éaire EDF (Photo : Eric Piermont) |
[08/10/2014 18:59:06] Bruxelles (AFP) La Commission européenne a donné mercredi son accord à la construction au Royaume-Uni d’une centrale nucléaire par le groupe énergétique français EDF, qui y voit “une étape majeure” pour son projet contesté.
Au cours de l’enquête, Londres “a accepté de modifier substantiellement les termes de financement du projet”, ce qui permettra d’éviter “tout effet de distorsion de concurrence”, a expliqué la Commission dans un communiqué.
Ce projet de construction de deux réacteurs de nouvelle génération EPR du groupe Areva à Hinkley Point (sud-ouest de l’Angleterre) par EDF et ses alliés chinois CGN et CNNC aura un coût d’environ 31 milliards d’euros, selon la Commission.
Ce montant inclut le coût du financement, d’après EDF, alors que la construction elle-même reviendra à 16 milliards de livres (environ 20 milliards d’euros).
“L’autorisation par la Commission européenne marque une étape majeure du projet Hinkley Point C”, a déclaré le PDG du groupe énergétique, Henri Proglio, dans un communiqué.
La centrale devrait commencer à fonctionner en 2023 “sous réserve d’une décision finale d’investissement”.
Pour le ministre français de l’Economie, Emmanuel Macron, la décision de Bruxelles “témoigne de la compétitivité de la technologie EPR développée par Areva, de sa réponse aux plus hautes exigences de sûreté et de sa capacité à conquérir des marchés à l’export”.
Le projet s’est toutefois heurté à une forte résistance de groupes de défense de l’environnement, des Verts et de plusieurs Etats membres de l’UE.
L’Autriche a ainsi confirmé mercredi qu’elle attaquerait devant la Cour de justice de l’UE toute décision de la Commission autorisant les aides du gouvernement britannique, redoutant que cette autorisation relance la filière nucléaire en Europe au détriment des énergies renouvelables.
“Nous n’accepterons pas la décision d’approuver des subventions au nucléaire. Comme nous l’avons déjà annoncé, nous allons préparer et déposer une plainte devant la Cour européenne de justice”, a indiqué le gouvernement autrichien dans un communiqué.
ée (Photo : Alain Jocard) |
Selon l’accord, EDF est assuré d’un prix garanti élevé pendant 35 ans pour l’électricité produite par la future centrale. Ce prix sera fixé à 89,50 livres par mégawattheure si EDF décide par la suite de poursuivre son projet de construction de deux autres EPR à Sizewell (est). Dans le cas contraire, il s’élèvera à 92,5 livres.
C’est donc le gouvernement britannique qui paiera la différence si le marché tombe sous ce niveau de prix garanti, une disposition généralement appliquée aux énergies renouvelables.
EDF doit aussi bénéficier d’une garantie publique de l’État britannique pour emprunter afin de construire la centrale.
– “Défaillance du marché” –
Le Parti vert européen a jugé “extrêmement regrettable” la décision de Bruxelles, estimant notamment que “le nucléaire doit être considéré comme une technologie mature, et par conséquent être exclu des aides d’Etat”.
“Le choix de l’énergie nucléaire appartient au Royaume-Uni, et relève de ses compétences nationales”, a expliqué le commissaire européen à la Concurrence, Joaquin Almunia, lors d’une conférence de presse.
Mais, a-t-il souligné, cette décision “ne constitue en aucun cas un précédent”, et tout nouveau cas d’aide publique à un projet énergétique “sera évalué selon ses propres mérites”.
La Commission avait ouvert une enquête en décembre 2013 concernant la construction de la centrale de Hinkley Point, censée marquer le coup d’envoi du renouvellement du parc nucléaire britannique, et qui assurera à terme 7% de la fourniture d’électricité du Royaume-Uni.
Elle craignait que le projet, tel que notifié au départ, ne crée des distorsions de concurrence sur le marché européen de l’énergie. Elle a finalement conclu que l’aide du gouvernement britannique était conforme à ses règles, car il existe une “défaillance du marché”: l’opérateur n’aurait pas pu obtenir le financement nécessaire uniquement sur les marchés, en raison de la taille et de la nature exceptionnelles du projet.
Pour Greenpeace France, cet argument illustre au contraire “la faiblesse du modèle industriel nucléaire: la construction d’une nouvelle centrale ne peut se faire qu’au prix de subventions colossales et de conditions princières accordées à EDF”.
“À l’heure où il est question de réduire les subventions aux énergies renouvelables, on autorise une aide d’État pour cette technologie du siècle dernier, hors de prix et dangereuse!”, a renchéri le réseau “Sortir du nucléaire”.
Les mesures prises par le Royaume-Uni ont dû être modifiées lors de négociations avec la Commission. Le niveau de rémunération de la garantie d’Etat par l’opérateur, jugé trop bas, a été relevé et, en cas de profits plus élevés que prévu actuellement, les gains devront être partagés avec les contribuables britanniques.