Pendant
plus de trois années, les aéroports et les ports de Tunisie ont souffert de
négligences délibérées de la part des autorités de tutelles. Le passage de la
Troïka a été maléfique pour les établissements publics sous tutelle du ministère
du Transport et les opérateurs privés exerçant dans l’import/export et ses
dérivés.
Outre les sureffectifs des organismes publics, les points de passages légaux
sont devenus des passoires pour tous genres de trafics, allant des produits
alimentaires à l’électroménager en passant par les produits textiles, mais plus
grave et plus nocif encore le trafic de drogues, d’armes et le blanchiment
d’argent.
La tâche du ministre du Transport, Chiheb Ben Hmed, désigné par Mehdi Jomaâ
n’était pas aisée, mais sa longue expérience en tant que haut responsable à la
compagnie battant pavillon national, Tunisair, a été pour beaucoup dans sa
capacité à contrôler une situation explosive tant sur le plan social que
managérial et économique.
Ainsi, lors de la conférence de presse organisée jeudi 14 août, le ministre a
annoncé la création de l’Agence nationale de maîtrise de la chaîne logistique,
le lancement effectif de la réalisation du Port en eaux profondes d’Enfidha et
des mesures pour améliorer la productivité des agents opérant au port de Radès.
M. Ben Hmed a également annoncé le lancement du Réseau ferroviaire rapide et la
réorganisation des free shop -les free shop (Duty Free) sont, nous le savons
tous, une manne financière importante pour la Tunisie en termes de devise et
génèrent près de 50 millions de dinars par an en devises pour le pays.
Pour rappel, un appel d’offres a été lancé au mois d’août 2013 par un certain
Salah Gharsallah, PDG de l’OACA en vue d’activer l’octroi du marché des Duty
free en Tunisie (Lire notre article). Plus que de se préoccuper d’améliorer la
qualité des prestations rendues au sein des aéroports nationaux, M. Gharsallah
s’est empressé de lancer l’appel d’offres Duty free, en vue, prétendraient
certaines personnes, de favoriser un candidat très proche des gouvernants à
l’époque aux rennes de l’Etat, Enahdha.
Les plis n’ont pas encore été ouverts mais selon des sources assez bien
informées, le favori serait l’opérateur de Duty Free Turc ATU (dépendant de la
TAV) qui officie déjà à l’aéroport Enfidha et dont les ambitions ne semblent pas
se limiter à l’aéroport en question. Hégémonie ottomane oblige et relations
suspectes avec l’un des partis qui figure parmi les plus présents sur la scène
économique. Un parti qui s’est imposé dans tous les secteurs fructueux et
porteurs, qu’il s’agisse de l’énergétique, de l’immobilier, du médiatique et
encore plus de celui du transport.
Le nouveau ministre est bien décidé à mettre de l’ordre dans son département
tout d’abord en entamant les plans de restructuration des entreprises publiques
mises pratiquement en faillite. Les concernées sont Tunisair, la STAM, la CTN,
la SNCFT, la TRANSTU, la Société de Transport de Sfax et celle du Sahel.
Dématérialiser les procédures portuaires pour améliorer la productivité et la
rentabilité
Le but de la manœuvre, en améliorant le taux de disponibilité des équipements de
manutention, est de réduire les coûts d’exploitation en maîtrisant les pannes et
les circulations inutiles des engins. Il est également prévu d’augmenter le taux
de disponibilité des engins de 30 à 70% et de mobiliser les personnels de la
STAM grâce à l’adhésion des partenaires sociaux par la mise en œuvre du régime
de travail 24/24 pendant tous les jours de la semaine à Radès.
Le ministère compte également procéder à la dématérialisation des procédures
portuaires en installant le système de gestion automatisé des conteneurs et
remorques TOS dès octobre prochain.
Mais pas seulement, on procédera à la mise en place des rubriques de la liasse
transport, l’intégration du système d’information de la STAM TOS, l’équipement
du port par des caméras de surveillance pour contrôler les entrées et sorties
des marchandises, la dotation du port de portes automatisées (programme PDE3),
la révision du statut du personnel de la STAM pour instaurer le travail continu
et le lancement d’un programme spécifique de formation pour la mise à niveau des
compétences et l’amélioration de la qualité de service.
