érateur français de télécoms français Orange, le 24 février 2014 à Lille (Photo : Philippe Huguen) |
[16/09/2014 17:28:19] Paris (AFP) En annonçant son intention de croquer l’opérateur espagnol Jazztel, le français Orange réplique à l’expansion du britannique Vodafone sur ce marché et s’implique dans la bataille de consolidation des télécoms en cours en Europe.
Le groupe hexagonal, pour qui l’Espagne est le deuxième marché, a déposé mardi une offre publique d’achat amicale sur Jazztel à 13 euros par action, qui valorise l’opérateur espagnol 3,4 milliards d’euros.
“Marier Orange et Jazztel, c’est créer un champion du marché espagnol”, a souligné le Pdg d’Orange Stéphane Richard au cours d’une conférence téléphonique mardi.
Orange mise sur la convergence sur le marché espagnol, c’est-à-dire des offres qui combinent mobile, fixe et internet haut débit, et ont l’avantage de regonfler les marges des opérateurs. En s’alliant avec Jazztel, bien placé dans le haut débit et la fibre en Espagne, Orange compte faire du nouvel ensemble le deuxième opérateur haut débit et le troisième sur le mobile dans le pays.
L’opérateur français verrait ainsi sa part de marché en Espagne passer de 25% à 28% sur le mobile et de 16% à 28% sur le fixe.
L’opérateur britannique de télécommunications Vodafone s’était offert en mars le câblo-opérateur espagnol Ono pour 7,2 milliards d’euros, ce qui lui a permis de se renforcer dans le haut-débit, et “Orange veut faire la même chose”, souligne James Allison, analyste senior chez IHS Technology.
“Le processus de consolidation dans le secteur est un processus normal. Il faut le voir comme quelque chose qui va se poursuivre en Europe”, a observé le ministre de l’Industrie espagnol José Manuel Soria interrogé sur la radio nationale espagnole mardi, suggérant que Madrid voyait l’opération d’un bon oeil.
Stéphane Richard a souligné de son côté “le soutien sans réserve de l’Etat français –principal actionnaire d’Orange — à cette opération”.
Orange profite ainsi du changement de position des autorités européennes de la concurrence, qui privilégiaient auparavant un marché très concurrentiel afin de faire baisser les prix pour les consommateurs, parfois au détriment des marges et des investissements des opérateurs.
“La consolidation en Europe a longtemps été un tabou. Mais on voit maintenant que nous avons été un peu loin en termes de concurrence”, c’est pourquoi Orange s’est décidé à saisir l’occasion d’acquérir Jazztel, souligne une source proche de l’opérateur français.
“la plus créatrice de valeur”
Signe d’un changement d’époque, la Commission européenne avait donné son feu vert en septembre 2013 au rachat par Vodafone du câblo-opérateur allemand Kabel Deutschland, jugeant leurs actifs complémentaires et estimant que cette union ne nuirait pas à la concurrence.
La Commission a ouvert en revanche une enquête approfondie début mai sur le rachat de l’opérateur néerlandais Ziggo, valorisé près de 10 milliards de dollars, par le groupe américain Liberty Global.
Liberty Global a déjà racheté le britannique Virgin Media l’an dernier pour 23 milliards de dollars.
America Movil, le groupe du magnat mexicain des télécoms Carlos Slim, est de son côté monté en juillet au capital de Telekom Austria, dont il détient à présent 51%.
Le milliardaire avait dû renoncer à son OPA hostile sur l’opérateur historique néerlandais KPN, en raison notamment d’un blocage par une fondation néerlandaise, actionnaire du groupe.
Et en France, l’opérateur mobile SFR est en cours d’absorption par le câblo-opérateur Numericable/Altice.
Le patron d’Orange estime qu’une consolidation du marché du mobile est toujours souhaitable en France, mais comme les conditions ne sont pas réunies à ce stade, malgré plusieurs tentatives, il pourrait continuer son expansion à l’étranger.
Orange avait aussi examiné la possibilité d’un rachat de Yoigo, quatrième opérateur mobile en Espagne, mais a jugé la combinaison Orange/Jazztel “la plus créatrice de valeur”, a noté Gervais Pelissier, directeur exécutif Europe de l’opérateur.
Cependant, si son offre sur Jazztel réussit, Orange pourrait réexaminer plus tard le projet d’acquisition de Yoigo, juge James Allison.
“Je m’attends à ce que le mouvement de consolidation se poursuive à travers l’Europe en combinant le mobile et le haut-débit”, a souligné l’analyste.