à Paris (Photo : Martin Bureau ) |
[01/09/2014 18:03:35] Paris (AFP) Yves Carcelle, PDG de Louis Vuitton de 1990 à 2012, sous l’impulsion duquel la société au monogramme est devenue la première marque de luxe au monde, est décédé à l’âge de 66 ans.
L’ancien dirigeant, qui avait été nommé à la tête de la Fondation Louis Vuitton -consacrée à l’art contemporain- après avoir quitté la direction de la marque française, est mort dimanche “des suites d’une longue maladie”, a annoncé lundi LVMH.
“Infatigable voyageur, Yves était à l’image de la maison qu’il a si longtemps incarnée: un pionnier”, a déclaré Bernard Arnault, PDG de LVMH, dans un communiqué publié par le groupe. “Toujours curieux, passionné, en mouvement, il était l’un des meneurs d’hommes les plus inspirants qu’il m’ait été donné de rencontrer.”
La ministre de la Culture Fleur Pellerin a salué de son côté l'”un des plus grands ambassadeurs du savoir-faire et de l’élégance à la française”, un “précurseur et visionnaire (qui) a révolutionné le milieu du luxe et de la haute couture”.
Quand Yves Carcelle est arrivé à la tête de Louis Vuitton, alors marié depuis trois ans au sein de LVMH avec la maison de champagne Moët & Chandon et le producteur de cognac Hennessy, le fameux monogramme LV était avant tout associé à la maroquinerie et à un modèle encore artisanal.
à Sydney le 2 décembre 2011 (Photo : Torsten Blackwood) |
Vingt-deux ans plus tard, au moment de son départ, Louis Vuitton était la locomotive de LVMH. La marque avait décuplé ses ventes, conquis le marché asiatique et s’était élargie aux principaux secteurs du luxe, d’abord les vêtements et les chaussures à la fin des années 1990, puis l’horlogerie et la joaillerie lors de la décennie suivante.
Quelques mois avant le départ d’Yves Carcelle, la marque, créée en 1854 et désormais présente dans une cinquantaine de pays avec plus de 450 magasins, annonçait même son intention de lancer son premier parfum, toujours en préparation.
En novembre 2013, la société valait, selon les chiffres de Forbes, 28,4 milliards de dollars (21,6 milliards d’euros) et représentait 9,4 milliards de dollars (7,15 milliards d’euros) de ventes.
“Il y a le luxe avant Carcelle et le luxe après Carcelle”, avait estimé le président du groupe Printemps, Paolo de Cesare, lors du départ en novembre 2012 d’Yves Carcelle de la direction.
Entre autres symboles de la diversification de la marque, le PDG avait recruté en 1997 le créateur Marc Jacobs comme directeur artistique, pour dessiner la première ligne de prêt-à-porter de Louis Vuitton.
– De l’artisanal à l’international –
Yves Carcelle “a été un dirigeant charismatique et visionnaire qui a construit le modèle Vuitton, c’est-à dire plonger une marque de luxe dans l’univers de la mode pour la rendre plus désirable”, estime Serge Carreira, maître de conférence “Mode et luxe” à Sciences-Po Paris.
Louis Vuitton avait commencé à évoluer depuis les années 1970 avec en particulier l’ouverture de boutiques au Japon, mais c’est Yves Carcelle qui “a su transformer ça d’une échelle artisanale à celle d’une dimension internationale tout en gardant une dimension essentielle: celle du produit”, souligne M. Carreira.
Ainsi, tout en multipliant les nouvelles catégories de produits, la stratégie engagée par Yves Carcelle a tracé une ligne nette avec la grande distribution, en limitant la disponibilité de la marque à ses propres boutiques et en refusant le principe de soldes.
Auparavant passé par la direction du spécialiste du linge Descamps, Yves Carcelle était aussi actif dans les mondes de la voile, en gérant notamment le partenariat entre Louis Vuitton et la Coupe de l’America, et du vin.
Le PDG avait laissé en novembre 2012 la place à l’Espagnol Jordi Constans, avec qui il partageait déjà la présidence. Son successeur avait très vite été remplacé par le Franco-Américain Michael Burke, actuel dirigeant de la marque.
Son départ, suivi en 2013 par celui de Marc Jacobs, avait marqué la fin d’une période au sein de Louis Vuitton.
Cependant, plutôt qu’une problématique de “l’après-Carcelle”, qui serait spécifique à Louis Vuitton, “c’est la fin d’une époque tout court pour le luxe avec une évolution des envies des consommateurs, notamment en Asie”, nuance Serge Carreira.