Face à la croissance continue de la conteneurisation des marchandises, la
communauté portuaire doit ou bien développer de nouvelles infrastructures ou
bien pour être plus dans la réactivité et faire face aux exigences du secteur
Import/Export, optimiser l’utilisation des installations existantes.
C’est ce que le ministère du Transport compte entreprendre dans l’immédiat. A
savoir, augmenter les capacités de stockage de la STAM grâce à une gestion
automatisée et une plus grande disponibilité des engins de manutention par
l’intégration d’un nouveau mode d’exploitation dont les RTG. Une technique qui
consiste à convertir les grues RTG (Rubber tyred gantry cranes – grues à
portique à revêtement caoutchouc).
Les RTG fonctionnent au diesel et représentent souvent la moitié de la
consommation et des émissions correspondantes d’un port dans son ensemble.
L’impact économique est notable car les grues essentielles peuvent passer à un
mode opératoire favorable grâce au courant électrique.
Les mesures pour la restructuration et le réaménagement du port de Radès ne
s’arrêtent pas aux équipements mais s’étendent sur les infrastructures. Ainsi,
très prochainement on procèdera à l’extension du quai 7 et la construction des
quais 8 et 9. Le secteur privé y sera associé car dans presque tous les pays du
monde, la plupart des terminaux à conteneurs sont opérés par des sociétés
privées ayant signé un contrat (Partenariat Public Privé) pour une durée
déterminée avec l’autorité portuaire qui reste «landlord», c’est-à-dire
propriétaire du terrain.
Le mode d’exploitation des terminaux prend la forme le plus souvent d’un contrat
de concession. Pour ceux qui sont frileux quant à la «souveraineté» de l’Etat
sur des secteurs stratégiques et la «voracité des bêtes privées», la propriété
privée des terrains est très rare, car la puissance publique reste dans la
majorité des cas le propriétaire foncier du domaine portuaire.
Reste que face à ces mesures multiples prises par les autorités publiques, il
faut que les privés réagissent en levant leurs marchandises dans le respect des
délais. La bonne volonté de l’Etat pour limiter les dégâts des dépôts indéfinis
des marchandises ne doit pas se traduire sur terrain par de l’indifférence et
une absence de réactivité des privés qui doivent accélérer la levée de leurs
marchandises.
Des décisions ont été prises pour réduire les taxes sur les marchandises dont la
durée de stockage s’étend sur 4 mois et demi.
A ce jour, les autorités portuaires ont procédé, en partenariat avec les
services douaniers, à l’assainissement de 800 conteneurs dont 56 ont été vendus
et 153 ont été cédés à la Caisse nationale de solidarité sociale (CNSS). Une
deuxième opération de vente des conteneurs se tiendra au début du mois de
septembre 2014.
Le gouvernement tunisien a osé prendre nombre de décisions allant dans le sens
de l’amélioration du rendement des ports et des aéroports également, même si
nous ne nous y étalons pas dans ce papier. Mais il faudrait songer sérieusement
à entamer une nouvelle phase de partenariat public/privé dans la gestion et la
manutention des ports. Les retombées financières seront immédiates et la Tunisie
pourrait faire face à l’exploitation des conteneurs dans un contexte de
concurrence régionale acharnée.
Les opérateurs privés tunisiens pourraient être les partenaires les mieux
indiqués pour assurer ce rôle de relais dans des activités économiques hautement
compétitives. C’est important pour éviter que, à l’instar d’autres pays, des
opérateurs chinois ou encore des ressortissants des pays du Golfe viennent
récupérer la mise.
Autant que les nationaux contrôlent les ports tunisiens en étroite collaboration
avec les autorités publiques, question de souveraineté mais aussi de sécurité en
ces temps où l’on ne sait plus si les navires transportent des marchandises ou
des armes.
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