à New York, le 14 août 2014 (Photo : Don Emmert) |
[14/08/2014 22:13:06] New York (AFP) La banque jordanienne Arab Bank, accusée d’avoir financé des attentats terroristes revendiqués par les mouvements islamistes Hamas et Jihad islamique, s’est présentée à l’ouverture de son procès jeudi comme une entreprise “normale”, le premier de ce genre aux Etats-Unis.
Ce procès, qui se déroule devant la Cour fédérale de Brooklyn à New York, fait suite à une plainte déposée en 2004 par plus d’une centaine de citoyens américains, victimes ou ayants droit de victimes d’une vingtaine d’attentats terroristes entre 2001 et 2004 en Israël, Gaza et en Cisjordanie.
Il devrait durer deux mois et sera suivi d’un autre portant cette fois-ci sur les dommages. Les plaignants réclament un milliard de dollars, a indiqué à l’AFP un de leurs défenseurs, Me Mark Werbner.
“Arab Bank est une entreprise normale qui a comme actionnaires la famille Hariri et le roi de Jordanie”, a dépeint jeudi maître Shand Stephens, le conseil de la banque, devant une salle comble.
“Rafik Hariri a été à deux périodes différentes le Premier ministre du Liban (1992-1998 et 2000-2004, ndlr). Il est mort dans une attaque terroriste en 2005”, a-t-il poursuivi.
Pendant un peu plus d’une heure, le conseil s’est attelé à donner un visage à cet établissement financier, fondé en 1930, basé à Amman, coté en Bourse et présent dans une trentaine de pays, dont les Etats-Unis, la France, la Suisse et le Royaume-uni.
Objectif: convaincre les jurés que la banque ne pouvait financer le terrorisme vu que ses dirigeants eux-mêmes en ont été victimes.
Un peu plus tôt, l’accusation avait tout fait pour associer Arab Bank au mouvement islamiste Hamas, considéré depuis 1997 par les Etats-Unis comme une organisation terroriste.
“Arab Bank a transféré en toute connaissance de cause de l’argent à la demande du Hamas et a reçu de l’argent pour le compte du Hamas”, a lancé Me Mark Werbner, répétant les accusations contenues dans la plainte.
– Attentats suicide –
Le Hamas comme le Jihad islamique se seraient appuyés sur des associations caritatives pour financer leurs activités terroristes, selon l’avocat.
Il explique que le Saudi Committee, une ONG humanitaire levant de l’argent auprès de riches donateurs du Moyen-Orient pour le compte de ces mouvements islamistes, a mis en place un programme d’indemnisation pour les auteurs des attentats suicide et leurs familles.
Arab Bank, auprès de qui Saudi Committee disposait de comptes bancaires, était chargée de verser 5.300 dollars à chacune des familles, selon l’accusation.
Si elle ne nie pas avoir transféré de l’argent à des Palestiniens à la demande de Saudi Committee, Arab Bank explique que les bénéficiaires ne figuraient ni sur les listes antiterroristes des Etats-Unis ni sur celles de l’Union européenne et des Nations unies.
Le Saudi Committee “n’a jamais été qualifié d’organisation terroriste” par les Etats-Unis, a défendu Me Stephens.
En novembre 2012, Arab Bank avait réussi à obtenir de la justice américaine qu’elle classe sans suite une plainte similaire déposée par Mati Gill, un ancien responsable israélien.
L’un des arguments de l’établissement financier consiste également à répéter que cette affaire concerne l’ensemble du secteur bancaire.
Ce procès, l’un des tout premiers qui voit une banque accusée de financement de terrorisme, pourrait en effet créer un précédent.
La banque française Credit Agricole, la britannique National Westminster ou NatWest (Royal Bank of Scotland) et Bank of China font également face à des accusations similaires de financement de terrorisme aux Etats-Unis.
Dans le cas de Credit Agricole, sa filiale Credit Lyonnais est accusée d’avoir en 1990 abrité le compte bancaire d’une ONG, censée financer le Hamas, selon le dernier rapport annuel de la banque. L’établissement nie en bloc ces accusations. Le procès est prévu au plus tôt à l’automne à New York.
Le procès, qui doit durer un peu plus de deux mois, reprend le 18 août avec l’audition des témoins.
Les plaignants attendent de la justice qu’elle reconnaisse qu’Arab Bank a bel et bien financé le terrorisme, selon leurs avocats.