BNP Paribas : Baudouin Prot va quitter prématurément la présidence de la banque

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Hotel Matignon le 25 septembre 2013 (Photo : Thomas Samson)

[23/09/2014 21:52:44] New York (AFP) Baudouin Prot, figure emblématique de BNP Paribas, va quitter prématurément la présidence de la banque française, près de trois mois après une amende de près de 9 milliards de dollars infligée à l’établissement pour violations d’embargos américains.

M. Prot, 63 ans, a informé de sa décision des membres du conseil d’administration de la première banque française en termes de capitalisation boursière, ont indiqué à l’AFP mardi des sources proches du dossier.

Cette instance, chargée de valider les orientations stratégiques de l’établissement, va se réunir ce vendredi pour entériner son départ.

Dans la forme, Baudouin Prot va remettre officiellement sa démission au conseil qui l’acceptera, selon les sources qui ont requis l’anonymat.

Son départ devrait être effectif au 1er décembre, selon les deux sources, soit trois ans avant la fin de son mandat.

M. Prot avait en effet été reconduit en mai à son poste jusqu’en 2017 lors de l’assemblée générale des actionnaires.

Sa démission a été présentée mardi au comité de gouvernement d’entreprise et des nominations du groupe, une instance de gouvernance interne.

Jean Lemierre, 64 ans, ancien directeur du Trésor et son proche conseiller, qui a négocié l’accord avec les autorités américaines, devrait sauf coup d’éclat le remplacer, selon une source proche du dossier.

Le départ de M. Prot avait été évoqué en plein milieu de l’affaire de violations d’embargos qui a écorné la réputation de la banque.

Cet énarque et inspecteur des finances a été directeur général de l’établissement financier de 2003 à 2011, période au cours de laquelle la banque a enfreint la loi américaine en effectuant des paiements en dollars vers des pays (Cuba, Soudan et Iran) sous embargo.

Ces infractions ont valu à BNP Paribas de lourdes sanctions aux Etats-Unis, dont une amende record de 8,9 milliards de dollars (6,6 milliards d’euros).

– Meurtri –

S’il n’a pas personnellement été mis en cause par les autorités américaines, M. Prot avait été très affecté par cette affaire, selon des sources internes.

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à Paris le 5 juin 2014 (Photo : Martin Bureau)

Les tensions avec l’autre homme fort de la banque, le directeur général, Jean-Laurent Bonnafé, étaient montées d’un cran, avaient confié à l’époque à l’AFP des sources internes.

M. Prot a présenté lui-même sa démission et n’a pas été poussé vers la sortie, ont assuré à l’AFP mardi des sources proches.

“C’est une décision personnelle. Après avoir accompagné le groupe, il a décidé de prendre du recul et de céder la place à des énergies nouvelles”, a dit à l’AFP une d’elle.

Dans l’affaire de violations d’embargos, une douzaine de banquiers, dont le directeur général délégué, Georges Chodron de Courcel, avaient été nommément mis en cause par les autorités américaines.

Une dizaine d’entre eux, dont cinq hauts dirigeants, liés aux opérations litigieuses ont en outre quitté la banque ces derniers mois.

BNP Paribas, qui a reconnu les faits, a aussi été contraint de renforcer ses dispositifs de surveillance aux Etats-Unis, où elle possède les réseaux bancaires Bank of the West et First Hawaiian Bank.

M. Prot a passé quasiment toute sa carrière au sein de BNP Paribas qu’il a rejointe en 1983.

Il a transformé l’établissement en affichant haut ses ambitions internationales.

Sous sa férule, BNP Paribas a multiplié les acquisitions. Elle s’est ainsi offert la sixième banque italienne BNL en 2006, Fortis Bank en 2009 en Belgique et BGL au Luxembourg.

BNP Paribas s’est aussi renforcée dans les pays émergents et notamment en Europe de l’est.

En dix ans, les revenus du groupe et ses effectifs ont triplé.

M. Prot peut aussi se targuer d’avoir permis à la banque de traverser la crise financière de 2008 sans cicatrice alors que la plupart des grandes banques américaines et européennes étaient engluées dans les “subprime”.

BNP s’est payée le luxe d’enregistrer coup sur coup un bénéfice net de 3 milliards d’euros en 2008 et de 5,8 milliards de d’euros en 2009, soit presque doublé en un an.

La banque avait été une des premières grandes institutions à fermer en août 2007 deux fonds exposés à la crise des crédits immobiliers à risque subprime, à l’origine de la crise.