çais et européen (Photo : Philippe Huguen) |
[15/10/2014 10:55:40] Bruxelles (AFP) Le compte à rebours commence mercredi à Bruxelles pour le budget français qui prévoit de nouveaux dérapages des finances publiques et pourrait être rejeté d’ici à quinze jours par la Commission européenne, un scénario humiliant que certains cherchent à tout prix à éviter en Europe.
La France, comme tous les pays de la zone euro, doit envoyer d’ici à mercredi soir son projet de budget 2015 pour que la Commission l’examine et donne son avis. Depuis un an, elle dispose en effet d’un droit de regard sur les projets de budgets nationaux. Elle peut soit les valider, soit demander formellement à un Etat de revoir sa copie, ce qui n’est encore jamais arrivé.
En l’état, le budget français, bien que marqué par des économies de 21 milliards d’euros, ne passe pas la rampe. Non seulement il prévoit un déficit à 4,3% du PIB, loin des 3% auxquels Paris s’était engagé, mais même en termes structurels (sans les effets de la conjoncture), le compte n’y est pas.
En terme de réformes, “ça ne suffira pas” non plus, souligne une source européenne. “La Commission sait que la France a déjà mis en oeuvre des réformes structurelles, mais soit elles ne sont pas entrées en vigueur, soit elles n’ont pas encore porté leurs fruits”.
L’agence Fitch a d’ailleurs menacé mardi d’abaisser la note de la France d’ici à décembre en raison des difficultés du pays à réduire son déficit. La crédibilité budgétaire de la deuxième économie de la zone euro est “affaiblie”, juge l’agence de notation.
à Luxembourg |
La semaine dernière, c’était le patron de la zone euro, Jeroen Dijsselbloem, qui s’en prenait à la France, critiquant le délai dont elle a bénéficié pour ramener son déficit dans les clous européens. “Comment ont-ils utilisé ce temps? Pour être tout à fait franc, je crois qu’ils n’ont pas utilisé” ce délai pour des réformes, avait-il lancé à Washington.
Pour justifier son budget 2015, Paris argue de “circonstances exceptionnelles” — notamment la croissance atone et le très bas niveau de l’inflation. Mais l’argument ne passe pas auprès de pays comme l’Autriche ou le Portugal, qui ont dû consentir à des efforts importants.
Vienne a d’ailleurs dû réviser son projet de budget au printemps dernier après l’entrée en fonction du nouveau gouvernement, après une série de courriers avec la Commission. Ces négociations ont permis d’éviter un rejet pur et simple du budget autrichien.
– Inflexible –
Dans ce contexte, la pression monte depuis une dizaine de jours pour que la France modifie son projet de budget avant de le soumettre à Bruxelles mais Paris se montre inflexible, pris en étau entre les obligations européennes et les questions de politique intérieure.
“On ne va pas modifier le projet, on vous le garantit”, assuraient encore lundi des sources françaises à Luxembourg, où se tenait une réunion de la zone euro.
Mais en coulisses, des négociations ont commencé pour voir quels efforts supplémentaires la France pourrait faire pour éviter les fourches caudines de Bruxelles.
“Je suis persuadé qu’une solution sera trouvée en France”, avait dit lundi le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, garant de l’orthodoxie budgétaire en Europe.
C’est sur le volet réformes que les partenaires de la France veulent le plus des résultats, selon une source européenne. Sur ce point, Paris montre des signes de bonne volonté: une partie des mesures prévues dans un projet de loi préparé par le ministre de l’Economie Emmanuel Macron et notamment consacré aux professions réglementées sera présentée dans la journée en Conseil des ministres.
“Le gouvernement français pourrait voir son projet de budget accepté par l?Europe avec guère plus que quelques mesures d?économies supplémentaires”, estime Bruno Cavalier, de la maison de courtage Oddo, rappelant combien “le discours réformiste du gouvernement français s?est accentué ces dernières semaines”.
Lundi, le ministre des Finances, Michel Sapin, avait laissé entendre que les demandes de Bruxelles pourraient trouver un relais au Parlement, “la seule instance susceptible de modifier un budget”.
Le projet de budget italien pourrait lui aussi susciter la controverse. L’effort structurel est insuffisant au vu des critères européens, même si le pays a un déficit sous la barre de 3%, contrairement à la France.