Le consommateur américain, espoir d’une économie mondiale qui cale?

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çues par les industries manufacturières (Photo : Joe Raedle)

[03/09/2014 15:16:36] Paris (AFP) Le consommateur américain est-il, une fois encore, le dernier espoir de l’économie internationale? C’est ce que se demandent les économistes au moment où les moteurs de croissance ont des ratés un peu partout dans le monde.

Il n’est qu’à voir les données publiées mercredi.

D’un côté, les Etats-Unis annoncent un bond record en juillet des commandes reçues par les industries manufacturières (+10,5% sur un mois).

De l’autre la société Markit, qui sonde chaque mois les entreprises, annonce que l’activité s’est encore contractée en août en France et en Italie, tandis que la croissance en zone euro marque le pas.

Jusqu’à la robuste Allemagne qui peine, sur fond de crise ukrainienne: l’économie continue à croître, mais le baromètre de Markit y est tombé au plus bas depuis 10 mois.

Paul Krugman, Prix Nobel d’économie, se disait même “terrifié” face aux perspectives économiques européennes, dans un billet publié récemment sur son blog.

Troisième puissance économique mondiale, le Japon a lui subi au deuxième trimestre un choc sévère, dû à une augmentation de la TVA. Le PIB s’est contracté de 1,7% entre avril et juin !

Jusqu’ici, rappelle Isabelle Job-Bazille, économiste en chef de Crédit Agricole, “on comptait beaucoup sur des relais de croissance en provenance des pays émergents”.

“Or ils font défaut”, souligne-t-elle.

Le Brésil, l’Afrique du Sud ou la Russie sont dans des situations délicates, et la Chine, après une croissance de 7,7% en 2012 et en 2013 –un niveau plus vu depuis 1999–, vise 7,5% pour 2014: ce serait le plus faible taux de croissance du géant asiatique depuis près d’un quart de siècle.

Le Brésil vient d’entrer en récession, et pour les autres pays d’Amérique latine et des Caraïbes, les prévisions de croissance pour 2014 ont été revues en baisse déjà trois fois par un organisme spécialisé dépendant de l’ONU, la Cepal.

La Russie se voit elle “au bord de la récession”, selon le responsable des prévisions du ministère de l’Economie, Oleg Zassov, cité par les agences russes, et la banque centrale d’Afrique du Sud prévoit une croissance de 1,7% pour son pays en 2014.

– ‘Dernier ressort’ –

Bref, “il y a aujourd’hui un peu cette idée, qui n’est pas nouvelle, qu’en dernier ressort on pourra toujours compter sur le consommateur américain et dans une moindre mesure britannique”, analyse Mme Job-Bazille.

Les performances des économies américaine et britannique sortent du lot, avec des PIB en nette progression.

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çues par les industries manufacturières (Photo : Joe Raedle)

Au-delà de ces indicateurs, “il y a du mieux en termes d’emploi (dans ces deux économies), des taux très bas, des effets de richesse” liés aux prix de l’immobilier, qui incitent les ménages à consommer, explique Mme Job-Bazille.

Mais pour Ludovic Subran, économiste en chef de l’assureur Euler Hermes, le risque existe que “la croissance américaine reste seulement américaine”, car elle n’est “pas encore assez forte pour entraîner en dehors des Etats-Unis” et de leurs voisins immédiats (Canada, Mexique).

Il donne l’exemple du boom du gaz de schiste, qui ne s’exporte pas, ou à peine, bénéficiant ainsi seulement aux Américains.

Pour M. Subran, les futurs relais de croissance seront plutôt les consommateurs des pays émergents, à commencer par de petites économies déjà avancées comme la Malaisie par exemple, mais aussi la commercialisation de services aujourd’hui qualifiés d’informels (partage de maisons, de voitures, de machines etc.) ou encore l’exploitation de nouvelles sources de matières premières comme les terres rares.

Or juge-t-il, l’Europe, trop “centrée sur elle-même et ses ajustements, ses points de pourcentage de croissance ou de déficit”, n’est pas la mieux placée pour bénéficier de ces perspectives: “Elle est dans une décennie où il lui faut manger son pain noir”.

Pour Mme Job-Bazille, “on atteint les limites de notre trajectoire européenne”, inspirée de ce qu’elle appelle le “mercantilisme à l’allemande”, c’est-à-dire une course aux parts de marché et aux gains de compétitivité pour gagner des débouchés à l’international, au détriment de la demande intérieure.