Avec l’adoption, dans le cadre de la loi de finances complémentaire 2014, de deux articles autorisant la levée du secret bancaire et la confiscation des biens des terroristes, la Tunisie vient de franchir, du moins sur le plan législatif, d’importants pas sur la voie de la transparence financière.
Zoom sur des avancées majeures en matière de lutte contre la corruption et d’évasion fiscale.
En attendant l’adoption, prochainement, comme l’avaient promis les députés de l’Assemblée nationale constituante (ANC), de la loi sur la lutte contre le terrorisme et le blanchiment d’argent, la Tunisie va disposer, au plus tard dans un mois, de tout un arsenal juridique destiné à lutter contre tous les crimes économiques (transfert illégal de fonds, fraude fiscale, détournements de fonds, blanchiment…) et à adopter un système d’information devant dissuader l’intervention humaine et assurer la traçabilité.
Mais quid de l’application?
Empressons-nous de signaler ici que le plus difficile et le plus important demeure, néanmoins, l’application effective de ces textes et la disponibilité, à cette fin, d’une véritable volonté politique.
A titre indicatif, la loi sur la levée du secret bancaire n’est pas nouvelle. Elle a été proposée, plusieurs fois au temps de Ben Ali, sans jamais aboutir.
Après la révolution, elle fut promulguée certes mais son application était assortie de certaines conditions. Ainsi, banques, la poste, assureurs, intermédiaires en Bourse sont tenus de communiquer aux services du fisc, dans un délai de dix jours et suite à une demande écrite, la justification des numéros des comptes ouverts et les données relatives à la souscription des contrats de versement de rente ou de capital (assurance vie…).
Plus simplement, la levée du secret bancaire sera automatique en cas de défaut de déclaration et soumise à l’accord d’un juge en cas de contrôle fiscal approfondi, dans un délai de 72 heures.
Officiellement, la Tunisie s’engage avec la levée du secret bancaire sur la voie de la transparence totale et rejoint un grand nombre de pays qui l’ont adoptée.
La Tunisie s’inscrit dans une cadre multilatéral de transparence
Il faut dire que la levée du secret bancaire, tout comme la confiscation des biens des terroristes condamnés par la justice constituent d’importantes avancées sur la voie de l’amélioration, à l’international, de l’image de la Tunisie en tant que hub financier régional.
Ces textes présentent, justement, l’avantage d’être en harmonie avec les conventions signées à cette fin par la Tunisie sur la probité, l’intégrité et la transparence dans la conduite des affaires et de la finance internationales, et sur la croissance verte. Des conventions qui consacrent la probité, l’intégrité et la transparence dans la conduite des affaires et de la finance internationales.
Parmi celles-ci figurent en bonne place les adhésions aux Déclarations de l’Organisation de coopération et de développement (OCDE) sur l’évasion fiscale et sur l’investissement international et les entreprises multinationales.
Selon Pascal Saint Amans (France), directeur du Centre de politique et d’administration fiscale (CTP) à l’OCDE, l’adhésion à ces conventions permet aux autorités tunisiennes «d’accéder à toutes les informations sur les investisseurs étrangers et sur les Tunisiens en fraude du fisc».
Ces mécanismes ont, également, le mérite de favoriser la lutte, avec l’efficience requise, contre la corruption, la restitution d’une partie des fonds transférés illégalement à l’étranger et l’amélioration de l’image de marque de la Tunisie en matière de transparence, de bonne gouvernance et d’intégrité.
Pour mémoire, la Tunisie est le troisième pays du continent africain, après l’Afrique du Sud et le Ghana, à signer les Conventions de l’OCDE. Depuis qu’elles ont été ouvertes à la signature de tous les pays en juin 2011, elles comptent 39 adhérents.
Et pour ne rien oublier, rappelons que tous ces textes et adhésions à ces conventions ont eu lieu après le soulèvement du 14 janvier 2011, et ce en dépit de l’émergence, au temps de la Troïka, du terrorisme et des assassinats politiques. Il s’agit à la limite d’un exploit de la transition démocratique, exploit qui doit être jugé, bien évidemment, sur le degré de son application.