’est procuré l’Express pointe des dysfonctionnements et un défaut de surveillance sur des opérations de compensation en dollars.

La banque aurait décidé d’arrêter ces opérations en 2007, selon une source proche du dossier, mais le New York Times a fait état de certaines transactions prohibées en 2012.

Le volume des transactions mises en cause est également conséquent: l’enquête a porté sur plus de 100 milliards de dollars de transactions, pour déterminer ensuite que quelque 30 milliards de dollars de transactions avaient été dissimulées afin de détourner les sanctions, selon des sources.