Après une période très sombre dans le secteur touristique, les affaires reprennent dans ce pays qui a de nombreux atouts, pour les Romands surtout.
Tous sont formels: la Tunisie retrouve des couleurs. Comprenez par là qu’après trois ans de sinistrose dans le secteur touristique suite à la Révolution de jasmin -plus volontiers qualifiée de Révolution de la dignité par les Tunisiens-, les affaires reprennent. Les visiteurs sont de retour. Sur place, les hôteliers sentent le frémissement depuis quelques semaines, que ce soit dans le domaine de la thalasso, des vacances balnéaires, des circuits culturels ou des séjours dans des résidences anciennes transformées en hôtels de charme.
En Suisse, les voyagistes font un constat identique. «Depuis un mois ou deux, nous assistons à un renouveau. L’engouement des Suisses pour la Tunisie reprend, surtout parmi les Romands», constate Michel Vargues, directeur général adjoint d’Air Marin, qui envoie en moyenne 15.000 personnes en Tunisie chaque année depuis sa création il y a 25 ans.
«La tendance est tout à fait nette, surtout en Romandie», confirme pour Hotelplan, Vacances Migros et Tourisme pour Tous leur porte-parole, Prisca Huguenin. «La saison estivale, qui s’étend d’avril-mai à fin octobre, s’annonce bien. Il y a nettement plus de clients que ces trois dernières années». Selon Julian Chan, porte-parole, «les réservations pour la Tunisie chez Kuoni et Helvetic Tours repartent à la hausse pour octobre».
«Les clients reprennent confiance»
Partout la même explication, résumée par Michel Vargues: «Le pays est politiquement stable, la situation sur place est tranquille, les clients reprennent confiance. Pour cet été, après trois années en dents de scie, les réservations se remplissent très bien. Evidemment il faudra attendre encore un peu avant de retrouver la situation d’avant la Révolution. Les gens sont allés voir ailleurs –en Turquie par exemple– et il faut les fidéliser à nouveau. Mais j’ai bon espoir, la Tunisie n’a pas vraiment d’équivalent pour les Romands : proximité, climat agréable, beaucoup d’atouts touristiques, population francophone».
Des propos qui couleront comme du miel dans les oreilles des acteurs du tourisme tunisiens! «Nous avons souffert pendant les années 2011, 2012 et 2013. Le tourisme était complètement en veilleuse, mais là, depuis le week-end de Pâques, ça redémarre. L’hôtel est complet, nos 24 chambres sont prises et les réservations pour la suite vont bon train», déclarait fin avril Karim Ben Hassine Bey, directeur du Dar Saïd, hôtel de charme situé dans le ravissant village de Sidi-Bou-Saïd, sur les hauteurs de Tunis, dans lequel ont résidé par le passé André Gide ou Simone de Beauvoir. «Nombre d’hôtels ont fait faillite. Ceux qui avaient construit trop gros, trop vite et opté pour un tourisme de masse uniquement intéressé par le balnéaire, sans faire l’effort de se diversifier, ont dû fermer leurs portes».
«Les réservations recommencent à affluer»
Même écho dans un autre segment touristique très porteur en Tunisie, la thalassothérapie. « Avant la Révolution, le taux de remplissage de notre hôtel était de 90%, un des meilleurs scores de Tunisie. Durant trois ans, nous étions à 60% en moyenne, avec des périodes à 30% seulement», déclare Faten Zghal, propriétaire avec son époux Slim du palace Royal Thalassa Monastir, construit en 2001, et directrice marketing de la Fédération tunisienne de l’hôtellerie.
Une catastrophe, puisque l’établissement, rénové de fond en comble en 2010, a été enrichi d’un splendide centre de thalassothérapie et de spa, avec vingt suites de grand luxe et des installations somptueuses susceptibles d’accueillir soixante curistes par jour, le Royal Elyssa Thaslasso & Spa.
Commentaire de Faten Zghal: «Par chance, dès le mois de mai, les réservations ont recommencé à affluer et pour juin, nous espérons un taux de remplissage moyen de 70 à 75%.»
Charmes nombreux et variés
La Tunisie, on l’a vu, possède des charmes nombreux et variés aux yeux des Romands. Chez Hotelplan et Vacances Migros, ce sont surtout les séjours balnéaires qui séduisent la clientèle. «Djerba est la destination phare», relève Prisca Huguenin. Qui ajoute: «Chez Tourisme pour Tous, ce sont plutôt la thalassothérapie, les circuits culturels et les voyages individualisés».
Air Marin constate de son côté une forte attirance des Suisses pour les hôtels de charme, secteur que la Tunisie développe depuis un an environ. «Il y a une nette orientation du goût des gens vers la qualité et le haut de gamme», note Michel Vargues. «Nos clients sont d’accord de payer un peu plus pour obtenir des services irréprochables sur les vols et les hôtels. Les groupes de prestige comme Radisson ou Hasdrubal n’ont donc aucun souci à se faire».
Très en vogue, les hôtels de charme
Les hôtels installés dans d’anciennes résidences de prestige non plus. Leur charme est très recherché et la Tunisie mise depuis un an ou deux sur ce segment touristique pour séduire les visiteurs. S’il est un village prisé des voyageurs et des artistes depuis plus d’un siècle, c’est bien Sidi-Bou-Saïd, dont le Café des Délices a été joliment immortalisé par Patrick Bruel.
Au Dar Saïd, maison de notables tunisois construite en 1863 et transformée en hôtel en 1948, on cultive le passé sans mélancolie. Autour des patios somnolent 24 chambres différentes, toutes plus exquises les unes que les autres. Meubles anciens, salles de bains d’origine, tentures colorées, sols de carrelages et lumières douces leur confèrent un attrait indéniable, accru encore par un jardin fleuri où l’on prend le petit déjeuner, une jolie piscine et des salons de lecture.
