éphane Le Foll, le 15 septembre 2014 à Rennes (Photo : Damien Meyer) |
[24/09/2014 08:45:14] Paris (AFP) Les légumiers bretons sont reçus mercredi matin au ministère de l’Agriculture, dont ils espèrent une réponse rapide face à l’effondrement des cours qui suscite la colère paysanne et l’inquiétude d’ouest en est dans le pays.
La délégation est arrivée à 9H30 rue de Varenne pour entamer aussitôt la discussion avec le ministre Stéphane Le Foll, qui s’est voulu rassurant en promettant des “mesures concrètes et rapides, à la hauteur des enjeux” en priorité pour les exploitations les plus vulnérables.
Mardi en fin de journée une cinquantaine de producteurs ont déversé des tonnes de pommes de terre aux abords de Saint-Malo (Ille-et-Vilaine) “en soutien aux responsables” des coopératives de la région en route pour Paris.
“Notre chiffre d’affaires, depuis plus d’un an, a baissé de 30% à cause des conditions climatiques, de la consommation qui baisse, des charges qui augmentent et de l’embargo russe”, a résumé Jean-Luc Moulin, trésorier de “Terres de Saint-Malo” une des coopératives (85 producteurs) représentée au ministère avec celles de Saint-Pol de Léon (Finistère) et l’Union des coopératives de Paimpol et Tréguier (Côtes-d’Armor).
Les producteurs d’artichauts et de choux-fleurs se sentent lésés dans le dispositif d’aides européennes mis en place face à l’embargo russe, affirmant qu’il se résume à 23 centimes par exploitant.
Plus tard dans la soirée de mardi ce sont des exploitants de Lorraine qui ont allumé de dizaines de feux de paille symboliques pour attirer l’attention des pouvoirs publics dont ils dénoncent “l’autisme”: “C’est le prélude à ce qui va se dérouler dans les prochaines semaines: ou il y aura une réponse du gouvernement, ou alors il y aura des feux partout en France, mais cette fois pas pacifiques”, a menacé le président départemental du syndicat agricole en Meurthe-et-Moselle, Luc Barbier.
– ‘L’exaspération grandit’ –
ée par des agriculteurs en colère, le 20 septembre 2014 dans le Finistère (Photo : Fred Tanneau) |
Surtout, a prévenu le responsable syndical, la colère monte: “on essaie de canaliser les velléités des agriculteurs, mais on n’y arrivera pas longtemps” a-t-il lancé, après le coup de sang des producteurs d?artichauts et de choux-fleurs à Morlaix (Finistère) qui ont incendié la semaine dernière le centre des impôts et la mutualité agricole.
“Nous ne cautionnons pas, mais nous pouvons expliquer”, juge-t-il.
Face au feu qui couve, le syndicat majoritaire, la FNSEA, essaie de reprendre l’initiative: son président, Xavier Beulin, demande rendez-vous au Premier ministre Manuel Valls après les manifestations paysannes de Morlaix (Finistère) et à la veille de réunir ses fédérations jeudi à Paris.
“Le coup de colère d’agriculteurs du Finistère nous interroge tous”, écrit M. Beulin qui évoque “l’exaspération qui grandit” dans une lettre à M. Valls que l’AFP a consultée.
La fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) réunit son réseau jeudi à Paris alors que ses branches départementales se montrent remuantes.
Pour son patron, l’embargo russe décrété en août contre les produits agroalimentaires européens n’a fait “qu’accentuer les difficultés de filières déjà fragilisées par des prix” trop bas et le manque de compétitivité: “Depuis des mois”, écrit-il, son organisation alerte le gouvernement “sur le besoin de simplifier les normes, d’alléger les contraintes et de soutenir l’investissement et la modernisation des exploitations”.
“Dans cette situation d’urgence et d’instabilité, je sollicite un rendez-vous afin de vous présenter nos priorités pour affronter cette crise économique, sociale et morale des campagnes françaises”, écrit-il.
Devant les Jeunes agriculteurs au début du mois, Manuel Valls, très applaudi, avait joué l’apaisement en promettant notamment l’amendement d’une directive nitrates devenue le symbole du “mille-feuille réglementaire” asphyxiant fréquemment dénoncé par le monde paysan.
Un producteur d’artichauts de Saint-Pol de Léon, Jean-Pierre Coroller, 57 ans, dans les champs depuis l’âge de 13 ans expliquait mardi à l’AFP qu’il perd de l’argent “tous les jours”: “Il faudrait que nos charges diminuent, on n’en peut plus. Et puis quand on a la chance de faire une année un peu meilleure, on nous surtaxe”.
“Jamais je n’ai jamais connu une crise comme celle-ci”, affirme-t-il.