Si
vous êtes Tunisois de situation modeste, et que vous souhaitiez vous baigner, il
faudrait vous lever à cinq heures du matin, prendre l’autoroute et faire au
moins 60 km pour pouvoir trouver enfin une plage tranquille, entendez par là non
encore fréquentée.
C’est que depuis l’interdiction de la baignade dans les plages des banlieues
nord et sud de Tunis, en raison d’une forte pollution anthropogénique générée
par les rejets industriels et hôteliers, les Tunisois doivent faire une
véritable expédition pour aller soit au Cap-Bon (Nabeul, Kélibia, Maamoura,
Hammamet…), soit dans les villages de Bizerte (Raf Raf, Ghar el Melh, Ras Jebel…).
Pour cela, ils doivent débourser, en plus, le prix fort, environ 50 dinars par
jour pour payer tout juste le carburant, frais du péage, taxe d’entrée aux
plages et frais de location d’un parasol, une table, trois ou quatre chaises.
Et même dans ses endroits, vous ne pouvez en profiter qu’entre 6 heures et 9
heures du matin. A partir de cette tranche d’horaire, toutes les plages
deviennent des sites à problème, voire un calvaire.
Exiguïté des routes
Parmi ces problèmes, figure en bonne place l’exiguïté des routes qui mènent à
ces plages. A partir de 9 heures du matin, l’entrée et la sortie de ces sites
deviennent une véritable galère. A titre indicatif, si vous allez à la plage
Sidi Mekki à Ghar el Melh, vers 11 heures du matin et plus, il faut prendre son
mal en patience et faire la queue sur plus de 10 km et attendre sous un soleil
de plomb plus d’une heure et demie pour y accéder. Il n’est pas très sûr en plus
qu’une fois sur place, vous trouviez un petit coin confortable.
Le mot d’ordre est désormais à la patience, la vigilance sur la route et la
maîtrise des nerfs.
Altercations entre gérants et estivants
Le second problème est manifestement les éternelles altercations qui ont lieu
entre les gérants des plages aménagées et les estivants qui refusent de se payer
le parasol, les chaises et la table. Pour ces derniers, la plage relève du
domaine maritime public et personne ne peut se l’approprier. Un débat lassant
est alors engagé entre les deux parties, débat qui peut parfois dégénérer
jusqu’à nécessiter l’intervention de la police ou de la gendarmerie.
Néanmoins, le problème est réel. Car le cahier des charges en vertu duquel ces
gérants gèrent les plages aménagées les oblige à prévoir, entre deux plages
aménagées, des endroits pour les estivants qui ne peuvent pas ou ne désirent
pas, par conviction, louer les équipements offerts.
Pour un rappel à l’ordre des gérants
Il faut reconnaître que, depuis le soulèvement du 14 janvier 2011, certains
gérants de plages aménagées (une centaine dans tout le pays) se comportent non
pas comme des locataires titulaires de contrats renouvelables et négociables,
chaque année, avec les municipalités mais comme des squatters insolents. D’où
tout l’intérêt de les rappeler à l’ordre et d’intensifier, à cet effet, le
respect du cahier des charges.
Car si rien n’est fait dans ce sens, ces gérants peuvent devenir encombrants et
des ayant-droits peuvent réclamer le droit d’appropriation d’autant plus que le
nombre des infractions relatives au domaine public maritime a atteint des
proportions effrayantes.
Selon Mounir Majdoub, secrétaire d’Etat à l’Environnement, leur nombre s’est
considérablement accru par rapport aux années 2009 et 2010, relevant que de
3.000 infractions ont été enregistrées durant les premiers mois de l’année 2014
alors qu’auparavant on ne constatait que le dixième de ce chiffre.
L’idéal serait toutefois de dépolluer le littoral du Grand Tunis et de mettre en
place une stratégie nationale en faveur des estivants partout où ils se
trouvent, et ce en dotant, toutes les villes, municipalités, villages, quartiers
populaires de piscines et de jardins publics décents.
A bon entendeur.