Birmanie : la révolution numérique est en marche après des années d’isolement

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à la conduite pour éviter les embouteillages (Photo : Soe Than WIN)

[28/09/2014 12:39:09] Rangoun (AFP) Après des décennies d’isolement, les Birmans commencent enfin à profiter de la révolution numérique, bénéficiant même d’un parfum local grâce à des applications déjouant les embouteillages de Rangoun ou simulant leur sport national préféré.

Surfer sur internet a été pendant longtemps synonyme de patience et d’ingéniosité pour contourner, dans des cafés internet clandestins, les entraves aux télécommunications imposées par l’ancienne junte militaire dissoute en 2011.

Mais ces restrictions ont été en grande partie levées, les prix ont largement baissé, et les transports en commun des grandes villes sont remplis de Birmans le nez rivé sur leur smartphone connecté à internet.

De grands noms de la Toile, Facebook, Viber ou Instagram, se sont vite développés sur un marché en pleine expansion. Et les entrepreneurs locaux ne sont pas en reste.

“Il y a tellement de choses que je veux faire. J’y pense non pas comme à une entreprise mais comme à un moyen de trouver des solutions à mes problèmes”, explique Ei Maung, en présentant son application dédiée à la circulation dans une voiture avançant tant bien que mal dans les rues embouteillées de la principale ville du pays.

“A Rangoun, les trajets domicile-travail sont pires que mauvais. C’est horrible. Vous perdez d’innombrables heures à faire la queue”, poursuit-il.

Son application “Cyantra : Crazy Yangon Traffic” permet depuis juin aux utilisateurs de smartphones de partager les problèmes et d’être prévenus des obstacles éventuels, dans une ville qui subit les effets secondaires de l’assouplissement des restrictions à l’importation de voitures.

Il y a seulement trois ans, 1% de la population avait accès au web, mais le nombre d’internautes a depuis explosé.

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équipe de Bindez une entreprise locale qui développe une un meotuer de recherche compatible avec le zawgyi (Photo : Ye Aung Thu)

Depuis samedi, le norvégien Telenor vend des cartes SIM à 1.500 kyats (1,5 dollar) à Mandalay, deuxième ville du pays, avant un lancement plus large, emboîtant le pas au qatari Ooredoo, qui propose ses cartes au même prix depuis août. Une révolution comparé aux 3.000 dollars sous la junte.

Selon les estimations, 25% des habitants ont désormais accès à internet et la Fédération informatique birmane prévoit que d’ici trois ans la moitié de la population, soit plus de 25 millions de personnes, sera connectée.

– Grâce aux smartphones –

Mais cet accès se fera surtout grâce à des smartphones bon marché, contrairement à l’Occident où internet s’est d’abord développé sur les ordinateurs, note David Madden, dont le groupe Code of Change assiste les développeurs en herbe birmans.

“Les gens vont pouvoir se payer une seule chose et ils vont vouloir que cette chose fasse beaucoup, souligne-t-il. C’est la chose que vous voulez dans votre poche, quand vous êtes dans un bus coincé dans les bouchons.”

Alors que Facebook domine l’internet birman, la version de Google en langue birmane, qui a un alphabet spécifique, a du mal à séduire. Le site utilise en effet une police de caractère standardisée (unicode) alors que nombre de sites en birman utilisent la police de caractère locale, zawgyi, et sont donc illisibles par le moteur de recherche.

Une situation que tente d’exploiter Bindez, entreprise locale créée par un ancien de Google, qui développe un moteur de recherche compatible avec zawgyi.

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à Rangoun, le 26 septembre 2014 (Photo : Ye Aung Thu)

L’explosion du secteur numérique fait également une place aux passions locales, des horoscopes personnalisés à une application qui permet, grâce à un avatar en forme de hibou, de pratiquer de son fauteuil le chinlon, sport traditionnel joué avec une balle de rotin tressé.

Et si les connexions restent souvent douloureusement lentes, ces entrepreneurs sont désormais confrontés à la même question que leurs homologues du monde entier : comment transformer les clics en argent.

Dans un pays où la majorité de la population n’a ni carte bancaire ni banque, l’utilisation des téléphones portables comme moyen de paiement, en prélevant une somme sur une carte téléphonique prépayée, pourrait être une solution.

L’éditeur d’une bande dessinée populaire, Putet, s’est lancé dans l’expérience, proposant un accès illimité à des milliers de dessins pour 495 kyats par mois (0,40 euro).

Après la chute des ventes papier ces dernières années, ses 8.000 abonnés en ligne sont désormais plus nombreux que ses lecteurs traditionnels. Et même si Putet ne fait toujours pas de bénéfices, “d’une certaine façon, l’application l’a sauvé”, souligne l’éditeur Aung Chit Khin.