«Tout a été rénové en 2001 pour faire du Dar Saïd le premier hôtel de charme de Tunisie», commente son directeur depuis quatorze ans Karim Ben Hassine Bey, descendant de l’aristocratie tunisoise. «Un cahier des charges pour ce type d’infrastructure hôtelière existe depuis juillet 2013; une charte a été élaborée par le Ministère du tourisme, et les établissements de ce genre se multiplient dans tout le pays. Il est important pour la Tunisie de tirer le secteur touristique vers le haut et d’assurer une bonne formation du personnel».
Pour quelle clientèle? «Beaucoup de Français et d’Anglais, mais aussi des Suisses, des Italiens et des Espagnols. Notre situation, dans la banlieue chic de Tunis, à 1 km de Carthage, à quelques minutes du musée du Bardo et de la médina, nous permet de cibler un tourisme aux motivations culturelles». Assurément le profil de Moritz Leuenberger, qui logea au Dar Saïd en novembre 2005 lors du Sommet mondial sur la société de l’information…
La Tunisie mise sur sa culture méditerranéenne
La culture est, tout autant que la plage, un atout touristique important pour la Tunisie. Civilisation méditerranéenne, patrie de Didon la Carthaginoise, terre romaine pendant des siècles, elle a participé à l’avènement des trois grands monothéismes – islam, chrétienté, judaïsme.
Elle compte huit sites classés au Patrimoine mondial par l’Unesco, dont les ruines de Carthage, la Médina de Tunis et celle de Sousse, avec son superbe ribat -forteresse abritant la garnison chargée de défendre la ville, comme la Tunisie en comptait une centaine tout le long de ses côtes.
Le Musée du Bardo, à Tunis, abrite la plus belle collection de mosaïques romaines du pays, et celui de Sousse, la seconde. Installé en 1951 dans une partie de l’ancienne Kasbah, l’établissement a été agrandi et rénové il y a dix-huit mois. Les bâtiments parasites, une prison et une caserne notamment, ont été démolis pour mettre en valeur une belle salle d’exposition enterrée au centre de la cour centrale, à laquelle on accède par une porte fortifiée datant du moyen âge. On peut y admirer, outre les mosaïques romaines et chrétiennes, quelques beaux marbres romains et une jolie collection de lampes à huile.
Les festivals font également partie de la vie culturelle tunisienne. Celui de Carthage, qui se tient durant l’été dans l’amphithéâtre romain, est probablement le plus connu. Il accueille cette année IAM et George Benson, Natasha St Pier et Chimène Badi, Youssou N’dour et… Stromaé!
Profiter des bienfaits de la mer
Autre secteur phare dans l’économie de la Tunisie, la thalassothérapie – ou l’usage thérapeutique de l’eau de mer et des éléments marins : boues, algues, sels minéraux, etc. Un peu partout dans le pays sont exploitées les richesses des côtes méditerranéennes, de Tabarka à Djerba en passant par le rivage de Carthage, Hammamet, Sousse, port El Kantaoui, Monastir, Mahdia et Zarzis.
Il existe une cinquantaine de centres de thalasso et d’hôtels qui leur sont associés, et pour toutes les bourses. Toutefois, soins haut de gamme et aménagements luxueux ont aujourd’hui nettement la cote auprès de la clientèle helvétique, romande en particulier.
A Port El Kantaoui, le Hasdrubal Thalassa & Spa, posé sur la plage à deux pas du port de plaisance et du front de mer agrémenté de boutiques et de restaurants, est à même de satisfaire les hôtes les plus difficiles avec ses 230 chambres. Son centre, d’une superficie de 5500 m2, se déploie autour d’une vaste piscine intérieure d’eau de mer nichée sous une coupole de verre.
Un hammam permet aux clients de faire l’expérience d’un soin dans la plus pure tradition orientale, avec étrillage au savon noir prodigué dans les règles de l’art par une matrone haute en couleurs et joyeux badigeonnage au rassoul. Un tiers des clients environ viennent de l’extérieur. Parmi les résidents de l’hôtel, les Français sont les plus nombreux, suivis des Suisses et désormais des Russes.
«En Tunisie, il n’y a pas que le couscous!»
Mais l’un des plus beaux complexes que l’on puisse trouver en Tunisie se trouve assurément à Monastir. Il comprend un hôtel de haut standing, le Royal Thalassa, et un centre de thalassothérapie avec spa. Tout neuf, très luxueux et à la pointe des nouvelles technologies côté équipements, le Royal Elyssa ne peut que convaincre les plus exigeants: les soins, ciblés, sont prodigués par un personnel irréprochable (60 collaborateurs pour 60 curistes); les produits sont choisis avec circonspection (Thalion pour la thalasso, Cinq Mondes pour le spa); vingt suites somptueuses –dont certaines avec jacuzzi privé sur leur terrasse– et situées au-dessus du centre permettent un séjour des plus confortables; une salle de sport complète le panorama de l’offre.
La directrice, Corinne Palomba, s’est forgé, en trente ans de carrière, un nom internationalement reconnu dans les domaines du spa et de la thalasso.
Pour ne rien gâcher, l’hôtel offre aussi à ses clients de belles découvertes dans ses restaurants. «Dès cet été, nous allons mettre l’accent sur la gastronomie tunisienne», souligne Erich Alauzen, attaché de presse du Royal Thalassa. «Il ne faut pas croire qu’en Tunisie, il n’y a que le coucous ! Il existe des cuisines régionales magnifiques et très riches en goûts. Il est temps de changer l’image d’une Tunisie un peu fast-food où l’on ne bouge pas de la plage».
Source : tdg.ch