Les reventes de logements sont en recul de 5,3% sur un an, les promesses de ventes en baisse de 2,2%. (Photo : Joe Raedle) |
[01/10/2014 08:54:08] Washington (AFP) Maillon faible de la reprise économique américaine, le marché immobilier aux États-Unis a récemment donné de nouveaux signes de faiblesse qui divisent les analystes.
En août, quasiment tous les indicateurs immobiliers sont tombés dans le rouge. Les reventes de logements sont en recul de 5,3% sur un an, les promesses de ventes en baisse de 2,2%. Les prix ont accusé en juillet leur 3e déclin mensuel consécutif, selon l’indice Case-Shiller. Même les ventes de maisons neuves, en hausse à deux chiffres l’année dernière, ont ralenti leur progression (+2% sur huit mois).
“La reprise du secteur immobilier reste lente”, déplore depuis des mois la Réserve fédérale (Fed).
Paul Diggle, analyste pour Capital Economics, reconnaît que “récemment, le marché immobilier a été le maillon faible de la reprise et n’a guère contribué à la croissance”. Mais, interrogé par l’AFP, cet économiste spécialisé dans ce secteur de l’économie américaine, assure qu’il y a “toutes les raisons pour envisager des perspectives favorables”.
Ce n’est pas l’avis de Keith Jurow, qui joue régulièrement les Cassandre dans sa note immobilière Capital Preservation Real Estate Report: “il n’y a pas de reprise de l’immobilier. C’est une illusion et totalement artificiel !”, assure-t-il à l’AFP.
Selon lui, la hausse des stocks de maisons à vendre et un nombre élevé de saisies immobilières non encore soldées –notamment dans le nord-est du pays–, vont faire encore baisser les prix. “Les prix sont loin du pic” qu’ils avaient atteint avant la crise “et je ne pense pas qu’ils y reviendront jamais”, lance-t-il, affirmant que “dans un an, le tableau sera bien pire qu’il n’apparaît actuellement”.
Les prix moyens au niveau national demeurent de 11% en dessous du sommet atteint début 2007 à la veille de l’éclatement de la bulle immobilière, selon l’indice Case-Shiller.
“Aujourd’hui beaucoup de gens qui avaient retardé la mise en vente de leurs maisons, les mettent sur le marché en même temps, vous pouvez voir ce que cela fait sur les prix”, ajoute M. Jurow.
– Fardeau de la dette étudiante –
D’autres s’interrogent sur les séquelles profondes de la crise financière. Les conditions d’emprunts plus sévères, le manque de croissance des salaires et le fardeau de la dette étudiante ont coupé les ailes des primo-accédants à la propriété.
“L’argent dépensé sur les échéances d’emprunts étudiants ne peut pas l’être sur l’achat d’une maison”, a récemment dénoncé la numéro deux du Trésor, Sarah Raskin relevant que le taux de formation de jeunes foyers aux Etats-Unis était tombé de moitié par rapport à son niveau historiquement haut de 2006. Un tiers des personnes âgées entre 18 et 36 ans vivent encore chez leurs parents, en partie faute de revenus suffisants ou d’emploi.
Le fardeau de la dette étudiante n’inquiète pourtant pas l’expert de Capital Economics. “Cela fait un moment déjà que ces échéances de prêts étudiants sont élevées et je ne pense pas que d’avoir dépassé la barre du millier de milliards de dollars d’emprunts empêche les jeunes d’accéder à la propriété”.
Selon Paul Diggle, la baisse des prix est bienvenue car elle devrait doper les ventes: “on évite un risque de surévaluation, au moins à court terme”, se réjouit-il après la hausse à deux chiffres de 2013.
Les perceptives d’un relèvement des taux d’intérêts par la Fed qui se répercutera sur les prêts immobiliers ne le perturbent guère plus. A 4,20% en moyenne aujourd’hui, le prêt à taux fixe sur 30 ans, référence sur le marché américain, pourrait monter à 6% dès 2016, ce qui reste historiquement abordable, selon lui. “Vu le renforcement de l’économie, le bas taux de chômage, le taux de croissance décent … il y a toutes les raisons pour des perspectives favorables du marché immobilier”, assure-t-il.
En attendant, la conjoncture a été très porteuse pour les investisseurs dans la construction d’immeubles collectifs et le marché de la location est en plein boom. “Il y a un temps pour acheter et un temps pour louer”, conclut Keith Jurow. “Moi, maintenant, je loue. Qu’y a-t-il de mal à cela ?”.