Les villes de Tunisie ont reçu l’ordre de se parer de leurs plus beaux atours, à l’occasion de la célébration du 57ème anniversaire de la République. Ainsi en a décidé le chef du gouvernement, Mehdi Jomaâ, qui a donné des instructions pour hisser, à cette occasion, le drapeau national dans toutes les rues et bâtiments.
Cette décision à valeur hautement symbolique intervient au bon moment pour nous faire oublier -et j’espère à jamais- le bien triste 55ème anniversaire célébré, il y a exactement deux ans. Le premier chef gouvernement de l’époque, en l’occurrence Hamadi Jebali avait délibérément interdit aux maires de décorer les villes aux couleurs nationales, choquant, par ce geste, plus d’un Tunisien.
Apparemment, grisé par l’accès inespéré au pouvoir et se croyant en terrain conquis, ce chef de gouvernement, qui avait appelé à l’instauration du 6ème calife et dont le mandat a été catastrophique pour le pays, ne savait pas qu’il venait de faire, à travers cet appel, le lit du premier noyau de ce qu’est, aujourd’hui, l’Etat islamique en Irak et au Levant, le terrible Daech. Il avait peut-être l’intention de remplacer le drapeau national par le sinistre étendard noir de Daech. Connaissant bien la duplicité du discours nahdhaoui, il n’y rien d’étonnant à cela.
La République a résisté et triomphé
Conséquence: le fait que la fête de la République reprenne ses couleurs nationales et naturelles est en soi une victoire contre l’obscurantisme et contre les adeptes des ères moyenâgeuses. La décision de Mehdi Jomaâ, de par son annonce publique, vient prouver que le régime républicain a bien résisté aux tentatives de déstabilisation des islamistes et qu’il commence à s’imposer comme le système politique le mieux indiqué pour les Tunisiens.
Pour s’en convaincre, il suffit de faire un parallèle entre les Républiques qui connaissent prospérité, stabilité et paix multiforme et les régimes intégristes rétrogrades comme ceux de Daech où prévalent barbarie, violence et négation de la vie.
Il faut dire que le sauvetage de la République tunisienne n’a été possible que grâce aux Tunisiens et seulement grâce à eux seuls. Ces mêmes Tunisiens et Tunisiennes qui étaient descendus massivement, après les lâches assassinats des leaders Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi, pour dire «Basta» aux islamistes et pour mettre la pression sur la Troïka, ce collectif de judas de la démocratie qui a volé les voix de ses électeurs et trahi les valeurs de la République.
Résultat : la Tunisie républicaine se porte bien, aujourd’hui. Et pour cause. Elle dispose d’une Constitution viable et acceptable, d’institutions de régulation républicaines multidisciplinaires (Conseil supérieur de transition de justice, HAICA, nouvelle loi électorale, Instance provisoire de contrôle de la constitutionnalité des Lois…) et surtout d’un nouveau gouvernement en principe indépendant. Et ce n’est pas peu de choses en comparaison avec l’instabilité et la violence meurtrière et dévastatrice que connaissent d’autres pays se réclamant du printemps arabe (Libye, Syrie, Yémen et à un degré moindre l’Egypte…).
Terrorisme et contrebande, des défis à relever
Néanmoins, les Tunisiens ne sont pas au bout de leur peine. En dépit des importants pas franchis sur la voie de la démocratie et de l’Etat de droit et des institutions, ils sont invités à s’unir encore une fois pour relever deux défis majeurs.
Le premier n’est autre que le terrorisme qui a, désormais, un pied à terre dans le pays et qui risque de faire encore mal. Le massacre récent des 15 soldats à Henchir Tella (Mont Chaambi) par des terroristes- psychopathes est toujours à l’esprit. Les Tunisiens peuvent, toutefois, se consoler avec ce constat. Le terrorisme n’a jamais triomphé dans aucun pays du monde. C’est un phénomène périssable.
Le second consiste en la recrudescence de la contrebande qui gangrène l’économie du pays et qui est à l’origine du terrorisme, de la cherté de la vie et de la détérioration du pouvoir d’achat des Tunisiens.
C’est seulement lorsque les causses qui génèrent ces deux fléaux seront éliminés que les Tunisiens peuvent tirer le meilleur profit du régime républicain, celui qui consiste à tracer des règles de vie commune et équitable, à s’accepter dans la différence et à dissuader toute nouvelle dictature.
En attendant, ils sont en droit de fêter l’anniversaire de leur jeune République dans la joie et l’allégresse. Ils le méritent car ils ont déjà fait l’essentiel. Ils peuvent en être fiers.