ésident de la Banque centrale européenne à Frankfort, en Allemagne, le 7 août 2014 (Photo : Daniel Roland) |
[14/08/2014 16:42:42] Paris (AFP) Les tensions internationales et les mauvaises nouvelles économiques poussent plus que jamais les investisseurs à se tourner vers les dettes allemande et française, permettant aux deux pays de se refinancer à des taux historiquement bas.
Le rendement offert par l’emprunt à 10 ans de l’Allemagne, valeur de référence en zone euro, est passé brièvement jeudi sous les 1% pour la première fois de son histoire, pour tomber à 0,998%.
“C’est historique et c’est la preuve que certains investisseurs achètent encore des obligations allemandes sur un scénario” mélangeant faible croissance et déflation, remarque Aymeric Diday, directeur de la gestion sous mandat de SPGP.
Si la baisse des taux est tout à la fois spectaculaire et symbolique, elle n’est pas vraiment surprenante.
“Les investisseurs s’y attendaient”, relève René Defossez, stratégiste obligataire au sein de Natixis.
“Le marché ne prend plus de risque compte tenu des tensions géopolitiques très importantes qui créent de la volatilité et de l’absence de croissance dans certains pays”, selon lui.
La crise en Ukraine incite les marchés à la plus grande prudence et a déjà permis à la dette allemande, mais aussi française, de battre des records ces derniers jours.
S’ajoutent à ce contexte des mauvaises nouvelles économiques qui conduisent les investisseurs à prendre le moins de risques possibles.
Sur le marché de la dette, les taux évoluent en sens inverse de la demande, c’est-à-dire que plus les dettes sont recherchées, plus leur taux baisse, offrant ainsi aux États des conditions de financement de plus en plus attractives. Les investisseurs acceptent pour leur part une rémunération moindre en échange de la sécurité de leur placement.
– L’Allemagne n’est pas à l’abri –
La publication des chiffres de la croissance pour le deuxième trimestre jeudi matin a confirmé la fragilité de l’activité en zone euro. Le produit intérieur brut (PIB) a reculé de 0,2% en Allemagne tandis qu’il a fait du surplace en France.
A la clôture à 18H00 (16H00 GMT), les rendements allemands avaient un peu remonté par rapport à leur record, à 1,017% contre 1,027% mercredi à la clôture, sur le marché secondaire, où s’échange la dette déjà émise.
Dans leur sillage, le taux de la France avait atteint un nouveau plus bas historique à 1,390%, avant de terminer à 1,405% (contre 1,426% la veille).
Pour leur part, les taux des pays du sud de la zone euro se sont détendus, malgré la croissance nulle sur l’ensemble de la zone euro. Le taux de l’Espagne a baissé à 2,486% (contre 2,571%), tout comme celui de l’Italie à 2,657% (contre 2,711%).
De son côte, le taux britannique est resté stable à 2,442% (contre 2,441%).
Aux États-Unis, le taux à 10 ans bougeait peu à 2,412% (contre 2,417%), tout comme celui à 30 ans à 3,235% (contre 3,243%). Le taux à trois mois était stable à 0,03%.
– Décalage –
Le paradoxe veut que les investisseurs achètent des dettes de pays comme l’Allemagne où la croissance cale et la France, alors même que le pays va avoir du mal à tenir ses objectifs de déficit budgétaire.
Plusieurs raisons expliquent ce décalage, notamment techniques.
“Les investisseurs institutionnels ont des ratios réglementaires qui les contraignent à placer des liquidités dans des titres bien notés quand bien même cela ne rapporte pratiquement rien”, rappelle M. Diday.
La France reste un des pays les mieux notés de la zone euro et n’a pas de problème de solvabilité, ce qui rend sa dette sûre. L’Allemagne fait quant à elle figure de bonne élève sur le plan budgétaire.
Sans compter que “pour l’instant le marché regarde peu les déficits parce qu’il a le sentiment que la Banque centrale européenne fera tout ce qu’il faut” en cas de dégradation supplémentaire de la situation en zone euro, explique M. Defossez.
“Le risque de déflation fait peur au marché. Il est faible mais existe, notamment dans certains pays”, note M. Defossez.
Un geste supplémentaire de la BCE serait alors bénéfique pour l’ensemble du marché obligataire, au moment où la Réserve fédérale américaine (Fed) réfléchit à un resserrement monétaire.
Il permettrait de faire baisser les taux d’emprunt, qui profitent déjà depuis des mois des politiques monétaires très généreuses des grandes banques centrales.