«Le Tunisien défini comme pauvre ne perçoit individuellement que 64,8 dinars par an, du système de subvention, alors que le Tunisien riche en reçoit, quant à lui, 86,9 dinars par an». C’est ce qu’on lit dans un rapport récent de la Banque africaine de développement (BAD).
Intitulé «Subventions alimentaires et aides sociales directes, vers un meilleur ciblage de la pauvreté monétaire et des privations en Tunisie», l’étude de l’institution financière africaine affirme que “la pauvreté, voire l’extrême pauvreté, est une réalité en Tunisie, puisqu’en 2011, 15,5% de la population se trouvait en-dessous de la ligne de pauvreté et ne perçevait que 12% de l’enveloppe totale des subventions accordées par l’Etat”.
Donc, le document de la définit une nouvelle méthode de ciblage de subventions pour identifier les ménages tunisiens les plus démunis, ce qui devra permettre «d’épargner à l’Etat tunisien des millions de dinars de dépenses qui grèvent son budget, tout en réduisant fortement la pauvreté dans le pays».
L’objectif est de formuler des solutions qui optimisent les transferts directs et les procédures de transferts sociaux, et ce, en reposant sur des méthodologies éprouvées et reconnues au plan international, tout en tenant compte des spécificités de la Tunisie.
Ainsi, le rapport esquisse trois scénarios qui permettront de conjuguer plusieurs objectifs, dont la réduction de la pauvreté, la préservation du pouvoir d’achat de la classe moyenne et l’allègement du poids de ces transferts, sur le budget de l’Etat.
Dans le premier scénario, la BAD propose de recourir «sans jamais toucher aux subventions alimentaires, à des transferts directs permettant de plafonner le taux de pauvreté extrême à 1,5% (contre 4,6% actuellement), avec un budget pour le Programme national d’aides aux familles nécessiteuses (PNAFN) réduit de moitié».
Elle prévoit dans un deuxième scénario que “même si le budget du PNAFN demeure inchangé, la pauvreté extrême peut être éradiquée et le taux de pauvreté abaissé à 8% (15,5% en 2011). Les ménages souffrant d’extrême pauvreté percevraient alors 2 526 dinars par an – tous transferts confondus -, soit 2 277 dinars de plus qu’aujourd’hui. In fine, les Tunisiens les plus pauvres toucheraient 52% du budget total alloué aux transferts directs et indirects (contre 12% aujourd’hui)».
La BAD a souligné, dans un troisième scénario, l’impératif «d’accroître la force de frappe budgétaire du PNAF, en lui transférant l’intégralité du budget dévolu jusqu’ici aux subventions, et en utilisant les nouvelles méthodes de ciblage», ce qui «entraînerait des résultats spectaculaires: la pauvreté extrême en Tunisie serait éradiquée (avec un taux de 0%) et le taux de pauvreté réduit à 4,1%».
Ces scénarios, qui explorent différentes combinaisons d’allocation et de réduction budgétaire, aboutissent tous à la même conclusion, à savoir que “rien ne milite en faveur du maintien des subventions indirectes, si l’objectif premier est de lutter contre la pauvreté”.
“Aucun scénario de politique publique n’égale, en termes de performance, l’abolition des subventions et la réallocation du budget dévolu aux transferts directs», a conclu la BAD.