Comment faire face à la détérioration des finances publiques -et amorcer un début de relance de la machine économique- sans tomber dans une politique d’austérité? C’est là l’objectif et le fil conducteur de la loi de finances complémentaire que le ministre de l’Economie et des Finances, Hakim Ben Hammouda, est venu défendre mercredi 9 juillet, devant la Commission des Finances de l’Assemblée Nationale Constituante (ANC).
Alors que la norme à l’échelle internationale veut qu’il se situe entre 85 et 90%, le taux de couverture des dépenses par les recettes s’établit aujourd’hui à 70% en Tunisie. «En dessous de la barre de 85%, le pays concerné se trouve dans une situation semblable à celle d’un individu dont le salaire s’élève à 1000 dinars et qui en dépense 2000», explique M. Ben Hammouda.
Et le défi pour la Tunisie est de sortir de cette situation et d’arriver à un ratio de 85%, car à défaut le pays devra s’endetter davantage, sera confronté à de plus grandes difficultés et fera face à l’intervention des institutions internationales –Banque mondiale et Fonds monétaire international.
Face à un pays au budget déficitaire plus que de raison, celles-ci demandent une baisse des dépenses de 20% en contrepartie de l’assistance financière qui leur est généralement réclamée dans un tel cas. Le gouvernement actuel veut éviter cela et veut faire l’effort nécessaire pour redresser les comptes publics de manière «indépendante», souligne le ministre de l’Economie et des Finances.
A cet effet, le gouvernement de Mehdi Jomaa a arrêté une série de mesures qui répondent à cinq priorités: la lutte contre l’évasion fiscale, la contrebande et le commerce parallèle.
Pour ce qui est de la fiscalité, le gouvernement a décidé d’œuvrer à élargir l’assiette de l’impôt plutôt que de faire subir une plus forte pression fiscales aux contribuables qui acquittent l’impôt.
Mais «notre approche ne sera pas coercitive. Nous voulons réconcilier le citoyen et l’Etat» dans le domaine fiscal, souligne Hakim Ben Hammouda.
La deuxième priorité consiste à rationaliser les dépenses de l’Etat. Dans ce cadre, les subventions vont devoir être diminuées mais «sans toucher les produits de base, comme cela a été décidé dans le cadre du dialogue économique national».
La relance de la croissance économique et de l’investissement est la troisième priorité que la loi de finances complémentaire vise à atteindre. Pour donner un «coup de fouet», à l’investissement qui «reste hésitant», le gouvernement envisage notamment la baisse de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et la mise sur pied d’un fond d’aide aux petites et moyennes entreprises.
D’ailleurs, le recensement des éventuels bénéficiaires de cette dernière mesure parmi les entreprises à l’arrêt ont révélé que «parfois une enveloppe de 30 à 40.000 dinars suffit pour leur permettre de reprendre leur activité», observe Hakim Ben Hammouda.
La quatrième priorité est la dimension sociale qui, assure le ministre de l’Economie et des Finances, ne pâtira pas de la solution qui sera mise en œuvre pour réduire le déficit du budget de l’Etat.
La cinquième et dernière priorité réside dans l’accélération des réformes économiques. Ainsi, la réforme fiscale, initiée en 2013, devrait être présentée lors des Assises de la fiscalité prévues avant fin septembre 2014. Entretemps, la réforme bancaire –qui tarde à s’enclenche, en raison notamment du retard pris dans l’audit des banques publiques- devrait avoir elle aussi progressé.
Interpellé par les membres de la Commission des finances de l’ANC –qui ont rappelé qu’ils ont voté, dans le cadre du budget de 2013 et de 2014, l’injection d’un total d’un milliard de dinars pour recapitaliser les banques mais sans qu’on leur communique, comme promis, les conclusions des audits-, le ministre de l’Economie et des Finances a promis de leur en révéler le continu de manière confidentielle et en comité restreint pour éviter que le public ne panique s’il venait à en connaître les détails.