çoit le ballon le 23 aout 2014 à Dortmund, son club a fait entrer la semaine dernière ses propres sponsors à son capital (Photo : Patrik Stollarz) |
[26/08/2014 11:45:08] Paris (AFP) Faire entrer ses propres sponsors à son capital, comme au Borussia Dortmund la semaine dernière, ouvre une nouvelle voie de financement pour les clubs de football cotés en Bourse, à l’heure du fair-play financier.
Après le groupe de chimie Evonik, déjà actionnaire à hauteur d’environ 10% du Borussia Dortmund (BVB), l’équipementier Puma -filiale du groupe français Kering (ex-PPR)- a annoncé jeudi qu’il comptait participer à l’augmentation de capital du club à hauteur de 5%, tout comme la société d’assurance Signal Iduna, qui donne déjà son nom au stade.
Si les 114,4 millions d’euros maximum ainsi levés sont censés permettre de réduire sa dette, l’essentiel devrait surtout donner au BVB les moyens d’investir sur le marché des transferts, après les départs de ses ex-joueurs-clés Robert Lewandowski cet été et Mario Götze, un an plus tôt, au Bayern Munich.
– Placement à haut rique –
Dépendant des performances de l’équipe, le “sponsoring actionnarial” d’un club coté en Bourse reste toutefois un placement à haut risque, et le panorama du foot en Bourse n’est pas reluisant.
Coté depuis 2000, le BVB a perdu plus de la moitié de sa valeur en 14 ans après son violent décrochage sportif et financier des années 2000. Le finaliste de la Ligue des champions 2013 a toutefois vu son cours rebondir nettement ces dernières années pour atteindre une valorisation d’environ 333 millions d’euros.
Créé en 1992, l’indice boursier des clubs européens Stoxx Football Index a ainsi compté jusqu’à 33 clubs de 17 pays différents, contre 23 aujourd’hui en raison de performances décevantes dues à d’incessantes fluctuations et une rentabilité inférieure à celle du marché.
La motivation des sponsors n’est pas a priori financière. “Ces entreprises savent bien qu’elles ne gagneront potentiellement que très peu d’argent avec la prise de participation en elle-même”, selon l’économiste du sport, Bastien Drut, interrogé par l’AFP.
Le dernier dividende versé par l’Olympique Lyonnais, seul club français coté en Bourse, date de décembre 2009 et n’a pas dépassé 14 centimes par action.
Alors qu’est-ce qui peut motiver les sponsors à entrer au capital d’un club? “Le sponsoring actionnarial repose sur une part d’irrationnel. Tout peut exploser du jour au lendemain à cause d’une blessure ou d’importants départs?, explique à l’AFP Lionel Maltese, spécialiste du sponsoring sportif, en citant les exemples de l’après-Alex Ferguson à Manchester United.
– Décupler la force du partenariat-
Pour l’entreprise sponsor, au-delà d’hypothétiques dividendes, l’intérêt est surtout de “décupler la puissance du partenariat” avec le club, selon M. Drut.
A l’image des supporters ou du stade, les sponsors espèrent “faire parti de l’écosystème du club sur le long terme” contrairement à un club comme Malaga, où le jour où les Qataris partiront, cela sera une terre abandonnée”, explique M. Maltese, professeur associé de la Kedge Business School, à Marseille.
En Europe, l’entrée au capital de plusieurs sponsors d’un même club n’est appliquée pour l’instant qu’en Allemagne. Dortmund copie ainsi la stratégie de son rival, le Bayern Munich, dont les principaux partenaires (Adidas, Audi, et Allianz), présents au capital du club, participent aux orientations stratégiques.
“Pour emprunter de l’argent, cela ne sera plus un problème car des société robustes seront derrière pour apporter toute garantie”, explique M. Maltese.
A l’heure du fair-play financier, progressivement instauré par l’UEFA pour que les clubs européens ne dépensent pas plus d’argent qu’ils n’en génèrent, le “sponsoring actionnarial” fait figure de nouvelle piste de financement pour des modèles très dépendants des droits-télé et longtemps basés sur la plus-value des ventes de joueurs, de produits dérivés et de billets.
Mais si le “modèle Bayern” paraît séduisant, il est “peu probable” que des entreprises souhaitent nouer ce type de partenariats en France, selon les experts.
“Une telle prise de participation ne peut se faire qu’avec des grands clubs, pour lesquels le risque sportif est limité, et de grandes entreprises, capables de prendre le risque de perte en capital”, précise M. Drut.
Avec les déficits structurels et le manque de rayonnement international dont souffre la Ligue 1, les clubs français n’offrent pas aux potentiels actionnaires la publicité et la rentabilité qu’ils recherchent.
D’où l’ironie: Puma entre au capital de Dortmund, alors que sa maison-mère, Kering est contrôlée indirectement par la famille de François Pinault, l’actionnaire majoritaire du Stade Rennais.
Les raisons sont aussi “culturelles”, selon M. Maltese. Si l’OL est détenu à 29,87% par Jérôme Seydoux, propriétaire du Groupe Pathé – contre 34,17% par la holding du président Jean-Michel Aulas – nulle trace de Pathé au côté d’Adidas ou de Hyundai dans la galaxie des sponsors du club cette saison.