Est (Photo : Eric Piermont) |
[07/10/2014 04:11:14] New York (AFP) Le laboratoire français Sanofi est dans la tourmente: des soupçons de pots-de-vin secouent ses filiales au Moyen-Orient et en Afrique de l’Est sur fond d’enquêtes sur les pratiques des groupes pharmaceutiques dans les pays émergents, leur nouvel eldorado.
“Sanofi a reçu des allégations anonymes concernant des actes répréhensibles liés à des paiements inappropriés en faveur de professionnels de santé dans le cadre de la vente de produits pharmaceutiques”, écrit dans un communiqué le groupe français.
Ces dessous-de-table auraient été versés entre 2007 et 2012 pour s’attirer les faveurs des professionnels de santé, explique Sanofi sans donner davantage de détails.
Le laboratoire en aurait aussitôt informé les autorités américaines – le département de la Justice (DoJ) et le gendarme de la Bourse (SEC)-.
Ces dernières peuvent entamer des poursuites pour tout acte ou tentative de corruption dans le cadre de la loi américaine sur la corruption à l’étranger (FCPA) des citoyens et des entreprises américaines ou non américaines.
Sanofi ayant des activités aux Etats-Unis et des instruments financiers s’échangeant sur le New York Stock Exchange (NYSE), le DoJ et la SEC sont compétents.
“Sanofi prend ces allégations au sérieux et ne tolère pas les actes répréhensibles, ne serait-ce que d?un seul de ses employés”, a réagi Dante Beccaria, responsable juridique auprès du groupe, cité dans le communiqué.
“Sanofi attend de l?ensemble de ses collaborateurs qu?ils se conforment à ses politiques ainsi qu?à l?ensemble des lois et réglementations” en la matière, ajoute le responsable.
“L’enquête est en cours et devrait prendre du temps car les accusations remontent à il y a sept ans”, ajoute Sanofi, qui a recruté le cabinet d’avocats new-yorkais Weil Gotshal & Manges LLP pour conduire l’investigation.
Le laboratoire, qui a assuré qu’il collaborerait à toute enquête des autorités, indique avoir mis au sein de ses filiales des procédures et des contrôles stricts “pour empêcher et détecter des conduites” qui pourraient enfreindre la loi.
– Argent et cadeaux aux médecins –
D’après le Wall Street Journal, qui dit avoir eu accès à certains courriels, Sanofi aurait payé des médecins pour qu’ils assistent à des conférences à l’étranger et leur aurait donné de l’argent ou fait des cadeaux.
Des médecins au Kenya demandaient par exemple de l’argent à Sanofi pour participer à des colloques. En échange, ils prescrivaient des médicaments fabriqués par le groupe français.
Les grands groupes pharmaceutiques, qui sont en quête de relais de croissance, font actuellement l’objet d’un contrôle strict pour leurs pratiques dans les pays émergents. Les accusations de corruption à leur encontre se sont multipliées ces derniers mois.
La Chine reste le pays où ils sont le plus visés.
En août 2013, les autorités chinoises ont ouvert une enquête contre Sanofi, suite à des accusations de corruption dans le pays.
Le géant britannique GlaxoSmithKline (GSK) a lui été reconnu coupable de corruption mi-septembre dans ce même pays. Il a été condamné à une amende “record” de 3 milliards de yuans, soit l’équivalent de 378 millions d’euros –la pénalité “la plus élevée” jamais infligée par la justice chinoise à une entreprise.
Le numéro un mondial de la pharmacie en terme de chiffre d’affaires, le suisse Novartis, a lui-même lancé en 2013 une enquête interne après des accusations de corruption dans la presse chinoise à l’encontre d’Alcon, sa filiale spécialisée dans l’ophtalmologie.
Aux Etats-Unis, les autorités sont également vigilantes.
En début d’année, le gouvernement américain a de nouveau porté plainte contre le laboratoire, qu’il accuse d’avoir versé des pots-de-vin à des médecins et des pharmaciens pour les inciter à prescrire certains médicaments.
Novartis est principalement accusé d’avoir payé des médecins pour des conférences sur certains de ses médicaments, notamment le Lotrel et le Valturna (hypertension) ou le Starlix (diabète), lors d’événements qui n’étaient rien d’autre que des déplacements récréatifs.
Les médecins étaient souvent invités dans des grands restaurants où le prix d’un repas atteignait 672 dollars, selon le DoJ.