à Moscou, fermé le 21 août 2014 (Photo : Alexander Nemenov) |
[21/08/2014 10:04:54] Moscou (AFP) A son ouverture en 1990, les Soviétiques y ont fait la queue des heures pour goûter ses hamburgers. Aujourd’hui, le McDonald’s de la place Pouchkine de Moscou garde portes closes et les difficultés du géant du fast food en Russie ne font sans doute que commencer sur fond de tensions autour de l’Ukraine.
Symbole historique de la Perestroïka mais aussi établissement de la chaîne le plus fréquenté au monde, cet immense restaurant fait partie des trois fermés mercredi dans la capitale russe par les autorités sanitaires.
Certains Moscovites se heurtaient jeudi matin aux portes de verre, scellées par de simples bandes de papier portant le tampon de l’Agence de protection du consommateur.
Pendant que quelques employés nettoyaient la terrasse, une jeune femme, téléphone à la main, renvoyait les clients déçus vers le site internet de la chaîne, se refusant à toute autre explication.
La plupart des passants sont de toutes façons déjà au courant. “Vous vivez dans un autre pays?” plaisante Ivan, un retraité assis sur la terrasse du fast food quand on lui demande pourquoi l’établissement est fermé. “Il y a peut-être des problèmes sanitaires, mais mon impression, c’est que c’est lié aux sanctions. Que faire? C’est la guerre”.
Officiellement, l’Agence de protection du consommateur a expliqué avoir constaté de “nombreuses violations des normes sanitaires”. La chaîne risque des amendes dépassant les 10.000 euros et des fermetures atteignant 90 jours pour les restaurants concernés.
McDonald’s, dans un communiqué, a assuré s’activer en vue d’une réouverture “le plus vite possible”, assurant que sa priorité était “de fournir des produits sûrs et de qualité”.
à Moscou, fermé le 21 août 2014 (Photo : Alexander Nemenov) |
Mais les autorités russes ont été à de multiples reprises, y compris depuis le début de la crise ukrainienne, accusées d’employer des motifs sanitaires à des fins de politique étrangère en période de tensions.
Elles viennent en outre de décréter un embargo sur la plupart des produits alimentaires des pays qui la sanctionnent pour l’annexion de la Crimée et son soutien supposé aux séparatistes de l’Est ukrainien. Cette décision ne touche pas McDonald’s, qui se fournit essentiellement auprès de producteurs locaux.
Les restaurants fermés par les autorités, qui avaient déjà mis en garde fin juillet la chaîne, semblent ne pas avoir été choisis par hasard.
Celui de la place Pouchkine est célèbre pour les photos des files d’attente qui ont accompagné son ouverture en plein hiver en 1990, dans les derniers mois d’existence de l’URSS. Un autre établissement fermé se trouve aux pieds des murs du Kremlin, sur la place du Manège.
– Les contrôles se multiplient –
“C’est un signal qui dit que la Russie est prête à frapper directement une entreprise, d’autant que les cibles choisies sont symboliques”, estime Andreï Petrakov, directeur de la société de conseil Restcon.
Outre leur situation et leur histoire, il s’agit d’établissements très fréquentés. “Cela ne fait pas du bien aux affaires du groupe”, ajoute l’expert, interrogé par l’AFP.
Les autorités semblent ne pas avoir décidé d’en rester là. Selon l’agence publique Ria-Novosti, des contrôles étaient en cours jeudi dans l’Oural et la partie européenne de la Russie. D’autres sont prévus la semaine prochaine dans la région de Krasnodar, dans le Sud.
Selon le journal Kommersant, les contrôles sont effectués sur ordre du gouvernement. La chaîne américaine avait déjà été critiquée pour avoir fermé ses restaurants en Crimée après l’annexion de la péninsule par Moscou, invoquant alors des motifs économiques et logistiques.
En difficulté en Asie à cause du scandale de la viande en Chine et en quête d’un nouveau souffle sur le marché américain, McDonald’s a fortement investi en Russie, avec plus de 400 restaurants, dont 160 à Moscou.
Selon l’agence Interfax, son chiffre d’affaires y a augmenté de 18% en 2013 et dépasse un milliard d’euros. Selon les analystes de Morgan Stanley, le pays représente plus de 260 millions d’euros de bénéfice d’exploitation par an.
Sponsor des récents jeux Olympiques d’hiver de Sotchi, la chaîne commence tout juste à se lancer en Sibérie, où elle jugeait jusqu’à récemment ne pas disposer des infrastructures pour s’approvisionner.
Le gouvernement lui avait demandé en vain d’ouvrir en 2012 un restaurant à Vladivostok pour aider au développement de cette ville de l’Extrême Orient.